Le théâtre, un long parcours de « réenchantement » social

Philippe Osmalin

p. 4-10

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Philippe Osmalin, « Le théâtre, un long parcours de « réenchantement » social », Revue Quart Monde, 262 | 2022/2, 4-10.

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Philippe Osmalin, « Le théâtre, un long parcours de « réenchantement » social », Revue Quart Monde [En ligne], 262 | 2022/2, mis en ligne le 01 décembre 2022, consulté le 29 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/10664

Le théâtre peut être à la portée de tous et toutes, en particulier des personnes en situation de fragilité, par de multiples « chemins de traverse » plus ou moins familiers ou à défricher. Revenant aux sources du théâtre comme « art de l’humain » et véritable « service public », l’auteur évoque les évolutions apparues au cours des siècles, jusqu’aux expériences multiples qui sont menées aujourd’hui dans différents cadres de pratiques théâtrales, favorisant la mixité sociale et avec un souci d’exigence reconnu.

« L’homme habite poétiquement la terre », disait Hölderlin. Et Edgar Morin, dans Pour une politique de civilisation, de suggérer que ce « poétique » soit à prendre au sens anthropologique comme « une façon de vivre dans la participation… la jouissance, la communion… le rite… la danse, le chant… la liesse… [jusqu’à] l’extase ».1

Au cœur de l’humain

Le théâtre peut tout à fait se présenter comme une illustration de cette fonction « poétique », comme un indéniable processus de vie : comme les mailles de la construction de soi par le tissage collectif et ses manifestations culturelles de cohésion, d’exaltation et de liberté.

Et c’est bien là que devrait s’inscrire le processus social d’intégration de tout individu, et que devrait se mettre en place l’enjeu d’un réel humanisme, l’éthique d’un réenchantement du tissu social : aider chacun à accéder au statut de personne pleinement responsable, et qui soit capable de prendre part à la société en toute conscience et ferveur sans jamais cesser d’être soi‑même.

Parce que le théâtre est avant tout le miroir de la société, de ses combats, de ses peurs, de ses angoisses, de ses dépassements, de ses espérances, de tout ce qui fait écho chez chacun, quels que soient ses origines, sa condition, son âge, ses perspectives de vie, toute personne peut se sentir réellement concernée. Parce qu’il est intrinsèquement, profondément un outil de réflexion comme de divertissement, d’éducation comme de création, de recul sur soi comme d’apprentissage citoyen, le théâtre peut être à la portée de tout un chacun. Pas seulement dans la posture de spectateur, mais plus encore dans celle d’acteur.

Comment, sous quelles formes, par quels chemins ? J’aime à dire : par tous « les chemins de traverse » qu’il nous est donné de croiser. Aider les personnes en situation de fragilité ne consiste pas à leur montrer le chemin de loin, qu’elles ne sauraient clairement distinguer, ni à les y mener de manière directive, sans leur expliquer le sens, mais au contraire de les orienter tranquillement là où leurs propres pas peuvent les conduire, tout en leur proposant aussi des voies moins familières, mais jamais insurmontables.

C’est que le théâtre a cette double vertu de ne pas relever de techniques inaccessibles et de travailler avec l’autre comme partenaire de route et sujet d’émulation ; on chemine ensemble.

C’est que le théâtre prend sens au croisement de tout ce qui fait l’humain : mise en relation d’individus et construction de soi, mode de métaphorisation et ancrage dans le réel, art de la parole et art du geste, du tragique et du comique, de la réflexivité et de l’émotion. En somme, cet art de l’humain, comme art des multiples tensions possibles entre toutes choses, peut tout particulièrement impulser des énergies de transformation et créer des dynamiques d’innovation, et se manifester également comme un pôle d’éducation au sens le plus noble et le plus large, non point dans le sens restreint d’instruction mais dans celui d’un savoir-faire menant à un savoir‑être.

Pour saisir tous ces enjeux et comprendre le cheminement complexe du théâtre dans notre histoire culturelle et son accès au plus grand nombre, il me faut retourner à certains moments clés de cet art dans son rapport politique (au sens fort du terme) et éducatif à la Cité, et dégager son impact essentiel dans sa pratique pour tous. Pour cela je me suis fondé sur quelques axes majeurs qui m’apparaissent particulièrement significatifs.

