Photographie de la situation sociale

V. Morgounov

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V. Morgounov, « Photographie de la situation sociale », Revue Quart Monde [En ligne], 157 | 1996/1, mis en ligne le 05 septembre 1996, consulté le 23 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/1027

Avec la chute de régime communiste, la Russie a découvert le chômage, les jeunes en difficulté, la pauvreté, tous ces fléaux sociaux à l’origine de l’exclusion jusqu’alors officiellement inexistante. L’Etat, face à cette situation ne reste pas indifférent

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Que font l’Etat et les organismes publics pour qu’il y ait moins d’enfants abandonnés, moins e pauvres ? ou, du moins pour que la frontière entre riches et pauvres ne soit pas aussi marquée ?

Dans l’ancien système bureaucratique, de nombreuses organisations et commissions avaient pour objet de lutter contre le phénomène des enfants sans foyer, véritable fléau de la société. Les adolescents s’étant fait remarquer par leur mauvaise conduite étaient inscrits sur une liste et l’administration s’en occupait obligatoirement. Les jeunes ne pouvaient quitter l’école à l’insu de leurs parents, de la commission chargée des mineurs, de la milice. Des organismes spéciaux, bons ou mauvais examinaient leur cas lorsqu’ils arrêtaient leur scolarité pour entrer dans la vie active. Aujourd’hui, de nombreux adolescents quittent l’école sans être enregistrés comme ayant quitté l’école, d’eux-mêmes ou en ayant été exclus. Les parents viennent et retirent leurs enfants pour qu’ils les aident dans leur activité, leur entreprises. Certains jeunes trouvent de « petits boulots » ils lavent les vitres ou apportent les journaux dans les kiosques. Cette situation présente de gros risques. C’est en effet une des causes de la criminalité au sein de la jeunesse.

Il y a quelques années, le problème du chômage ne se posait pas officiellement à Moscou. Selon la loi, toute personne sans travail en portait la responsabilité pénale. Etait-ce bien ou mal ? D’un côté, que les gens soient employés à la mesure de leurs forces et de leurs aptitudes était une bonne chose : il y avait ans les gares moins de vagabonds qu’aujourd’hui. Mais de l’autre, il y avait atteinte aux droits de l’homme : « Travaille, sinon tu seras puni »

Le Département du Travail et de l’emploi n’a pas aujourd’hui pour fonction de lutter contre la pauvreté et de pratiquer la bienfaisance. Son rôle est de mettre en œuvre, sur le marché du travail, une politique qui adoucit en ces temps difficiles la situation socioéconomique pesant sur les Moscovites.

En 1993, le nombre de travailleurs a globalement diminué. Cette réduction s’est faite aux dépens de l’industrie et d’organisations scientifiques de la ville alors que davantage de personnes ont travaillé dans les services et les établissements bancaires et financiers.

Début 1993, le gouvernement de Moscou a pris des mesures pour protéger la population du chômage. Deux lignes directrices se sont dégagées de ce programme : le perfectionnement et la réorientation professionnelle des chômeurs, compte tenu de leur souhait d’obtenir un nouveau métier. Nous proposons à ceux qui nous contactent les postes vacants dans les entreprises de la ville. Je pense qu’il y a dans la création d’emplois une garantie sociale bien réelle.

Le fait que certains chômeurs refusent des emplois s’explique par plusieurs raisons. Ceux qui approchent de la retraite attendent de toucher leur pension. D’autres, en l’absence de perspectives dans les entreprises reçoivent des allocations et une aide matérielle. Restent alors ceux qui ne veulent pas changer de profession et prendre un poste vacant : il s’agit souvent des fonctionnaires de l’administration ou de la recherche scientifique qui, licenciés, attendent leur heure. La situation économique ne leur a, en effet, pas encore fait comprendre suffisamment nettement qu’il faut chercher et prendre tout travail qui se présente. Mais le nombre de chômeurs à Moscou semble naturel vu la taille de la ville.

Ceux qui, s’étant adressés à nous, ne trouvent pas d’emploi sont inscrits sur des listes et reçoivent une allocation.

Pendant deux ans, notre administration s’est occupée d la création d’emplois pour remédier au chômage structurel actuel. Aujourd’hui, le gouvernement de Moscou a pris le relais en s’appuyant sur notre expérience.

Notre activité nous a permis de dégager trois axes principaux d’action : création d’emplois et garantie d’emploi pour les handicapés, les femmes et les jeunes. Des entrepreneurs viennent nous voir pour obtenir une aide financière. Nos moyens financiers proviennent des contributions versées par les entreprises à la ville. Nous ne pouvons donc accorder de subventions que si le remboursement est garanti. C’est pourquoi la majorité des entreprises avec qui nous concluons un accord sont des sociétés à responsabilité limitée, fonctionnant depuis un certain temps avec un capital de base, un équipement suffisant. Nous refusons les crédits aux entreprises qui démarrent, bien que certaines présentent des perspectives intéressantes : la loi nous interdit de disposer sans précautions des derniers publics. En 1993, nous avons conclu 29 conventions qui ont permis la création de 1492 postes, dont 200 pour les handicapés, 200 pour les jeunes et environ 600 pour les femmes.

Nous avons créé des foires aux emplois. Il existe à Moscou dix arrondissements ; dans chacun se déroulent environ quatre foires. Cela se passe dans de grands clubs ; une vingtaine d’employeurs y viennent : des avis sont affichés ; ces foires s’adressent à ceux qui cherchent du travail dans ces quartiers. Ce marché ne connaît pas d’interruption.

V. Morgounov

V. Morgounov travaille au Département du travail et de l’emploi de Moscou

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