« L’inégalité : un problème politique, plus grave que la pauvreté ». Tel était le titre d’un article paru il y a quelques années sous la signature de Francine Mestrum, une chercheuse très proche du Forum Social Mondial. Elle n’était ni la première, ni la seule, à opposer ainsi la lutte contre l’inégalité, ou les inégalités, à la lutte contre la pauvreté. Comme elle, nombreux universitaires, chercheurs, militants sociaux, considèrent que le grand combat à mener, et le seul qui vaille en fin de compte, est celui contre les inégalités. Il est possible de se rallier sans difficulté à cette thèse. Mais faut-il pour autant opposer cette priorité à donner à la lutte contre les inégalités, à celle pour arracher à la misère, à l’extrême pauvreté, les populations qui y sont enfermées ? Les deux combats ne pourraient-ils pas converger ? Ne sont-ils pas complémentaires ? Ne serait-il pas possible de s’attaquer aux inégalités en partant de la condition de celles et ceux qui les vivent de manière extrême, en s’appuyant sur leur vécu, leurs analyses, leurs réflexions, leurs propositions ? Une grande alliance entre les militants contre l’inégalité et ceux contre l’extrême pauvreté ne serait-elle pas possible et hautement souhaitable ? C’est ce que nous voudrions explorer dans ce dossier, en donnant la parole aux uns et aux autres, et tenter ainsi de s’expliquer, de vaincre des aprioris, des malentendus ou des idées fausses, et de construire ensemble les conditions d’un combat commun pour lutter contre les inégalités, enrayer la précarité économique et sociale et faire disparaître l’extrême pauvreté.