Perspectives

Philippe Maystadt

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Philippe Maystadt, « Perspectives », Revue Quart Monde [En ligne], Dossiers & Documents (2002), mis en ligne le 02 novembre 2010, consulté le 18 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/4879

1. Mesurer la pauvreté

Quand on essaie de comprendre un problème, on veut généralement le quantifier. C'est vrai aussi d'un concept comme la pauvreté.

Un point de départ logique consiste à comparer le revenu disponible avec un étalon reflétant les besoins essentiels d'une famille. Le postulat sur lequel repose cet indicateur de la pauvreté est que la plupart des biens et services doivent être achetés sur le marché, et qu'il faut un minimum de pouvoir d'achat pour se procurer les produits de première nécessité. Ainsi, selon cet indicateur, l'aggravation des inégalités de revenus n'implique pas nécessairement que le nombre de pauvres va augmenter en valeur absolue, tant que le pouvoir d'achat ne diminue pas dans le bas de l'échelle de la répartition des revenus.

Mais, dans la réalité sociale, chacun sait que, pour éviter l’exclusion, il faut être en mesure de maintenir un niveau de vie supérieur à ce qui est strictement nécessaire pour assurer une consommation minimale. C'est pourquoi il est préférable d’envisager la pauvreté en termes relatifs, et de nombreux sociologues utilisent aujourd'hui la notion de seuil de pauvreté relatif. Par exemple, un revenu inférieur à 50 % de la moyenne paraît être un seuil largement utilisé pour caractériser la pauvreté.

De plus, la pauvreté relative doit être replacée dans un contexte géographique. La cohésion sociale ne respectant pas les frontières administratives, le choix d'une zone pertinente pour y mesurer la pauvreté est difficile et inévitablement discutable. Un seuil de pauvreté relative à l'échelle de l'UE, par exemple, dériverait d'une zone géographique trop vaste. Si l'on prenait pour critère « les gens qui vivent avec moins de 50 % du revenu moyen par habitant de l'UE », on conclurait que bon nombre de Grecs et de Portugais sont pauvres. Il serait pourtant difficile d’affirmer qu’une majorité des Grecs et des Portugais souffrent d’exclusion sociale. Inversement, de trop petites unités ne sont pas idéales non plus. Permettez-moi de citer encore un exemple, à l’autre extrême. La pauvreté relative dans le quartier des Marolles, ici à Bruxelles, n'est probablement pas très aiguë. Or le contraste est grand avec le revenu moyen de la région Bruxelles-Capitale. Généralement, on estime qu’il y a de bonnes raisons d'étudier la pauvreté relative au niveau de l'État. Par exemple, c'est normalement au niveau de l'État que l'on décide des transferts et autres politiques sociales, en partie parce qu'ils reflètent la solidarité et des valeurs fondées sur une histoire, une culture ou une religion commune.

Enfin, il faut souligner qu'un cliché instantané de la pauvreté ayant pour toile de fond la répartition des revenus au cours d'une année donnée ne nous apprend pas grand-chose. Certains individus qui sont aujourd’hui au bas de l'échelle des revenus ne sont peut-être pas coincés là pour toujours. Ils peuvent être mal payés parce qu'ils sont jeunes ou relativement peu qualifiés et, moyennant leur juste part de chance, ils peuvent espérer gagner davantage lorsqu'ils auront plus d'expérience ou de formation. Autrement dit : il peut être plus important de regarder le degré de mobilité des revenus que des chiffres statiques sur la pauvreté.

À la lumière de ces quelques réflexions liminaires, examinons certaines données sur la pauvreté et la mobilité des revenus en Europe.

2.Tendances récentes de la pauvreté et de la mobilité des revenus en Europe

Selon des recherches récentes1, le nombre de personnes vivant avec un revenu inférieur à 50 % de la moyenne d'un pays varie largement d'un pays européen à l'autre. À la fin des années 80, par exemple, les taux de pauvreté étaient les suivants : environ 3,5 % de la population au Luxembourg, en Norvège et en Finlande ; environ 4,5 % en Belgique et aux Pays-Bas ; environ 5,5 % au Danemark, en Allemagne et en Suède ; 8 à 8,5 % en Hongrie et en France ; environ 10 % en Italie, en Espagne et en Pologne, et environ 13 % au Royaume-Uni, de même qu'en Grèce, au Portugal et en Irlande. Mais c'est aux États-Unis qu'on trouvait le taux de pauvreté le plus élevé : pas moins de 17,5 % de la population vivaient avec moins de la moitié du revenu par habitant constaté dans l'ensemble du pays2

