Wim Wenders. “Perfect Days” (Jours parfaits)

Film de fiction, 2023

Bella Lehmann Berdugo

p. 50-51

Référence(s) :

Wim Wenders. Perfect Days (Jours parfaits). Film de fiction, Japon-Allemagne, décembre 2023

Citer cet article

Référence papier

Bella Lehmann Berdugo, « Wim Wenders. “Perfect Days” (Jours parfaits) », Revue Quart Monde, 269 | 2024/1, 50-51.

Référence électronique

Bella Lehmann Berdugo, « Wim Wenders. “Perfect Days” (Jours parfaits) », Revue Quart Monde [En ligne], 269 | 2024/1, mis en ligne le 01 mars 2024, consulté le 27 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/11309

Hirayama vit à l’ombre d’une tour, dans un logement monacal, seulement entouré de ses plantes, ses livres d’occasion et ses cassettes de musique. Il travaille au nettoyage des WC publics de Tokyo2. Ces toilettes japonaises ressemblent à de petits temples modernes à l’architecture originale, variée. Mais une cuvette blanche reste une cuvette blanche, souillée ou pas, avec ou sans jet sophistiqué. Hirayama s’agenouille volontiers pour nettoyer les sanitaires avec toute l’attention qu’ils méritent. Durant son service, hommes et femmes y passent, pressés, distraits, impolis, saouls parfois. Hirayama est invisible à leurs yeux. Cela lui importe peu. Lui-même pose un regard positif, bienveillant sur les gens, les mondes qu’il croise : Takashi son collègue bavard et paresseux, l’amie Aya de ce dernier un peu perdue dans la vie, une voisine de banc public, une mère stressée dans un parc, un vieil homme à la rue, Niko sa nièce fugueuse, la propriétaire de son bar favori, particulièrement attentionnée comme une geisha, son ancien mari malade. Des scènes longues, parfois un peu démonstratives.

On devine petit à petit que Hirayama a probablement changé de vie à la suite de souffrances familiales. Il a choisi une existence matérielle modeste, routinière, débarrassée de tout superflu pour cultiver la beauté du moment présent. Takashi lui attribue un « 9 sur 10 sur l’échelle du bizarre ». Ce comportement peut apparaître artificiel ou exagéré. Le spectateur est invité à lâcher ses propres représentations et à plonger dans un rythme méditatif.

Hirayama, nettoyeur de mauvaises ondes, nous embarque alors avec lui dans ses rituels matinaux, dans ses lectures nocturnes, à bord de sa camionnette de service ou à vélo, dans la cadence régulière de ses journées dans la ville tentaculaire, dans la beauté cachée d’êtres fragiles, dans la connivence avec la nature, dans les parcs jamais loin des routes, des gratte-ciels. Hirayama poétise sa vie au sens propre.

Un mystérieux intermède répétitif ponctue chacune de ses nuits : reflets fugitifs en noir et blanc de feuilles dans le vent, comme un leitmotiv. La vie diurne du silencieux et discret Hirayama est rythmée par ses cassettes rétro, morceaux musicaux américains des années 1970, comme Lou Reed, Otis Ray Redding… Cela confère au film une légèreté, bienvenue. Une expérience immersive originale. « Oh it’s just a perfect day (…), I thought I was someone else. Someone good.”

2 Wim Wenders. Fiction. Japon-Allemagne. VOST. Décembre 2023. En compétition au Festival de Cannes 2023. Prix œcuménique. Prix d’interprétation

2 Wim Wenders. Fiction. Japon-Allemagne. VOST. Décembre 2023. En compétition au Festival de Cannes 2023. Prix œcuménique. Prix d’interprétation masculine pour l’acteur principal KöjiYakusko.

Bella Lehmann Berdugo

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