B. Droit au logement

Rédaction de la Revue Quart Monde

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Rédaction de la Revue Quart Monde, « B. Droit au logement », Revue Quart Monde [Online], Dossiers & Documents (1998), Online since 20 September 2010, connection on 29 March 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/4756

Présentation : La loi cherche à mieux garantir le droit au logement pour tous tout au long du processus d'accès et de maintien dans le logement. Elle prend en compte les difficultés des personnes très démunies pour faire des démarches de recherche, pour se voir attribuer effectivement un logement et pour faire face à leur loyer. Les demandeurs pourront se plaindre d'un délai d'attente trop long. En cas d'impayé de loyer, tout devra être fait pour éviter l'expulsion : aider à la résorption de la dette ou proposer un autre logement. Ainsi, dans l'esprit du législateur, aucune personne ou famille de bonne foi (c'est à dire dans l'impossibilité financière de faire face à son loyer) ne devrait en arriver à être expulsée ! Par contre, les personnes menacées d'expulsion parce qu’elles « n’usent pas paisiblement des locaux loués » ne bénéficieront pas des mêmes délais pour trouver un autre logement.

Afin de développer l'offre de logement, différentes dispositions d'ordre fiscal incitatives ou coercitives sont prévues mais elles ne sont pas abordées ici, pas plus que l'élargissement du droit de réquisition.

L’importance du volet logement de la loi d’orientation contre les exclusions permet d’en attendre une nette amélioration de la situation de logement des personnes démunies. Il faudra s’assurer qu’un véritable changement se produit pour les personnes qui sont aujourd’hui tellement rejetées par l’environnement que toutes leurs tentatives pour obtenir un logement sont entravées et échouent.1

Accès au logement

  • 1. Élargissement du champ d’intervention du Fonds de Solidarité Logement (FSL), et amélioration et harmonisation de son fonctionnement (articles 36 et 39)

Le FSL pouvait jusqu’à présent :

* apporter des cautions, prêts, garanties et subventions aux personnes défavorisées qui entrent dans un logement ou qui ont des difficultés à payer leur loyer,

* financer pour ces personnes un accompagnement social lié au logement.

La loi élargit son champ d’intervention :

* le bénéfice des aides et de l'accompagnement social peut être accordé également aux sous-locataires ;

* l’accompagnement social financé par le FSL peut prendre la forme d’actions individuelles ou collectives ;

* les personnes en recherche de logement peuvent bénéficier de cet accompagnement.

Elle améliore et harmonise les conditions d’accès au FSL :

* La manière dont on peut saisir le FSL, ainsi que les critères d’attribution des aides financières du fonds sont définis clairement dans le PDALPD (Plan Départemental d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées) Ces critères ne peuvent reposer que sur le niveau de ressources des personnes et l’importance et la nature de leurs difficultés. Enfin, toute demande d’aide doit être examinée et les refus doivent être motivés.

* Par ailleurs, pour réduire les inégalités de gestion du FSL entre départements, des règles sont fixées au plan national qui précisent notamment les délais maximum d’instruction des demandes d’aide et les conditions de recevabilité des dossiers (ces différents aspects seront définis par un décret en Conseil d’État)

Tout ceci devrait contribuer à une gestion du FSL plus juste, plus transparente et mieux adaptée aux besoins des personnes démunies.

  • 2. Versement immédiat des allocations logement pour les personnes qui entrent dans un logement et qui étaient auparavant en hébergement temporaire. (articles 44 et 45)

Les personnes qui étaient auparavant hébergées par un organisme conventionné par l’État pour accueillir les personnes défavorisées2 ont droit, lorsqu’elles entrent dans un logement, au versement des aides au logement (aide personnalisée au logement ou allocation de logement familiale ou sociale) à compter du premier jour du mois où elles entrent dans le logement au lieu du premier jour du mois suivant, actuellement.

Il faut se souvenir que, jusqu’en janvier 1995, tout le monde avait droit à ce versement à compter du premier jour du mois d’entrée dans le logement. Cet article ne fait donc que se rapprocher de la législation antérieure, sans y revenir complètement puisqu’il est limité à certaines catégories de personnes.

