Laurent Poncelet. Des gens passent et j’en oublie

Film, 2020

Marie-Hélène Dacos-Burgues

p. 53

Référence(s) :

Laurent Poncelet. Des gens passent et j’en oublie, film, 2020.

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Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Laurent Poncelet. Des gens passent et j’en oublie », Revue Quart Monde, 255 | 2020/3, 53.

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Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Laurent Poncelet. Des gens passent et j’en oublie », Revue Quart Monde [En ligne], 255 | 2020/3, mis en ligne le 01 septembre 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/10036

Ils sont cinq hommes dans ce film1 : Gaspard, Fred, Polo, Bob, Pierre-Henri Brahim, tous dans des rôles de marginaux, plus un : le banquier, et quel banquier !… Six hommes donc, pour nous étonner…, et deux femmes non moins mystérieuses. L’une est l’aimée, la référence ou celle qui prend naturellement la direction des affaires : Josiane, une forte femme, qui fume et qui boit. L’autre femme c’est celle qui conseille Josiane, la représentante de l’État, la figure de la bonne société, l’A.S. garante de la norme comportementale : « Je viens voir, comme convenu, comment vous avez mis en œuvre le plan que nous avions décidé en commun, question cigarettes et alcool ».

L’un de ces hommes, au costume déchiré, recherche du « taf », se déplace en bus de façon un peu aléatoire semble-t-il, distribue son CV aux voitures qui passent, sans plus de succès que dans les entreprises où il reçoit moult refus ; l’autre fait des combats de boxe fictifs, en chambre, sans punching-ball, et quand son coach lui dit : « tombe », il tombe et décide qu’il est enfin champion du monde, se met à le crier par la fenêtre ; un plus vieux lit Homère sans penser à rien d’autre que d’entraîner ce jeune sportif de « haut niveau » avec qui il cohabite dans une sorte de taudis ; un autre vieux, apparemment clochard de la rue, hurle sous les fenêtres de sa dulcinée : « Mais ouvre ta porte, avec tout ce que nous avons en commun, ouvre donc ! Je t’aime » ; enfin un autre du genre SDF, compatit à la détresse de l’amoureux transi, d’autant qu’il est également amoureux de la même personne et, de même, éconduit. Dans sa sollicitude ce dernier ne lâche plus celui qui pourrait être son rival et qui devient de fait son plus proche ami. Tous les deux finissent par s’endormir dans les bras l’un de l’autre devant la porte fermée de celle qu’ils aiment.

Toute l’histoire est un peu lente, un peu longuette (55 minutes)… Pendant d’interminables minutes, on ne voit pas où le réalisateur veut en venir… Les cinq personnages sont d’abord seuls, et seuls avec chacun de nous les spectateurs, seuls avec chacun de nos préjugés sans doute… Finalement ces cinq hommes se retrouvent tous ensemble… à cause de celui qu’ils appellent le banquier, banquier qui en tant que tel sera kidnappé et mis dans une grande poubelle… Il sera sommé de payer les loyers en retard de Josiane !

Le film laisse un goût très fort et très vif pour la vie de ces gens cabossés, ces êtres humains qui n’ont pas besoin de nos charités pour être debout. Il distille même une certaine joie de vivre. Mêlant acteurs professionnels et amateurs du groupe théâtral grenoblois Mange-Cafard dont les membres « sont en situation de marginalisation sociale pour une partie d’entre eux », il est, déjà à ce seul titre, remarquable.

1 Des gens passent et j’en oublie, film de Laurent Poncelet, 2020, avec Salim Benayech (Pierre-Henri Brahim), Martina Coblentz (la conseillère)

1 Des gens passent et j’en oublie, film de Laurent Poncelet, 2020, avec Salim Benayech (Pierre-Henri Brahim), Martina Coblentz (la conseillère), Christophe Delachaux (Polo), Marie-Christine Delhomme (l’hôtesse de l’entreprise), Frédéric Monfort (Fred), Jérôme Plantevin (le banquier), Henri Thomas (Gaspard), Sylvia Tourlan (Josiane), Pascal Zeller (Bob). Ce film a été vu, pendant le confinement, avec lien Viméo.

Marie-Hélène Dacos-Burgues

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