On observait donc des taux de pauvreté élevés dans les pays anglophones et d'Europe du Sud, et des taux faibles dans les pays nordiques, ainsi qu'au Benelux. Les pays d'Europe centrale occupaient le milieu et parfois le haut de la fourchette3. Les études montrent aussi que la pauvreté relative prévaut particulièrement dans certains groupes de personnes : celles qui vivent seules, en particulier les femmes âgées, et les familles monoparentales.

Qu'en est-il de l'évolution des taux de pauvreté ? L'écart entre les pays s'est un peu rétréci pendant les années 90, mais c'est malheureusement surtout dû à l'augmentation du nombre de pauvres dans les grands pays européens, notamment l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni, où l'incidence de la pauvreté a presque doublé4. D'après les estimations d'Eurostat5, au milieu des années 90, environ cinquante-cinq millions de personnes vivaient au-dessous du seuil de pauvreté de 50 % du revenu moyen dans les États membres de l’Union européenne. La hausse du chômage en Europe est indiscutablement l'une des causes principales de cette évolution.

La mobilité des revenus, en revanche, reste étonnamment uniforme de part et d'autre de l'Atlantique pour les personnes qui travaillent, en dépit des grandes différences qui existent dans la réglementation du marché du travail et les politiques sociales6,7. On observe cependant une légère tendance à une mobilité plus forte des revenus parmi les jeunes travailleurs dans les pays anglo-saxons.

La proportion de personnes qui restent pauvres pendant des périodes prolongées est heureusement beaucoup plus faible que ne pourraient le faire craindre les taux de pauvreté que j'ai mentionnés, mais leur nombre n'est pas négligeable : entre 2 et 5 % de la population, selon une étude récente de l'OCDE8. De fait, dans la région Bruxelles-Capitale, par exemple, 3,5 % de la population dépendent du "minimex", le revenu minimum d'existence, ou d'un équivalent9.

Mais assez de chiffres. En effet, le reproche que l’on peut faire à la polarisation sur les chiffres est d’abord que, comme toute statistique, elle atrophie la réalité. Nombre de personnes vivant en dessous d’un certain seuil de revenus ne sont même pas identifiées. Il suffit de songer à tous les immigrés clandestins. En outre, les réalités non monétaires, qui revêtent en la matière une importance toute particulière – l’environnement, le statut familial, l’ancrage dans les solidarités proches, la motivation personnelle – ne peuvent être captées par les statistiques. En fait, il n’y a pas d’explication statistique satisfaisante de la spécificité de l’extrême pauvreté qui reste toujours fondamentalement inscrite dans une histoire personnelle.

Ensuite, la seconde raison pour laquelle je me méfie des chiffres en la matière est que, derrière ce raffinement comptable, pourrait se dissimuler une indifférence de fait et que l’on pourrait construire des indicateurs politiques qui peuvent se retourner contre les personnes. Le taux de pauvreté deviendrait plus important que les pauvres eux-mêmes et l’on risquerait de s’attacher davantage à l’amélioration du chiffre qu’aux besoins réels des personnes. Si on se laissait obnubiler par une approche statistique, on finirait par préférer les mesures ayant le plus d’impact sur ce plan, plutôt que celles qui correspondent aux attentes très concrètes de ceux qui recherchent la satisfaction de besoins et de droits fondamentaux.

D’où l’importance de ne pas laisser parler uniquement les statistiques, mais aussi et surtout les pauvres eux-mêmes.