Il faut par ailleurs rappeler que lorsqu’une demande d’allocation de logement ou d’aide personnalisée au logement est faite en retard par rapport à la date d’entrée dans le logement, un rattrapage du versement de l’allocation est possible qui peut aller jusqu’à trois mois maximum.

  • 3. La location d’un logement ne peut être subordonnée à la location d’une place de parking (articles 47 et 48)

Dans tous les immeubles construits avec des aides de l’État depuis 19773, il est interdit d’imposer à quelqu’un qui voudrait louer un logement de louer également une place de parking. Les locataires qui sont actuellement dans cette situation peuvent décider de renoncer à leur place de parking et leur loyer doit alors être diminué de la somme correspondante.

Par ailleurs, les loyers des places de parking, remises... que les locataires louent éventuellement avec leur logement ne peuvent augmenter, en pourcentage, plus que le loyer du logement lui-même.

  • 4. Mise en place d’un nouveau dispositif d’attribution des logements sociaux (article 56)

a) amélioration de la transparence des attributions et de l’information du demandeur (Art. L.441-2, L.441-2-1, L.441-2-2 du code de la construction et de l’habitation)

Lorsqu’une personne fait une demande de logement, que ce soit auprès d’un bailleur social, du service logement de la mairie ou de la préfecture, etc. elle doit recevoir sous un délai de 1 mois maximum un numéro d’enregistrement départemental de sa demande. Lorsque ce numéro est communiqué au demandeur par un service ou organisme autre qu’un bailleur, il doit être accompagné du nom du ou des organismes bailleurs auxquels a été transmise la demande. Si, au bout d’un mois, ces informations n’ont pas été communiquées au demandeur (ce qui signifie qu’aucun organisme bailleur ne l’a inscrit sur ses listes), le Préfet procède à une inscription d’office auprès de tout bailleur « susceptible d’accueillir la demande. »

Le but de ce système est d’améliorer la transparence des attributions : les demandes étant centralisées à la Préfecture, il est possible à ce niveau de s’assurer qu’à composition familiale et secteurs géographiques demandés identiques, les demandes sont bien traitées dans l’ordre de leur arrivée ; ce système offre également aux services préfectoraux une visibilité sur l’ensemble des demandes qui sont en attente depuis longtemps et leur permet d’assurer l’examen prioritaire de celles qui n’ont pu être satisfaites dans les délais prévus par l’accord collectif départemental4.

Dans le même souci de transparence, un représentant du préfet peut demander à assister à toute réunion d’une commission d’attribution d’un organisme bailleur, et aucune demande de logement ne peut être examinée par une commission si elle n’est pas pourvue d’un numéro d’ordre départemental.

La durée de validité des demandes de logement est limitée (un décret à venir doit le préciser), mais aucune radiation de celles-ci ne peut intervenir si les demandeurs n’en ont pas été avisés au moins un mois avant.

Enfin, tout rejet d’une demande d’attribution (après passage en commission d’attribution) doit être notifié par écrit au demandeur, dans un document exposant le ou les motifs du rejet.

Il faut rappeler que le passage en commission d’attribution se fait après que le logement a été proposé au demandeur et que celui-ci l’a accepté (généralement suite à une visite du logement) Le refus d’attribution intervient donc dans une phase où la personne en recherche de logement reprend espoir, et entraîne alors souvent une grande déception. Il paraît d’autant plus légitime qu’on donne à celle-ci les moyens de comprendre les raisons de ce refus.

b) Mise en place d’un dispositif de médiation pour remédier aux attentes de logement anormalement longues (Art. L. 441-2-3)

Les demandeurs de logement peuvent saisir la commission de médiation mise en place auprès du Préfet, lorsqu’ils n’ont reçu aucune offre de logement dans le délai d’attente « manifestement anormal au regard des circonstances locales » mentionné au a) ci-avant.

Cette commission est composée au plus de 4 représentants des bailleurs, de 2 représentants des associations de locataires et de deux représentants des associations visant à l’insertion ou au logement des personnes défavorisées (il doit dans tous les cas y avoir autant de représentants des bailleurs que de représentants des associations) Elle émet un avis qu’elle adresse au demandeur de logement, aux organismes bailleurs, aux collectivités locales concernés et, si elle l’estime nécessaire, au Préfet. Lorsque le demandeur est une personne reconnue comme demandeur prioritaire par la loi Besson5, elle saisit également le comité responsable du Plan Départemental d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées6.