Aux sources grecques d’un théâtre populaire

Revenons donc rapidement aux sources. Le théâtre s’est d’abord présenté, dans ses origines grecques, comme un rite de communion religieuse autour de la figure mythique de Dionysos, comme une célébration subversive de ferveur divine et de liesse populaire par une ivresse de tous les sens où s’épanouissaient la danse, le chant, la musique dans un sublime lâcher-prise des affects et des corps… De cette fête dionysiaque allait sortir, très vraisemblablement, l’art du théâtre comme culte civique, participation de tous à la vie de la Cité, organe régulateur des pulsions, lien de cohésion sociale, mise en forme d’un discours sur l’histoire collective (à partir des mythes fondateurs), détermination de valeurs culturelles communes.

Le théâtre mettait alors en place le processus d’intégration de tous les membres de la cité2 par la représentation qui avait valeur éducative à travers les récits mythiques, la participation active de spectateur, la « catharsis »3 sociale au travers de la puissance tragique, l’incitation aux débats publics… On peut affirmer que le théâtre était un « service public », même s’il n’avait lieu alors que quelques jours par an sous la forme de concours dramaturgiques.

Une fracture culturelle sur plusieurs siècles…

Pourtant, une fracture profonde va se produire : le théâtre va perdre le sens de la participation collective cathartique, éducative et citoyenne pour devenir l’apanage d’une classe sociale favorisée, capable de payer sa place pour entrer dans le théâtre. Cette profonde fracture va se produire à la Renaissance4 avec une nouvelle donne économique, et la notion d’argent (à la suite des Grandes Découvertes) qui conduit les comédiens à vouloir se faire rétribuer et les spectateurs riches à vouloir garder pour eux ce « divertissement ». Ainsi, les pièces sont jouées désormais dans des lieux clos (pour faire payer l’entrée), où il s’agit de se faire voir « en société » plutôt que d’écouter une œuvre artistique et d’en tirer un quelconque profit d’esprit, un gage de vertu civique ou une catharsis sociale. Le théâtre se fait progressivement « savant », et perd sa fonction de fête collective et de lien social. Il est tout de même à noter que la Commedia dell’arte en sera un contrepoint par ses représentations très populaires, en plein air, avec ses personnages parodiques issus de toutes les classes sociales.5

Loin de s’arrêter à ce renversement de nature économique, le théâtre va subir un rejet philosophique profond au 18e siècle, notamment à travers Jean-Jacques Rousseau, l’un des pères fondateurs de la modernité éducative, qui exclut le théâtre et le recours aux récits ou aux fables dans toute éducation digne d’un homme libre. C’est que pour Rousseau l’éducation relève de la raison, là où les arts, et plus particulièrement la littérature et le théâtre, relèvent de l’affect, nous projetant dans le monde de l’apparence, et donc des illusions : « Le théâtre n’est pas fait pour la vérité ; il est fait pour flatter, pour amuser les hommes. »6

La dualité philosophique entre raison et émotion est, cependant, remise en question au cœur de la Révolution française en des débats qui vont opposer deux grandes tendances éducatives : l’une, incarnée par Condorcet, s’appuie sur le concept d’instruction dans son développement rationnel ; l’autre, à travers Le Peletier de Saint-Fargeau, privilégie les formes d’expression artistique collective. Pour les tenants de cette dernière conception, le mode essentiellement affectif devrait favoriser l’émergence d’une solidarité, d’un sentiment collectif d’appartenance pour construire la nation en devenir. Il y aurait presque là quelque chose du dionysiaque des origines dans ce rituel de cohésion sociale. Mais c’est la tendance rationnelle de Condorcet qui l’a définitivement emporté. Et près d’un siècle plus tard, l’école républicaine de Jules Ferry entérine la victoire de la raison en rejetant l’expression artistique comme inapte à favoriser l’épanouissement d’un être libre et « raisonnable ».7

Un tournant au début du 20e siècle : ça pense, ça joue…

Pourtant, malgré ce rejet de la sensibilité artistique, l’expression théâtrale va trouver à se développer au début du 20e siècle. Et c’est tout particulièrement grâce aux intuitions de pédagogues d’avant-garde comme Maria Montessori en Italie et Ovide Decroly en Belgique, qui se montrent attentifs aux enfants handicapés ou en situation de très grande difficulté sociale ou psychologique, meurtris par la vie et donc confrontés à la violence sur eux ou sur les autres. Et le théâtre se révèle alors un véritable outil, à la fois de contrôle de soi et d’extériorisation positive par les vertus de la catharsis et d’une créativité salutaire – où le jeu ludique puis théâtral se fait (re)construction de soi. Aucune théorie ni méthode ne président à cette expression artistique ; seule la pratique spontanée et intuitive conduit ces pionniers, dans leur mission profondément démocratique, à amener (ou ramener) les enfants en mal de vie, en rupture d’équilibre familial ou social, au monde, au corps individuel, au corps social. Ainsi, il n’est pas faux de dire que le théâtre, parmi d’autres pratiques, va participer à la démocratisation de l’éducation et à la socialisation de l’individu, en dehors de la sphère institutionnelle officielle – et particulièrement au sein de la mouvance de « l’éducation populaire » : là où philosophie et pédagogie se rejoignent (enfin) dans cette quête de « l’humanité dans l’homme ».