3. L’éducation pour tous

En les écoutant, j’ai souvent été frappé par l’importance qu’ils accordaient à l’école pour leurs enfants. C’est sans doute la raison pour laquelle l’école occupe une place centrale dans les réflexions et la démarche d’ATD Quart Monde, depuis sa fondation. Je ne m’y étendrai pas ici, si ce n’est pour relever le danger d’une théorie que d’aucuns développent dans le contexte de la mondialisation. Pour ceux-ci, il suffit de relever le niveau de formation d’une partie de la population pour compenser l’effet de la diminution des emplois non qualifiés engendrée par la redistribution du travail à l’échelle mondiale. Grâce au relèvement du niveau de formation des autres, un ouvrier non qualifié profitera du désencombrement du marché où il cherche un emploi. Dans cette théorie « mécanique », l’ouvrier qui reste non qualifié est aidé par la requalification de son voisin. Ainsi, pour les adeptes de cette théorie, fixer comme objectif que 80 % de la population arrivent à un niveau donné de formation serait excellent pour tout le monde, y compris les 20 % restants. Je crois au contraire que c’est désastreux pour ceux qui restent sans formation. Mon raisonnement est simple : dans un monde où 80 % de la population sait lire, rester analphabète devient un véritable handicap pour les 20 % qui ne savent pas lire. Et si, au lieu d’alphabétisation, on entend parler l’anglais ou utiliser l’informatique, le raisonnement est le même.

L’argument ne signifie évidemment pas que la marche vers le relèvement du niveau moyen de formation doive être ralentie. Au contraire, il vise à faire comprendre pourquoi l’ambition doit être plus grande et pourquoi l’objectif d’éducation pour tous doit être pris au sens fort du terme.

Il est d’autant plus nécessaire de le souligner qu’au sein même du système éducatif des évolutions sont en cours qui viennent rendre cet objectif encore plus difficile à atteindre. La stratégie éducative choisie par des parents pour leurs enfants devient plus sélective et tend à segmenter davantage le système éducatif. Les « bons » lycées deviennent « meilleurs » et, par voie de conséquence, les « moins bons » lycées deviennent « pires. » Ces choix sont souvent le fait de familles de classes moyennes, notamment de professions intellectuelles, parce que, sans nécessairement posséder des revenus élevés, elles possèdent les savoirs, le savoir-faire, le temps et les réseaux sociaux nécessaires pour décoder et utiliser des systèmes informels de sélection et de classement. Il n’y a pas que les parents qui participent à ces stratégies sélectives. Il arrive que des enseignants y contribuent aussi, parfois inconsciemment. L’école, y compris l’école publique, subit ainsi un effet paradoxal de la scolarisation de masse : elle devient plus segmentée et donc, à son tour, le vecteur de nouvelles inégalités10

Je souhaiterais à présent évoquer, dans un souci de prospective, trois questions délicates qui prendront de plus en plus d’importance dans les prochaines années :

* comment éviter l’effet stigmatisant des nouvelles politiques sociales ?

* comment concilier sécurité et liberté ou comment éviter la dérive vers un contrôle social dur et intrusif ?

* comment associer les populations les plus défavorisées à la définition et à la mise en œuvre des décisions qui les concernent ?

4. Eviter l’effet stigmatisant

Première question : ne faut-il pas éviter de trop cibler les aides à destination des parties les plus pauvres ou les plus vulnérables de la population ? Des politiques trop ciblées peuvent en effet se retourner contre ceux auxquels elles sont destinées. C’est le drame de « ces politiques sociales qui disqualifient ceux auxquels elles apportent leur soutien en leur conférant le statut d’assistés… »11. Comment sortir du dilemme qu’ont trop souvent rencontré les politiques de lutte contre la pauvreté : soulager le pauvre sans l’estampiller comme pauvre et sans lui rendre du coup plus difficile d’échapper à sa condition ?

Nombre d’exemples attestent de cette difficulté. Je viens d’évoquer l’école. Si les zones d’éducation prioritaires (ZEP) en France ou les écoles à discrimination positive en Belgique permettent dans les meilleurs des cas d’endiguer la dégradation des résultats scolaires des enfants issus de quartiers défavorisés, elles n’empêchent pas que l’effet perçu comme stigmatisant du label ZEP ne conduise les parents des milieux plus favorisés à quitter la ZEP par crainte d’une trop forte concentration d’élèves issus des milieux les plus défavorisés.

De même, dans le cas du marché de l’emploi, certaines formules de contrats d’insertion n’échappent pas, parce que trop ciblées, à cet effet stigmatisant aux yeux des futurs employeurs.