Cette commission ne peut certes rien imposer, mais elle constitue pour les demandeurs de logement un interlocuteur qui peut relayer leur demande avec plus de poids qu’eux-mêmes. Il est important de la saisir dans toutes les situations où l’attribution rapide d’un logement est indispensable - y compris, quitte à essuyer un refus, dans les situations où elle n’est pas censée intervenir, telles que celles où une famille qui vient juste d’être expulsée se retrouve à la rue - afin de la mettre en position d’exercer sa responsabilité. Ceci permettra en outre de mettre en évidence, le cas échéant, les insuffisances du dispositif et de demander à ce qu’il évolue.

  • 5. Gratuité de la demande de logement et de la signature du bail (article 58)

Lors de la demande de logement ou de la signature du bail, les bailleurs sociaux ne peuvent réclamer le paiement de frais à quelque titre que ce soit.

  • 6. Modification de la durée du préavis en cas de relogement dans le même parc social (article 59)

Une personne ou famille qui quitte son logement peut ne donner son préavis au bailleur qu'un mois à l'avance, si elle est relogée dans le parc social du même bailleur.

Prévention des expulsions

  • 7. Dispositions pour mieux prévenir la résiliation du bail en cas de dette de loyer (articles 114 et 115)

En cas de non-paiement du loyer ou des charges, le bailleur ne peut demander la résiliation du bail que 2 mois après avoir envoyé un commandement de payer (qui doit désormais obligatoirement mentionner l’adresse du Fonds de Solidarité Logement (FSL) Pendant ces deux mois, le locataire peut s’adresser au tribunal d’instance pour demander au juge d’instance un délai supplémentaire pour régler sa dette. À l’issue des deux mois ou du délai supplémentaire éventuellement accordé par le juge, si le locataire n’a pas réussi à payer sa dette ou à trouver un arrangement avec le bailleur, ce dernier peut entreprendre une démarche en justice pour faire résilier le bail (c’est « l’assignation du locataire aux fins de constat de la résiliation »)

La loi prévoit maintenant que l'huissier chargé d'informer officiellement le locataire de cette assignation en justice doit avertir également le Préfet par lettre recommandée avec accusé de réception. L'objectif est de permettre au Préfet de saisir au plus tôt les organismes qui gèrent les aides au logement (Section Départementale des Aides Publique au Logement pour l'APL, CAF pour les allocations de logement), le FSL et les services sociaux pour rechercher une solution qui évite l'expulsion. Pour que l'action de ces différents partenaires ait le temps de porter ses fruits, l'audience devant le juge ne peut intervenir moins de 2 mois après que le Préfet a été informé par l'huissier de l'assignation en justice. En outre, le juge qui est saisi par le bailleur de la demande de résiliation du bail peut désormais, même de sa propre initiative, décider d'accorder des délais supplémentaires, allongeant ainsi le délai de 2 mois minimum mentionné ci-dessus.

Au total, il s'écoule donc 4 mois au minimum entre le commandement de payer et l'audience (2 mois où le locataire peut payer sa dette pour éviter d'être assigné en justice, et deux mois ensuite pour que le Préfet, une fois informé de l'assignation, puisse tenter de résorber la dette par des aides extérieures.)

Cas particulier des locataires qui bénéficient de l’aide personnalisée au logement :

Dès qu’il constate la dette, le bailleur doit saisir la Section départementale des Aides Publiques au Logement (SDAPL) en vue d'assurer le maintien du versement de l’APL7. À partir de ce moment, il ne peut demander la résiliation du bail tant que la SDAPL n’a pas rendu sa décision. Cependant, si au bout de 3 mois, la SDAPL n’a toujours par pris de décision, le bailleur peut entreprendre de faire résilier le bail.

Cas particulier des locataires bénéficiant d’une allocation de logement :

Le principe est exactement le même que pour les bénéficiaires de l’APL, mais c’est cette fois la Caisse d’Allocations Familiales, organisme payeur des allocations de logement, qui doivent être saisie.