En effet, à la fin du 19e siècle, le développement des sciences humaines, avec la psychologie appliquée8 (puis la psychanalyse) et la sociologie, conduit à voir le monde autrement, et par là-même à repenser le nouveau rapport de l’individu à ce qui l’entoure ou le construit (psychologiquement, socialement, culturellement). Et l’expression théâtrale va y participer à sa manière. Ainsi, le metteur en scène et comédien Charles Dullin développe une pédagogie innovante du théâtre (qui va influer, du reste, sur l’éducation populaire). « À aucun moment Dullin n’établit de relation hiérarchique entre celui qui sait et celui qui ne sait pas. » Non content d’être dans une attention rare à chacun de ses élèves, Dullin tenait aussi à un « art collectif et socialement impliqué ».

Dès les années 20 et plus largement encore dans les années 30, se développent les ateliers artistiques, et notamment de théâtre, auprès d’un vaste public dans cet esprit militant de démocratisation qui anime alors l’Éducation Populaire, notamment avec les CEMEA (Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Éducation Active en 1937), ou plus tard, en 1946, l’Éducation par le Jeu Dramatique (l’EPJD). Cette association, en particulier, a pour objectif de conduire à la maîtrise de soi pour la création personnelle, théâtrale ou sociale en prenant appui sur l’improvisation et le travail de groupe. Ce que ses fondateurs expriment ainsi avec justesse : « Chacun porte en soi de nombreuses possibilités que la vie brime. Les divers ordres d’enseignements s’adressent surtout à l’intelligence. La sensibilité s’est recroquevillée. Il faut faire retrouver cette sensibilité naturelle, puis l’affiner, l’orienter : c’est une école nécessaire (…) pour quiconque, parce qu’elle donne à chacun la possibilité d’être soi-même et l’acteur de sa propre vie »9. Le jeu théâtral, collectif, passe ici directement par l’expérimentation. Et dans ce nouveau processus s’inscrit une valorisation sociale inédite.

Après 1945 : tâtonnements et initiatives…

Malgré ces premières tentatives, les inégalités sociales dans l’accès à la culture ne se résorbent pas pour autant, l’institution théâtrale reste élitaire et l’école ne sait toujours pas apporter la créativité au sein de la classe, emprisonnée dans son carcan rationnel.10

Pourtant, les appareils d’État tentent de ne pas être en reste dans ce qu’il a été convenu d’appeler l’« action culturelle »11 – ainsi avec la Fédération française des Maisons des Jeunes et de la Culture (les fameuses MJC), établie à la fin des années 40 (même s’il ne faut pas perdre de vue que des enjeux politiques n’y sont pas étrangers). Et un Ministère de la Culture est créé en 1959 par Malraux dans l’intention affichée de « mettre la culture au service de tous ».

Mais c’est plus particulièrement Jean Vilar qui va donner ses lettres de noblesse au « théâtre populaire »12, avec le TNP en 1951 et en lançant dès 1947 un festival à Avignon. Il milite pour un nouvel accueil démocratique du public : des places à un prix abordable pour tous, des horaires permettant aux « travailleurs » de venir, et même des repas bon marché ! Il affirme que « le Théâtre National Populaire est un service public, tout comme l’eau, le gaz et l’électricité » ; « Il faut réaliser que le théâtre n’est pas qu’un divertissement, n’est pas un objet de luxe, mais le besoin impérieux de tout homme et de toute femme » ; « Mon ambition est donc évidente : faire partager au plus grand nombre ce que l’on a cru devoir réserver jusqu’ici à une élite » et « Nous allons réunir, dans les travées de la Communion Dramatique, le petit boutiquier de Suresnes et le haut magistrat, l’ouvrier de Puteaux et l’agent de change, le facteur des pauvres… et Mr de Rothschild ! »13

Parallèlement, une autre approche, mais toujours dans un esprit d’accès du plus grand nombre à la sphère culturelle, est le développement du théâtre « non-professionnel », amateur, qui va se révéler essentiel. Dès 1907 est fondée une association de « sociétés » d’amateurs, qui deviendra la FNCTA (Fédération nationale des compagnies de théâtre et d’animation), une institution très dynamique.14 Sur un autre registre « amateur » et avec l’intention plus affichée de toucher les classes populaires est créée en 1964 le Théâtre-École de Montreuil, accueillant notamment toute une jeunesse de banlieue qui s’initie avec passion au théâtre. D’autres théâtres-écoles voient le jour à sa suite.