Ou encore, pour évoquer une question qui fait actuellement l’objet d’un débat dans plusieurs pays de l’Union européenne – le droit à être titulaire d’un compte bancaire –, il serait à mon avis dangereux de s’orienter vers la création de comptes bancaires spéciaux qui seraient réservés aux plus pauvres et dont les caractéristiques seraient discriminatoires par rapport aux comptes bancaires ordinaires.

Il me paraît essentiel d’éviter que les aides aux plus défavorisés ne les enferment dans des ghettos dont ils resteraient prisonniers à cause de leurs effets stigmatisants vis-à-vis des autres, et de leurs effets psychologiques vis-à-vis d’eux-mêmes. Il faut au contraire élargir le champ des réformes, que ce soit dans le domaine de l’école, du crédit ou du travail. Bien entendu, ce constat donne la mesure de l’immensité de la tâche. La lutte contre la pauvreté ne peut être pensée indépendamment du fonctionnement de l’ensemble de la société ; la question ne peut être « réglée » par des mesures « ponctuelles » qui ne concerneraient que les pauvres12. C’est au contraire la recherche constante de passerelles ouvertes qui doit animer la lutte contre la pauvreté, en sachant que ces passerelles sont ouvertes dans les deux sens, que le donner et recevoir n’est pas à sens unique.

5. Concilier sécurité et liberté

Une deuxième question difficile et qui est clairement posée dans le document préparatoire à ces journées d’étude est celle de savoir comment il est possible de concilier sécurité et liberté.

La tradition charitable de l’Ancien Régime associait l’exercice d’un certain devoir de solidarité à une mise sous tutelle des pauvres. Les politiques sociales étaient alors indissociablement charitables et policières, la prise en charge des individus s’accompagnant nécessairement du contrôle de leur comportement.

En mettant l’accent sur la liberté, la société moderne a fait surgir une autre conception, celle d’une solidarité non dégradante, qui prenne la forme d’un droit et non d’une mise sous tutelle: « quels que soient les aléas de son existence, la personne doit rester un citoyen à part entière. »13

Or, on a parfois l’impression que certaines politiques récentes nous ramènent à l’Ancien Régime dans la mesure où elles en reviennent à un contrôle des comportements. Certaines nouvelles approches, fondées sur le souci légitime d’accroître l’efficacité des politiques sociales, risquent de renvoyer, au moins pour une part, à une figure archaïque, celle de la classification des pauvres en fonction de leur mérite. Dans certaines procédures nouvelles, on a parfois l’impression de se retrouver dans un bureau de bienfaisance, lorsqu’il s’agissait de distinguer les bons et les mauvais pauvres. C’est un problème très important pour l’avenir, qu’il convient d’examiner avec attention.

La tentation du contrôle des comportements, à travers les décisions d’octroyer ou de refuser certaines allocations dès lors que celles-ci ne procèdent plus d’un système d’assurance, est bien réelle. L’évolution est très nette aux États-Unis où de nombreux programmes sociaux se sont donné pour objectif d’exercer une pression sur les personnes pour qu’elles adoptent un comportement déterminé. Par exemple, dans certains États, les allocations familiales sont réduites si les jours d’absence des enfants à l’école dépassent un certain nombre. Les mères adolescentes ont des allocations supplémentaires si elles se marient, le but étant de reconstituer une cellule familiale stable. En revanche, leurs allocations sont bloquées si elles ont un autre enfant. Les personnes droguées qui refusent de suivre un traitement de désintoxication voient leurs allocations suspendues. Au Québec, les femmes pauvres reçoivent une allocation mensuelle supplémentaire si elles nourrissent leur bébé au sein parce que c’est meilleur pour leur santé14.

Jusqu’où peuvent aller de tels programmes dans le contrôle social ? Où est la limite ? On comprend le souci d’efficacité. Pour ma part, j’approuve l’octroi d’un supplément d’allocation aux jeunes chômeurs qui acceptent de suivre une formation qualifiante. Mais on voit bien aussi que la dérive menace et que, sous couvert d’une « activation » des allocations sociales, on risque de renouer avec des politiques assistancielles de l’Ancien Régime. Des associations américaines de défense des droits de l’homme parlent à ce propos de « nouveau paternalisme » ou de « démocratie de surveillance » ; elles ont d’ailleurs intenté des actions en justice contre certains programmes, dans la mesure où ils constituent une atteinte grave à la liberté des personnes.