  • 8. Versement direct des allocations de logement au bailleur, notamment en cas de dette de loyer (article 116)

Les allocations de logement seront désormais versées directement par la Caisse d’Allocations Familiales au bailleur :

* sur demande de celui-ci, lorsque le locataire a une dette de loyer,

* ou lorsque le bailleur est un organisme HLM - ou dans les DOM, une société d’économie mixte qui a bénéficié des aides de l’État - de plus de 10 logements,

* ou lorsque le locataire et le bailleur se sont mis d’accord pour qu’il en soit ainsi.

Les modalités de versement de l’allocation de logement se rapprochent ainsi de celles de l’APL qui est toujours payée directement au bailleur.

Si aucune solution n’a été trouvée pour résorber la dette de loyer dans les délais mentionnés plus haut, le juge peut prononcer la résiliation du bail. Il est alors possible de lui demander d’accorder un délai avant d’ordonner l’expulsion (c’est-à-dire avant d’autoriser la délivrance du « commandement d’avoir à libérer les locaux »), pour permettre la recherche d’un relogement. Ce délai peut aller de 3 mois minimum à 3 ans maximum et le juge peut l’accorder même si aucune demande ne lui est faite.

La loi d’orientation contre les exclusions précise que, lorsque le juge ordonne l’expulsion ou lorsqu’il est saisi d’une demande de délai (à laquelle il donne suite ou non), il peut, même de sa propre initiative, décider d’informer le Préfet : l’objectif est de permettre à ce dernier de prendre en compte la demande de relogement du locataire dans le cadre du Plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD)

Il faut par ailleurs rappeler qu’une fois que l’expulsion est ordonnée, il est encore possible de faire appel, sous 15 jours si le juge saisi par le bailleur est le juge des référés (dans ce cas, l’expulsion a été prononcée par ordonnance), ou sous un mois si c’est le juge d’instance (l’expulsion a alors été prononcée suite à un jugement) Si l’appel échoue et que le « commandement d’avoir à libérer les locaux » est envoyé au locataire, ce dernier dispose encore de deux mois avant de quitter son logement.

En outre, à tout moment de la procédure - même une fois que le « commandement d’avoir à libérer les locaux » a été envoyé - la législation prévoit déjà que le locataire peut s’adresser au juge d’instance ou au juge des référés pour demander des délais qui peuvent lui être accordés « chaque fois que le relogement (...) ne pourra avoir lieu dans des conditions normales »8. L’article 118 permet de plus au locataire de faire sa demande sans passer par un huissier ou un avocat, ce qui lui évite des coûts supplémentaires.

Les occupants de logements sans titre qui ne sont pas entrés dans leur habitation par « voie de fait » et qui font l’objet d’une procédure d’expulsion9, bénéficient des mêmes droits et des mêmes recours - présentés ci-dessus - que les locataires dont le bail est résilié pour dette de loyer. La seule différence est qu’ils ont affaire, non au tribunal d’instance, mais au tribunal de grande instance (leur situation étant considérée comme portant plus fondamentalement atteinte à la légalité)

Cette disposition prévoyait que le Préfet ne pouvait accorder le concours de la force publique pour exécuter l’expulsion, tant qu’une proposition d’hébergement10 n’avait pas été faite à la personne ou famille expulsée. Ainsi, le représentant du pouvoir exécutif (le Préfet) empêchait l’exécution d’une décision prise par le pouvoir judiciaire (le juge qui avait prononcé l’expulsion) C’est pourquoi, en vertu du principe de séparation des pouvoirs, cette disposition a été annulée par le Conseil constitutionnel.

Il n’en demeure pas moins qu’il est inacceptable qu’on laisse des personnes ou familles à la rue à l’issue de leur expulsion. Aussi, cette disposition devra être reprise sous une forme qui soit jugée conforme à la constitution, par exemple en replaçant entre les mains du juge la possibilité de suspendre l’expulsion tant qu’aucune offre d’hébergement n’a été faite. La prochaine loi sur l’habitat annoncée par le Secrétaire d’État au Logement Louis Besson pourrait en être l’occasion.

Dans l’intervalle, il faudra être très attentif aux personnes et familles qui passent au travers des « mailles » du nouveau dispositif de prévention des expulsions. L’objectif affiché de celui-ci est en effet de rendre impossible l’expulsion sans relogement des locataires de « bonne foi », c’est-à-dire ceux qui n’ont pas les moyens de payer leur loyer : si cet objectif n’est pas atteint, il est important de pouvoir le dire et l’expliquer.