Mais les classes les plus pauvres restent le plus souvent éloignées de toutes ces initiatives, à la fois par leurs difficultés économiques, une information qui n’arrivait pas nécessairement jusqu’à elles, mais aussi par la peur de ne pas être « à la hauteur », d’être en contact avec un « autre monde » que le sien, méconnu, sinon inconnu, et ne répondant pas à ses besoins, ses soucis. Du reste, on peut penser au travail remarquable de Joseph Wresinski, avec le Mouvement ATD Quart Monde qu’il a fondé dès 1957, pour changer ce rapport des pauvres à la culture, pour initier une démarche active de leur part dans la possible appropriation de cet outil, ferment de transformation individuelle et, par là-même, sociale.15

Et maintenant, entrez en scène !

Et maintenant ? Il aura fallu attendre les années 80-90 pour que le théâtre institutionnel16 s’ouvre vraiment aux jeunes et aux personnes défavorisées, prenne en compte des tarifs plus abordables, élargisse sa palette de création, développe les rencontres et débats avec les équipes artistiques, bref se démocratise ! Comme on a pu le constater, le parcours fut long et sinueux… Tout n’est pas encore acquis, et les schémas anciens ne sont pas encore tous tombés, tant du côté de l’institution que de celui du public, a fortiori en situation de précarité.

Mais on peut tout de même constater que des expériences multiples sont désormais menées dans différents cadres de pratiques théâtrales, favorisant la mixité sociale et avec un souci d’exigence reconnu. Un tournant semble pris – où la culture s’ouvre au plus grand nombre et, surtout, est susceptible de favoriser l’émancipation, le bien-être et une certaine intégration sociale. Ainsi, sont mis en place un certain nombre de dispositifs avec les institutions culturelles de l’État, avec les collectivités territoriales… Et il est à souligner tout particulièrement un très riche travail associatif pour favoriser l’accès des plus précaires aux actions et activités culturelles à travers une grande diversité d’initiatives et de « bonnes pratiques ». Et une réflexion approfondie est menée également sur les « Droits culturels ».17 Comme on peut le constater, le champ culturel s’est considérablement élargi. Et l’institution scolaire n’est pas en reste, qui sait maintenant accueillir des propositions artistiques et socio-éducatives variées, pouvant se révéler très fructueuses, notamment auprès des enfants défavorisés.18

Forte de ce nouveau champ du possible, la pratique théâtrale a pu rencontrer un essor considérable. C’est qu’elle est un incroyable outil de valorisation et de confiance en soi, d’expérience collective et de construction, voire d’« invention », de soi19, qui peut mettre à jour des dynamiques inédites, de nouvelles potentialités, modifier ou réajuster des postures qui font blocage, et être gage d’ouverture.

Le théâtre peut agir ainsi comme un réenchantement : par un travail sur soi stimulant et souvent inattendu, par les énergies inter- actives entre partenaires de jeu et dans une appropriation d’outils exemplaires où peuvent s’effacer les « déterminations » sociales, au moins le temps du cheminement théâtral.

Ces outils sont ceux du corps, des émotions, des processus psychologiques autant que physiques, du jeu du regard, du rapport à l’espace, des facultés d’imagination… toutes ces fonctions qui travaillent de concert et déplacent les mécanismes de frein habituels pour reconfigurer une autre approche de soi et de son implication. Toutes choses dont on n’est, du reste, pas nécessairement conscient au moment où ça se joue.

On sait bien maintenant que la séparation arbitraire entre raison et émotion, dont nous avons parlé dans l’histoire culturelle du théâtre, n’a plus lieu d’être, et que la réalité scientifique des facultés du cerveau rejoint l’intuition de ce qui constitue de manière holistique l’individu. Sont notamment ici en jeu ce qu’on appelle les compétences émotionnelles, assistant ou appuyant le processus du raisonnement au lieu de le perturber, voire le paralyser, comme on le prétendait auparavant20.