En Europe aussi, il convient de réagir contre cette tendance qui, en invoquant des impératifs collectifs de coût et d’efficacité, entend régir le comportement des individus dans ce qu’ils ont de plus personnel et parfois de plus intime.

Il me semble que, dans les années à venir, nous devrons être très vigilants sur ce plan : il s’agit de permettre aux populations les plus pauvres d’accéder aux droits fondamentaux mais sans attenter à leur liberté. À cet égard, comme l’a souligné François Vandamme, le combat juridique doit être poursuivi.

6. Des partenaires de démocratie

Enfin, la troisième et dernière question que je voudrais évoquer est peut-être la plus importante : comment faire en sorte que les populations les plus défavorisées deviennent de véritables partenaires de démocratie ? Comment créer les conditions pour faire valoir les exigences de justice que portent, que vivent, que souhaitent exprimer ceux qui s’en sentent privés ?

Pour cela, des voies nouvelles sont à explorer. Car les mécanismes représentatifs traditionnels, qu’il s’agisse de scrutins politiques, d’engagement syndical ou de manifestations de masse, ne donnent guère la parole aux pauvres. Or, dans une véritable démocratie, ces derniers doivent pouvoir peser sur le débat collectif, sur les mécanismes qui conduisent aux décisions qui les concernent.

C’est tout un champ à couvrir, à différents niveaux, au niveau local, dont Mme Jouen a souligné l’importance, mais aussi au niveau régional et national, et même au niveau européen et international, en sachant que cette expression des pauvres devra prendre des formes variées, qu’elle sera forcément hétérogène et qu’« elle aura du mal à se canaliser dans le moule de quelques schémas bien balisés. »15

La représentation des pauvres pose, il est vrai, des questions inédites et il faudra du temps pour parvenir aux formules les plus adéquates. « Il ne s’agit pas seulement d’imaginer des tribunes supplémentaires que l’on offrirait aux silencieux pour qu’ils y donnent de la voix. Il faut aussi les amener à y prendre effectivement la parole. »16 Et, dans ce but, recourir à des méthodes par lesquelles on va à la rencontre de ceux qui se taisent, on fait l’apprentissage de la participation, on assure un véritable accompagnement dans le respect de la liberté et de l’autonomie des personnes. C’est toute la complexité mais aussi la richesse de la démarche initiée par ATD Quart Monde.

Celle-ci peut et doit favoriser un esprit de partenariat et de coopération.

Coopération entre le mouvement syndical et le mouvement associatif d’abord, notamment autour d’actions communes avec les chômeurs de longue durée. J’ai apprécié à cet égard ce qu’a dit M. Fonteneau dans l’appel qu’il a lancé en conclusion de son rapport.

Coopération entre les entreprises et les associations d’insertion, ensuite, pour établir des relations plus suivies et des passerelles permettant de concilier performances économiques et développement humain. Il s’agit de tenter d’effacer la coupure mortelle entre la sphère de l’entreprise efficace et celle de l’insertion ; cela ne va pas, nous le savons, sans poser de nombreux problèmes encore mal résolus. D’où la nécessité d’organiser un dialogue plus direct, avec la participation active des personnes dites « en insertion. » Car nous devons être bien conscients que le risque existe que les différentes procédures d’insertion conduisent en fait à la constitution, entre le secteur public et le secteur de l’entreprise, d’un tiers secteur qui finirait par occuper une population qui deviendrait fixe alors que, pour conserver son utilité et son sens, il doit rester pour l’essentiel un espace de transition, un espace de socialisation et d’apprentissage.

Coopération entre les pouvoirs publics et le mouvement associatif, enfin, qui est nécessaire au vu du rôle que joue le mouvement associatif sur le terrain, rôle que le service public ne peut assumer seul.

C’est de l’orchestration simultanée de tout cela que peut naître un double et puissant mouvement, à la fois d’attention aux plus défavorisés et d’expression de leur part, un mouvement qui, en donnant la parole aux pauvres, réveille la société tout entière.