  • 11. Protection des locataires endettés contre les comportements abusifs de certains huissiers (article 120)

Jusqu’à présent, si un locataire qui recevait de son propriétaire un commandement de payer laissait passer 8 jours sans y répondre, l’huissier mandaté par le propriétaire pouvait pénétrer dans le logement et faire procéder à l’ouverture des portes et des meubles. Cela permettait à certains huissiers d’intimider les locataires connaissant mal leurs droits : certaines personnes en sont même arrivées à prendre peur et à quitter leur logement, alors qu’elles disposaient encore de recours pour essayer de s’y maintenir.

Désormais, les huissiers n’ont plus le droit d’agir ainsi lorsque le commandement de payer correspond à une dette de loyer ou de charges11. Le fait que le locataire soit présent ou absent de son logement ne change rien à cette interdiction.

Par contre, une fois que le « commandement d’avoir à libérer les locaux » a été envoyé au locataire, l’huissier peut pénétrer dans le logement pour « constater que la personne expulsée et les occupants de son chef ont volontairement libéré les locaux. » Il ne peut cependant le faire qu’en présence du maire de la commune, d’un conseiller municipal, d’un fonctionnaire délégué par le maire, d’une autorité de police ou de gendarmerie ou, à défaut, de deux témoins majeurs qui ne sont ni au service du propriétaire ni au service de l’huissier. Cette obligation pour l’huissier d’être accompagné devrait limiter les pratiques abusives qui consistent à pénétrer dans le logement en prétendant vouloir constater que les locataires sont partis, alors que ceux-ci y demeurent encore.

Amélioration des conditions de vie et d’habitat

  • 12. Mesures d’urgence contre le saturnisme (article 123)

Lorsqu’un médecin dépiste un cas de saturnisme chez un mineur, il en informe ses parents et, d’une manière confidentielle et qui protège l’anonymat, le médecin des services de l’État (attaché à la DDASS) et le médecin responsable du service départemental de la Protection Maternelle et Infantile. Le Préfet, qui est prévenu de la situation par le médecin des services de l’État, fait alors procéder immédiatement à un diagnostic de l’immeuble ou de la partie d’immeuble que fréquente le mineur. Il agit de même si d’autres raisons que l’état de santé d’un mineur amènent à soupçonner des risques d’intoxication au plomb pour les habitants d’un immeuble.

Si le diagnostic est positif, le médecin des services de l’État invite les familles de l’immeuble à faire examiner leurs enfants mineurs par un médecin, et le Préfet notifie au propriétaire12 de l’immeuble son intention de faire exécuter les travaux pour faire disparaître le risque d’intoxication au plomb. Le propriétaire a alors 10 jours pour :

* soit contester les travaux qui sont envisagés : c’est alors le président du tribunal de grande instance ou son délégué qui tranche en référé (c’est-à-dire seul et rapidement) ;

* soit faire savoir qu’il va entreprendre les travaux dans un délai d’un mois à compter de la notification : un mois après cette dernière, le Préfet fait alors vérifier que le risque d’intoxication par le plomb à disparu.

Si le propriétaire n’a fait ni l’un ni l’autre au bout de 10 jours ou si la vérification des travaux qu’il a fait réaliser montre que le risque d’intoxication demeure, le Préfet fait faire les travaux nécessaires en les facturant au propriétaire.

En outre, si la réalisation des travaux engagés par le propriétaire ou le Préfet nécessite la libération temporaire des locaux, le Préfet doit prendre les dispositions nécessaires pour assurer l’hébergement provisoire des occupants.

  • 13. Lutte contre les « marchands de sommeil » qui profitent de la vulnérabilité des personnes démunies (article 124)

Il s’agit de renforcer la lutte contre les « marchands de sommeil. » Sont visés en particulier certains propriétaires d’hôtels meublés qui louent au prix fort des chambres insalubres à des personnes démunies pour qui c'est le seul moyen de ne pas être à la rue.

Si un propriétaire soumet une personne « à des conditions de travail13 ou d’hébergement incompatibles avec le respect de la dignité humaine », la législation prévoit déjà que des poursuites en justice peuvent être engagées contre lui. La loi contre les exclusions ajoute que, pendant ces poursuites, l’exploitation de l’établissement d’hébergement peut être retirée au propriétaire s’il s’avère qu’il y a risque d’atteinte à la dignité humaine ou à la santé publique. Dans ce cas, un administrateur provisoire - qui peut être un organisme intervenant dans le domaine de l’insertion par le logement - est nommé pour assurer l’exploitation de l’établissement pendant toute la durée de la procédure.