De plus, le désir mimétique, grâce aux neurones-miroirs, joue un rôle considérable dans le besoin de « faire corps » avec ses partenaires de jeu : dans l’apprentissage par imitation en observant, dans un premier temps, ses partenaires, puis en s’appropriant les processus et en les transformant au gré de sa créativité. Or c’est là un mécanisme neuronal inhérent à chacun et qu’il suffit de stimuler.

Et à ce titre nous retrouvons les recherches faites en neurophysiologie, démontrant qu’une activité transformatrice refaçonne les circuits neuronaux stables (structures du cerveau) ou en crée de nouveaux dans une stimulation cognitive favorisant un développement personnel inédit. Et cela est d’autant plus remarquable pour des personnes chez qui les émotions, la fragilité (sociale et personnelle) sont exacerbées.

De fait, en mobilisant de manière constructive toute cette palette (neuronale, émotionnelle, psychologique, corporelle, cognitive), on multiplie les compétences propres à chacun et on favorise la créativité qui permet de prendre de la hauteur par rapport à ses problèmes quotidiens et à ses freins. Par l’insolite des situations sollicitées et vécues dans la distanciation du jeu théâtral, on parvient à se surprendre soi-même et à surprendre les autres, et à toucher ainsi à cette nécessaire estime de soi. Et la représentation sur scène, à l’issue du travail, devant un public en est le merveilleux aboutissement.

« J’ai appris à devenir vraie », témoignait une adolescente en situation de précarité au lendemain du spectacle auquel elle participait – témoignant bien par là que l’expérience artistique peut être un chemin vers soi.

1 E. Morin, Pour une politique de civilisation, Éd. Arléa, 2008, p. 50.

2 On pense que toute la population sans distinction de classe, de genre, d’âge pouvait se rendre aux représentations, y compris les esclaves.

3 Catharsis (selon Aristote) : la purification de l’âme délivrée de ses passions chez le spectateur d’une pièce de théâtre dramatique.

4 Au Moyen-âge le théâtre est gratuit et accessible à tous, et s’inscrit essentiellement dans un cadre religieux – même s’il existe des formes

5 Du reste, le théâtre, à partir du 16siècle, ne se développe pas de la même manière suivant les pays. Ainsi, le théâtre élisabéthain, avec

6 Émile ou de l’éducation, livre quatrième, Éd. GF, p. 450.

7 Et pourtant l’école républicaine utilise certains des rituels théâtraux pour faire de la classe ou de l’amphithéâtre (ce terme même directement

8 Voir notamment le courant philosophique américain du pragmatisme de la fin du 19e siècle et, dans son sillage, la construction pédagogique de John

9 Voir l’ouvrage collectif de l’EPJD au titre fortement évocateur : Faire des vivants : Éducation par le jeu dramatique, Les Chroniques intempestives

10 Ce qui va conduire à ce qui fut si longtemps en France l’image du théâtre auprès des enfants (et des parents) : caduc, ennuyeux, austère…

11 Voir L’Appareil d’action culturelle de J. Ion, B. Miege, A.-N. Roux, Éd. Universitaires, Paris, 1974.

12 L’idée d’un « retour » à un théâtre populaire était apparue dès la toute fin du 19e siècle autour d’auteurs et intellectuels (comme Emile Zola)

13 Voir l’ouvrage de réflexions de J. Vilar, De la tradition théâtrale, Éd. L’Arche, 1999.

14 La FNCTA recense actuellement près de 1 700 troupes sur toute la France et 20 000 licenciés.

15 On peut penser aux expériences de théâtre menées dès les origines du Mouvement, comme l’Antigone de Sophocle. Voir l’article en p. 20 de ce dossier

16 Après la parenthèse de la riche expérience de Vilar, si novatrice en France et finalement en partie avortée. Ainsi, son « Festival populaire » d’

17 Voir notamment à ce sujet la Déclaration de Fribourg, publiée en 2007, résultat de près de 20 ans de recherche.

18 On peut se reporter au livret de l’association Aide et Action écrit en collaboration avec Philippe Osmalin : Pratiques théâtrales et apprentissages

19 Sur ce concept on peut consulter différents ouvrages du sociologue Jean-Claude Kaufmann, et notamment L’invention de soi – une théorie de l’

20 Voir notamment les travaux du neurophysiologiste Antonio Damasio, et tout particulièrement son ouvrage essentiel L’erreur de Descartes : la raison

1 E. Morin, Pour une politique de civilisation, Éd. Arléa, 2008, p. 50.

2 On pense que toute la population sans distinction de classe, de genre, d’âge pouvait se rendre aux représentations, y compris les esclaves.

