Ivano De Matteo , La bella gente.

Film italien 2009

Marie-Hélène Dacos-Burgues

Bibliographical reference

La bella gente, réalisé par Ivano De Matteo Italie, 2009, 98', avec Antonio Catania, Myriam Catania, Iaia Forte, Elio Germano, Giorgio Gobbi, Monica Guerritore, Victoria Larchenko.

References

Electronic reference

Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Ivano De Matteo , La bella gente.  », Revue Quart Monde [Online], 219 | 2011/3, Online since 01 April 2012, connection on 20 April 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/7379

Un couple « bien » rejoint sa maison de vacances à la campagne en voiture. À la ville, à Rome, Madame, Susanna, est psychologue et s’occupe de femmes battues ; Monsieur Alfredo est architecte. À la campagne, leurs voisins et amis sont des « bobos » sans consistance, caricaturaux, peu en harmonie avec eux. Les voisins aiment le « tape à l’œil », l’argent facile ; ils ont des propos un brin racistes et des préjugés bien établis. Le couple de Susanne et Alfredo est beaucoup plus sympathique, plus ouvert. Pendant tout le film on se demande pourquoi ces deux couples se fréquentent. On ne voit certainement pas en quoi consiste leur amitié… Obligation de voisinage ? Tolérance accrue du fait de l’isolement ? Simples relations mondaines parce qu’il faut bien ?

Le premier couple, sous l’instigation insistante de Susanna se met dans l’idée de sauver une jeune prostituée qui s’offre au bord de la route nationale et dont le « mac » la frappe et la traite durement. Vu le jeune âge présumé de la demoiselle, Susanna arrive à convaincre son époux d’aller la chercher pour la ramener à la maison. C’est là que Nadja, jeune prostituée ukrainienne, entre en scène. Refusant d’abord, puis ayant été véritablement kidnappée, elle finit par accepter de se couler dans le rôle de la fille sauvée.

Nous sommes dans un scénario analogue à celui du film No et moi, qui traite des bons sentiments d’une famille envers quelqu’un de paumé. Mais avec plus de finesse. Susanna est généreuse, son mari est réaliste. Il a résisté autant qu’il a pu, puis il a accepté l’idée de sa femme et il a été capable de prévoir que la chose serait très délicate. Comme le couple est solide, il pense pouvoir faire face à tout. La métamorphose physique de Nadja qui perd son maquillage et se transforme en jeune fille convenable est spectaculaire.

L’anniversaire de Susanna sera l’occasion d’une série d’événements qui révéleront les difficultés d’un tel projet. Des idéaux sont-ils suffisants pour faire le bonheur d’autrui ? Comment fait-on pour connaître vraiment la personne qu’on veut aider, pour ne pas plaquer sur elle des attentes et un regard tout à fait irréalistes ? Ne piège-t-on pas les gens avec trop de bons sentiments ? Où est la liberté de Nadja ?

Susanna va prendre en pleine figure ces questions qu’elle ne s’était jamais posées. Ni dans le cas présent ni sans doute avant, dans son métier. Là comme dans le film No et moi, le réel de Nadja est inconnu, comme l’était le réel de No. Seulement il n’est pas occulté totalement ni caricaturé. Petit à petit, au fil du temps qui passe, des indices montrent que la gamine « sauvée » rêve peut-être d’autre chose… Que cet autre chose soit présenté comme une idée abstraite issue de la vision que nous avons du délitement des pays de l’Est ne gêne pas car c’est plausible.

L’actrice Victoria Larchenko est magnifique. Les acteurs, Antonio Catania et Monica Guerritore, jouent à merveille leur rôle de couple « bien » et …, chose plus rare, qui fonctionne bien.

Le film a eu le grand prix au festival du film italien à Annecy ainsi que le prix CICAE.

Marie-Hélène Dacos-Burgues

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