En outre, les poursuites peuvent désormais aboutir, non seulement à des amendes et peines de prison, mais aussi à la confiscation par l’État du fonds de commerce (par exemple un hôtel)14. L’État dispose alors d’un an pour mettre en vente le bien confisqué.

Cette disposition importante peut permettre de mieux protéger les personnes très démunies contre les abus dont elles sont victimes, mais beaucoup d’entre elles risquent de ne pas oser porter plainte, si elles ne se sentent pas protégées contre le risque d’un « retour de bâton » ou d’une rupture de leur fragile équilibre de survie.

En outre, elle ne doit pas faire oublier que si les « marchands de sommeil » existent, c’est parce qu’ils ont une clientèle qui ne trouve pas à se loger autre part. La meilleure manière de lutter contre eux est de faire en sorte que les personnes hébergées trouvent à se loger pour moins cher et dans de meilleures conditions. A cet égard, l’efficacité du dispositif d’attribution de logements sociaux et le développement de l’accompagnement dans la recherche d’un logement seront déterminants.

  • 14. Renforcement des droits des sous-locataires (article 125)

La législation prévoit que les organismes HLM et les autres bailleurs qui louent des logements conventionnés pour l’Aide Personnalisée au Logement (APL), peuvent louer leurs logements à certaines catégories d’organismes afin que ceux-ci les sous-louent. Ces organismes sont :

* les centres communaux d’action sociale (CCAS) ;

* les associations et organismes ayant pour objet de sous-louer des logements à titre temporaire à des personnes en difficulté et d’exercer les actions nécessaires à leur réinsertion ;

* les associations ayant pour objet de loger à titre temporaire des jeunes :

* les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (qui sous-louent principalement aux étudiants).

Jusqu’à présent, les sous-locataires bénéficiaient de l’APL, de l’Allocation de Logement à caractère Social (ALS) ou de l’Allocation de Logement à caractère Familial comme des locataires ordinaires15. Par contre, leurs relations avec les bailleurs qui leur sous-louaient le logement étaient beaucoup moins bien définies juridiquement que pour les locataires, ce qui pouvait les laisser sans défense dans certaines situations (notamment lorsque le bailleur décidait de les expulser)

Désormais, leurs rapports avec le bailleur sont régis par les mêmes règles que s’ils étaient directement locataires du logement, ce qui signifie notamment qu’il doit exister un contrat écrit de location qui précise le montant du loyer, la durée de location etc. La seule différence (qui existait déjà auparavant dans la législation) est que les sous-locataires peuvent être expulsés à partir du moment où ils ont refusé une offre de relogement définitif « correspondant à leurs besoins et à leurs possibilités. » Cette disposition légale est dangereuse pour les familles très démunies, quand on sait la difficulté d’apprécier réellement leurs « besoins » et leurs « possibilités » et de connaître le motif exact  - souvent fondé - de leur refus d’une offre de relogement. Elles risquent de se trouver sanctionnées pour n’avoir pas accepté un relogement qui n’était en fait pas adapté à leur situation.

Par ailleurs, dans le cas où la sous-location se passe en logement HLM, toutes les règles relatives au montant du loyer et des charges qui existent pour les locataires, sont applicables aux sous-locataires.16

  • 15. Protection des occupants de certains meublés (article 126)

Sont visés particulièrement par cet article les hôtels meublés du secteur privé qui louent des chambres aux personnes démunies. Ne sont, par contre, pas concernés les logements-foyers17 ou les logements meublés conventionnés par l’État. Il est désormais prévu que tout locataire de ces meublés a droit à l’établissement d’un contrat écrit pour une durée d’un an, dès lors que le logement qu’il loue constitue sa résidence principale. Au bout d’un an, le bail est automatiquement reconduit, sauf si :

* le bailleur souhaite modifier les conditions du contrat : il doit alors prévenir le locataire trois mois avant l’expiration du contrat. Si ce dernier accepte les nouvelles conditions, le contrat est renouvelé automatiquement pour un an ;

* le bailleur veut résilier le contrat : il doit là encore prévenir le locataire trois mois avant l’expiration du contrat, en motivant son refus de renouvellement du bail (ce qui permet au locataire le cas échéant de contester cette décision, probablement auprès du tribunal d’instance).