3 Catharsis (selon Aristote) : la purification de l’âme délivrée de ses passions chez le spectateur d’une pièce de théâtre dramatique.

4 Au Moyen-âge le théâtre est gratuit et accessible à tous, et s’inscrit essentiellement dans un cadre religieux – même s’il existe des formes profanes et marginales (comme les farces) ainsi que les spectacles de foire, qui se maintiendront dans les siècles suivants.

5 Du reste, le théâtre, à partir du 16siècle, ne se développe pas de la même manière suivant les pays. Ainsi, le théâtre élisabéthain, avec Shakespeare, garde une dimension plus populaire dans l’espace pourtant clos de représentation.

6 Émile ou de l’éducation, livre quatrième, Éd. GF, p. 450.

7 Et pourtant l’école républicaine utilise certains des rituels théâtraux pour faire de la classe ou de l’amphithéâtre (ce terme même directement emprunté au monde du spectacle) un espace de représentation où chacun tient un rôle. Sans le savoir, les enseignants étaient des acteurs quotidiens dans un cadre dramaturgique et scénique clairement codifié et parfaitement contrôlé avec un public acquis, auquel il s’agissait d’inculquer le culte de la raison.

8 Voir notamment le courant philosophique américain du pragmatisme de la fin du 19e siècle et, dans son sillage, la construction pédagogique de John Dewey : Learning by doing (apprendre en faisant).

9 Voir l’ouvrage collectif de l’EPJD au titre fortement évocateur : Faire des vivants : Éducation par le jeu dramatique, Les Chroniques intempestives, 1947.

10 Ce qui va conduire à ce qui fut si longtemps en France l’image du théâtre auprès des enfants (et des parents) : caduc, ennuyeux, austère…

11 Voir L’Appareil d’action culturelle de J. Ion, B. Miege, A.-N. Roux, Éd. Universitaires, Paris, 1974.

12 L’idée d’un « retour » à un théâtre populaire était apparue dès la toute fin du 19e siècle autour d’auteurs et intellectuels (comme Emile Zola) demandant au gouvernement la création d’un troisième théâtre subventionné, à côté de la Comédie Française et de l’Odéon, et qui soit accessible au plus grand nombre.

13 Voir l’ouvrage de réflexions de J. Vilar, De la tradition théâtrale, Éd. L’Arche, 1999.

14 La FNCTA recense actuellement près de 1 700 troupes sur toute la France et 20 000 licenciés.

15 On peut penser aux expériences de théâtre menées dès les origines du Mouvement, comme l’Antigone de Sophocle. Voir l’article en p. 20 de ce dossier.

16 Après la parenthèse de la riche expérience de Vilar, si novatrice en France et finalement en partie avortée. Ainsi, son « Festival populaire » d’Avignon deviendra, après lui, paradoxalement le « In », tandis que s’épanouira en parallèle, et longtemps en conflit, le « Off » !

17 Voir notamment à ce sujet la Déclaration de Fribourg, publiée en 2007, résultat de près de 20 ans de recherche.

18 On peut se reporter au livret de l’association Aide et Action écrit en collaboration avec Philippe Osmalin : Pratiques théâtrales et apprentissages citoyens (avec vidéos), à partir d’expériences avec des enfants de Villiers-le-Bel.

19 Sur ce concept on peut consulter différents ouvrages du sociologue Jean-Claude Kaufmann, et notamment L’invention de soi – une théorie de l’identité, Éd.Colin, 2004.

20 Voir notamment les travaux du neurophysiologiste Antonio Damasio, et tout particulièrement son ouvrage essentiel L’erreur de Descartes : la raison des émotions (Éd. Odile Jacob, 2010), sous son titre original Emotion, Reason, and the Human Brain, 1994. Cette question du processus neurobiologique à l’œuvre dans la pratique du spectacle vivant demanderait de plus amples développements, que nous ne pouvons tenir ici dans le cadre de notre article.

Philippe Osmalin

Chargé de cours à l’Université en master de sciences sociales et éducatives, Philippe Osmalin est metteur en scène, comédien, formateur-pédagogue et dirige la compagnie Théâtre de la Fugue ; il est partenaire solidaire et allié d’ATD Quart Monde depuis 2016.

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