La santé ne se résume pas aux soins de santé

Freddy Givart

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Freddy Givart, « La santé ne se résume pas aux soins de santé », Revue Quart Monde [En ligne], 184 | 2002/4, mis en ligne le 05 mai 2003, consulté le 29 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/2472

F. Givart, contribution au symposium OMS à Bruxelles. « Le rôle de la famille dans la promotion de la santé et des comportements de santé. » Archives Public Health, 1993, 51, 81-87)

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Témoignage d’un père de famille, membre du Mouvement ATD Quart Monde

« Je voudrais d’abord vous dire que se soigner coûte cher lorsqu’on a le minimex ou le chômage. Que reste-t-il pour se soigner, pour s’occuper de sa santé à la fin du mois ? On peut être aidé par le CPAS mais ce n’est pas toujours accordé. Il faut s’expliquer devant l’assistant social et souvent cela nous humilie. Certains médecins refusent même de soigner si on n’a pas d’argent. Des gens très pauvres n’ont pas de mutuelle. Alors, c’est impossible de se faire soigner. Mais la santé, ce n’est pas seulement les soins. Vivre dans la pauvreté, c’est vivre dans les soucis. Quand tout manque, les parents se sentent humiliés. En plus la pauvreté attaque la santé : le bruit, la pollution, les mauvais logements, l’humidité, l’inquiétude… au long des années, ça use le corps et l’esprit.

Les ministres, les responsables savent-ils ce qu’est la misère ? Savent-ils que certains n’ont jamais le bien-être ? Les enfants deviennent nerveux dans les logements trop petits et nous aussi. Parfois, c’est pour faire éclater les nerfs. Il faudrait des vacances pas trop coûteuses, des plaines de jeux. On aimerait pouvoir sortir de la pauvreté et pouvoir être fier, mais c’est bien difficile, on ne trouve pas facilement la solution.

Il faudrait que l’on puisse travailler et qu’on ne nous envoie pas au chômage. Si on gagne de l’argent, on peut avoir un meilleur logement, une meilleure nourriture. Mais surtout on n’est plus humilié et cela change tout. On quitte ses soucis, on ose se montrer, on peut avoir des amis et les accueillir chez soi. L’enfant peut aller à l’école la tête haute. On n’est plus regardé comme des gens bizarres, on n’a plus peur quand on frappe à la porte. On n’a plus peur de l’assistante sociale. Nous voulons que nos enfants aient une meilleure vie que celle que nous avons eue. Nous voulons savoir comment faire. Pour cela, il ne faut pas nous menacer, nous rabaisser ou nous envoyer promener, mais nous aider.

Nous voyons bien que nos enfants ont une santé plus fragile. Nous les aimons plus que tout. Nous voulons vivre en famille et être fiers d’avoir de beaux enfants en pleine santé. Ce que nous voulons c’est être soignés convenablement, humainement, même si nous n’avons pas beaucoup d’argent. Nous voulons pouvoir choisir notre médecin. Nous voulons nous sentir utiles, pouvoir être aidés en cas de maladie d’un des parents pour que la famille ne se sépare pas. Nous voulons être respectés, surtout si nous sommes malades.

Nous devrions être représentés quand on parle des lois sur la mutuelle. Le logement, c’est pour nous très important : aujourd’hui, même les taudis coûtent cher. Tout homme doit avoir des conditions de vie dignes »

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