Par ailleurs, si le bailleur prévoit de cesser son activité sous moins d’un an au moment où le contrat est signé, ce dernier peut être établi pour une durée inférieure à un an. Mais si après cela le bailleur poursuit finalement son activité, la durée du contrat est automatiquement portée à un an.

Enfin, si le bailleur décide de cesser son activité alors que des contrats de location sont en cours, il doit en informer les titulaires au moins trois mois avant : la cessation d’activité ne peut alors avoir lieu - sauf cas de force majeure - que lorsque tous ces contrats sont arrivés à expiration18 ou lorsque tous les locataires sont relogés19.

1 Les dispositions de la loi d’orientation contre les exclusions dans le domaine du logement sont présentées dans les paragraphes suivants pour celles
2 Les organismes d’hébergement conventionnés dont il est question sont ceux qui touchent de l’État l’Allocation de Logement Temporaire (ALT) Il s’agit
3 1977 est une année charnière pour le logement social car elle correspond à la mise en place de l’Aide Personnalisée au Logement (APL) : les
4 Cet accord entre l'État et les bailleurs définit "des délais d'attente manifestement anormaux au regard des circonstances locales" et prévoit l'
5 C’est-à-dire sans aucun logement, menacée d’expulsion sans relogement ou logée dans un taudis, une habitation insalubre, précaire ou de fortune, ou
6 Ce comité est institué par l’article 33 .
7 En principe, dès que le locataire ne paye plus son loyer, il n’a plus droit à l’APL, la philosophie de cette allocation étant que l’État aide le
8 Ces termes qui figurent à l’article L. 613-1 du Code de la construction et de l’habitation expriment bien l’esprit de la législation qui est que l’
9 Il ne s’agit pas des personnes qui sont entrées dans un logement contre la volonté du propriétaire mais, par exemple, de celles dont la présence à
10 Le Sénat avait même précisé que cette proposition d’hébergement devait respecter l’unité familiale, mais cette avancée avait été atténuée par l’
11 Ils peuvent par contre continuer à le faire lorsque la dette est d'une autre nature, le sens de leur démarche étant d'évaluer les biens qui
12 Il peut s’agir d’un propriétaire individuel ou d’un syndicat de copropriétaires.
13 La mention des conditions de travail est importante car certaines personnes hébergées sont prises à leur service par des propriétaires qui en
14 Même si la responsabilité du gérant ou du propriétaire ne peut être prouvée - et que donc celui-ci ne peut pas être poursuivi en justice - l’
15 En fait, très peu de sous-locataires bénéficient de l'ALS puisque seulement 2 % des logements HLM ne sont pas conventionnés pour l'APL et que l'ALS
16 À propos de la sous-location, il faut également rappeler que les sous-locataires bénéficient désormais du FSL
17 La notion de « logement-foyer » recouvre notamment les foyers de jeunes travailleurs, de travailleurs migrants, de personnes âgées ou handicapées
18 Cette exigence ne s’impose sans doute pas si le nouveau propriétaire ou le nouveau gérant poursuit l’activité de l’ancien bailleur, car il est
19 Si la cessation d’activité est due à une opération d’urbanisme ou d’aménagement, le relogement se fait aux frais de la personne morale ou physique
1 Les dispositions de la loi d’orientation contre les exclusions dans le domaine du logement sont présentées dans les paragraphes suivants pour celles qui sont de l'ordre des droits à exercer.
2 Les organismes d’hébergement conventionnés dont il est question sont ceux qui touchent de l’État l’Allocation de Logement Temporaire (ALT) Il s’agit notamment des Centres d’Hébergement et de Réinsertion sociale (CHRS)
3 1977 est une année charnière pour le logement social car elle correspond à la mise en place de l’Aide Personnalisée au Logement (APL) : les immeubles visés ici sont tous ceux - construits depuis 1977 - dont les locataires bénéficient de l’APL, que les propriétaires soient des organismes HLM, des sociétés d’économie mixte ou des bailleurs privés.
4 Cet accord entre l'État et les bailleurs définit "des délais d'attente manifestement anormaux au regard des circonstances locales" et prévoit l'examen prioritaire des demandes qui dépassent ce délai. .