1 Base de données LIS (Luxembourg Income Study) – une collection de données standardisées tirées d'enquêtes auprès des ménages et couvrant vingt-cinq
2 Kangas, O., « For Better or for Worse : Economic Positions of the Rich and the Poor 1985-1995 », Centre d'études de populations, de pauvreté et de
3 Veli-Matti, R., « Trends of Poverty and Income Inequality in Cross-National Comparisons », Centre d'études de  populations, de pauvreté et de
4 Awad, Y., and Israeli, N., « Poverty and Income Inequality : An International Comparison, 1980s and 1990s », Centre d’études de populations, de
5 Panel des ménages de la Communauté européenne, 1994. Contrairement à celles de la base LIS, ces données ne sont toutefois pas entièrement
6 Fabig, H., « Income Mobility in International Comparison – an Empirical Analysis with Panel Data », Centre d'études de populations, de pauvreté et
7 OCDE, Perspectives de l'emploi, 1996.
8 OCDE, « Poverty Dynamics in Four OECD Countries », Département des affaires économiques, Working Paper No 212, avril 1999.
9 Observatoire de la Santé – Rapport 2000 sur l’état de la pauvreté en région de Bruxelles-Capitale, Journal du Collectif No 26, mai-juin 2001
10 Sur cette évolution, voir. l’analyse d’Agnès van Zanten : « Fabrication et effets de la ségrégation scolaire », in Paugam, S., « L’Exclusion : l’
11 Schnapper, D., «Intégration et exclusion dans les sociétés modernes», in Paugam, S., op. cit.
12 Cohen, D., « Richesse du monde, pauvretés des nations », Flammarion, 1997, p. 131.
13 Rosanvallon, P., « La nouvelle question sociale », Seuil, 1995, p. 182.
14 Ces exemples sont donnés par Pierre Rosanvallon, op. cit., pp. 212-213.
15 de Foucauld, J.-B., et Piveteau, D., « Une société en quête de sens », Odile Jacob, 1995, p. 249.
16 Ibid.
1 Base de données LIS (Luxembourg Income Study) – une collection de données standardisées tirées d'enquêtes auprès des ménages et couvrant vingt-cinq pays – et Panel des ménages de la Communauté européenne (Eurostat).
2 Kangas, O., « For Better or for Worse : Economic Positions of the Rich and the Poor 1985-1995 », Centre d'études de populations, de pauvreté et de politiques socio-économiques, Luxembourg, LIS Working Paper No 248, janvier 2001.
3 Veli-Matti, R., « Trends of Poverty and Income Inequality in Cross-National Comparisons », Centre d'études de  populations, de pauvreté et de politiques socio-économiques, Luxembourg, LIS Working Paper No 272, août 2001.
4 Awad, Y., and Israeli, N., « Poverty and Income Inequality : An International Comparison, 1980s and 1990s », Centre d’études de populations, de pauvreté et de politiques socio-économiques, Luxembourg, LIS Working Paper No 166, juillet 1997.
5 Panel des ménages de la Communauté européenne, 1994. Contrairement à celles de la base LIS, ces données ne sont toutefois pas entièrement comparables sur un plan international.
6 Fabig, H., « Income Mobility in International Comparison – an Empirical Analysis with Panel Data », Centre d'études de populations, de pauvreté et de politiques socio-économiques, Luxembourg,  PACO Working Paper 26, juin 1998.
7 OCDE, Perspectives de l'emploi, 1996.
8 OCDE, « Poverty Dynamics in Four OECD Countries », Département des affaires économiques, Working Paper No 212, avril 1999.
9 Observatoire de la Santé – Rapport 2000 sur l’état de la pauvreté en région de Bruxelles-Capitale, Journal du Collectif No 26, mai-juin 2001, Commission Communautaire Commune, Bruxelles.
10 Sur cette évolution, voir. l’analyse d’Agnès van Zanten : « Fabrication et effets de la ségrégation scolaire », in Paugam, S., « L’Exclusion : l’état des savoirs », La Découverte, 1996, p. 285.
11 Schnapper, D., «Intégration et exclusion dans les sociétés modernes», in Paugam, S., op. cit.
12 Cohen, D., « Richesse du monde, pauvretés des nations », Flammarion, 1997, p. 131.
13 Rosanvallon, P., « La nouvelle question sociale », Seuil, 1995, p. 182.
14 Ces exemples sont donnés par Pierre Rosanvallon, op. cit., pp. 212-213.
15 de Foucauld, J.-B., et Piveteau, D., « Une société en quête de sens », Odile Jacob, 1995, p. 249.
16 Ibid.

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