Introduction

Geneviève de Gaulle Anthonioz

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Geneviève de Gaulle Anthonioz, « Introduction », Revue Quart Monde [En ligne], Dossiers & Documents (1998), mis en ligne le 20 septembre 2010, consulté le 19 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/4764

Le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme doit nous engager pour les années à venir à vouloir détruire la misère parce qu’elle est une violation de ces Droits. Tant que les droits fondamentaux ne sont pas effectifs pour certains, la démocratie est menacée et il est insuffisant de vouloir la défendre ; le seul combat à mener consiste à se rassembler pour la faire progresser.

Cette conviction a habité tous ceux, en particulier les associations de solidarité et les associations qui militent pour les Droits de l’Homme, qui se sont mobilisés depuis des années pour que notre société se construise enfin avec le concours de tous.

Sous l’impulsion du père Joseph Wresinski et des familles en grande pauvreté qu’il rejoignait, le Mouvement ATD Quart Monde a pensé très tôt qu’une loi ambitieuse était un outil nécessaire à la démocratie, pour sans cesse rebâtir nos politiques à partir de ceux qui en demeurent exclus.

En adoptant le rapport Wresinski en 1987, les représentants de la société civile réunis au sein du Conseil Économique et Social ont eu le courage de proposer au gouvernement une démarche à suivre pour aller vers une grande loi. Depuis lors, le Conseil Économique et Social est resté le promoteur de cette démarche à travers plusieurs avis remis aux gouvernements successifs. En formulant ensemble, à différentes reprises, des propositions concrètes, les associations ont suscité un courant de soutien dans l’opinion. Trois gouvernements de deux majorités différentes se sont attelés au travail.

C’est finalement le 29 juillet 1998 qu’à été promulguée une « loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions » comprenant 159 articles.

Cette loi doit représenter l’engagement de notre pays à se remettre sans cesse en question, tant que les droits fondamentaux de chacun ne sont pas respectés, et à aller jusqu’au bout de la destruction de la misère. Les personnes en grande pauvreté et ceux qui leur sont solidaires ont inspiré :

* le principe fondateur du texte qui est le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains et qui passe par la recherche tenace d’un accès effectif de tous à l’ensemble des droits fondamentaux ;

* la volonté de considérer les plus démunis comme partenaires, c’est-à-dire de privilégier les attentes et les projets des personnes par rapport au fonctionnement des structures et à la réussite des dispositifs.

Mais la transcription de cette expérience de vie en termes législatifs a abouti à un texte d’une grande complexité, même pour les initiés.

Le but du présent document est d’en proposer une première « traduction » avec le regard critique de militants engagés : il convient maintenant d’inventer des moyens pour permettre la compréhension du contenu de cette loi d’orientation par chacun, en particulier par les personnes dont la vie a inspiré la philosophie du texte : elles sont en effet les plus compétentes pour indiquer les avancées que permet la loi et ses limites, et donc pour en proposer des améliorations.

Car il faut que les personnes, en accédant à leurs droits fondamentaux, gagnent aussi en citoyenneté, c’est-à-dire en conscience d’appartenir à une société qui refuse de fonctionner sans elles et qui va donc se transformer avec elles ; il faut qu’elles gagnent en responsabilité et en liberté : là se trouve le ferment de l’avancée de notre démocratie.

Geneviève de Gaulle Anthonioz

Présidente du Mouvement ATD Quart Monde France

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