Oser bouleverser l'ordre même des choses

Cécilia de Varine et Jacqueline Chabaud

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Cécilia de Varine et Jacqueline Chabaud, « Oser bouleverser l'ordre même des choses », Revue Quart Monde [En ligne], 163 | 1997/3, mis en ligne le 05 mars 1998, consulté le 29 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/300

Oser bouleverser l'ordre même des choses.

 « On s'avance vers les visages qui nous regardent. Franck a réalisé ces têtes très simples à la gouache, comme autant de portraits anonymes. Pourtant, chacun porte en lui son mystère derrière l'épaisseur des couches de peinture superposées qui craquellent de trop vouloir cacher une lumière intérieure qui semble vouloir s'échapper. Chaque personnage est réduit à une face, la bouche prête à parler ou sourire, mais pas d'oreilles pour entendre. (...)

Composer sur une surface, c'est peut-être toujours ouvrir une fenêtre dans un mur. Exposer au monde d'autres mondes créés, c'est oser bouleverser l'ordre même des choses. Ici, on en est sûr, la vie est là, partout offerte, elle circule en œuvre respectueusement. Elle se prolonge et se rencontre avec toute la vie apportée par tous les regards qui se posent.

Et chaque cadre n'est plus le faire-valoir fermé d'un ordre établi, mais bien la limite possible d'une fenêtre-survie, fenêtres ouvertes sur la vie »

Allocations familiales : le mensonge.

Plafonner les allocations familiales ? Pas question pour certains ! Des bretteurs de tous poils se sont déchaînés contre cette décision du gouvernement français. Ils ont ferraillé au nom d'un principe jamais remis en cause depuis 1945 : l’égalité des enfants qui ont droit aux mêmes allocations, quels que soient les revenus et le statut de leurs parents. Tiens donc ?

Jusqu'en 1978, comment les chefs de famille dépourvus d'un statut de travailleur reconnu auraient-ils pu croire que leurs enfants étaient égaux aux autres ? Ils n'avaient pas droit aux allocations familiales.

Depuis 1992, comment les parents en grande pauvreté pourraient-ils croire à l'égalité de leurs enfants ? La loi créant le revenu minimum d'insertion (RMI) oblige la plupart d'entre eux à l'humiliation de vivre sur l'argent versé pour leurs enfants. Ils sont privés de la quasi totalité du montant du RMI, le montant des allocations familiales étant pris en compte dans le calcul de leurs ressources !

Et comment encore, ces mêmes parents pourraient-ils croire à l'égalité de tous les enfants, puisqu'en ces mêmes années 1991-92, les allocations familiales sont devenues saisissables pour dettes alimentaires ? Où étaient-ils alors les bretteurs d'aujourd'hui ?

Que des responsables politiques et des spécialistes osent donc énoncer tranquillement un tel principe (et y croire ?), cela pourrait prêter à rire. Mais nul besoin d'épée pour tuer. Une fois de plus, les familles en grande pauvreté ont été ramenées à l'inexistence par le mensonge, l'ignorance et leur cortège de sornettes.

Cécilia de Varine

Jacqueline Chabaud

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