5 C’est-à-dire sans aucun logement, menacée d’expulsion sans relogement ou logée dans un taudis, une habitation insalubre, précaire ou de fortune, ou confrontée à un cumul de difficultés.
6 Ce comité est institué par l’article 33 .
7 En principe, dès que le locataire ne paye plus son loyer, il n’a plus droit à l’APL, la philosophie de cette allocation étant que l’État aide le locataire à condition que celui-ci assume sa part du loyer ; le résultat paradoxal est qu’alors que ses ressources sont devenues insuffisantes pour payer cette part du loyer qui lui revient, le locataire se retrouve à devoir en payer la totalité : c’est ainsi qu’on voit des dettes de loyer au départ minimes s’accroître considérablement et conduire à l’expulsion car elles sont devenues impossibles à rembourser pour les locataires concernés. Pour remédier à cette difficulté, la SDAPL peut déroger au principe général et décider du maintien de l’APL.
8 Ces termes qui figurent à l’article L. 613-1 du Code de la construction et de l’habitation expriment bien l’esprit de la législation qui est que l’expulsion des locataires « de bonne foi » doit s’accompagner d’un relogement dans des conditions normales. Mais la loi ne garantit pas encore ce relogement puisque accorder des délais n’est qu’une faculté du juge qui peut décider ou non de l’utiliser (voir aussi sur cette question le paragraphe 10 suivant à propos de l’article 119)
9 Il ne s’agit pas des personnes qui sont entrées dans un logement contre la volonté du propriétaire mais, par exemple, de celles dont la présence à titre gratuit était acceptée par l’ancien propriétaire et qui sont maintenant expulsées parce que leur logement a changé de propriétaire.
10 Le Sénat avait même précisé que cette proposition d’hébergement devait respecter l’unité familiale, mais cette avancée avait été atténuée par l’Assemblée nationale en 2ème lecture.
11 Ils peuvent par contre continuer à le faire lorsque la dette est d'une autre nature, le sens de leur démarche étant d'évaluer les biens qui pourraient être saisis pour rembourser la dette.
12 Il peut s’agir d’un propriétaire individuel ou d’un syndicat de copropriétaires.
13 La mention des conditions de travail est importante car certaines personnes hébergées sont prises à leur service par des propriétaires qui en abusent, sachant que ces personnes n’ont d’autres choix pour préserver leur hébergement que de se plier à leurs exigences.
14 Même si la responsabilité du gérant ou du propriétaire ne peut être prouvée - et que donc celui-ci ne peut pas être poursuivi en justice - l’établissement d’hébergement peut quand même être confisqué si son exploitation se fait dans des conditions qui portent atteinte à la dignité humaine ou à la santé publique.
15 En fait, très peu de sous-locataires bénéficient de l'ALS puisque seulement 2 % des logements HLM ne sont pas conventionnés pour l'APL et que l'ALS n'intervient que lorsque le droit à l'APL fait défaut.
16 À propos de la sous-location, il faut également rappeler que les sous-locataires bénéficient désormais du FSL
17 La notion de « logement-foyer » recouvre notamment les foyers de jeunes travailleurs, de travailleurs migrants, de personnes âgées ou handicapées, ainsi que les « résidences sociales » qui visent à accueillir pour une durée limitée dans le temps les personnes ou familles qui ont des difficultés pour accéder à un logement décent et indépendant ou pour s’y maintenir. Contrairement aux CHRS, les résidences sociales ont, comme les autres logements-foyers, vocation à loger les personnes et à proposer des services - blanchisserie, services de soins, services socio-éducatifs, etc. - mais elles n’ont pas vocation à développer à proprement parler des actions de « réinsertion. »
18 Cette exigence ne s’impose sans doute pas si le nouveau propriétaire ou le nouveau gérant poursuit l’activité de l’ancien bailleur, car il est prévu que dans ce cas les contrats sont automatiquement reconduits.
19 Si la cessation d’activité est due à une opération d’urbanisme ou d’aménagement, le relogement se fait aux frais de la personne morale ou physique qui réalise cette opération.

Rédaction de la Revue Quart Monde

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