Jean Ziegler, Destruction massive. Géopolitique de la faim.

Éd. Du Seuil, 2011, 344 p.

Dominique Germay

Bibliographical reference

Jean Ziegler, Destruction massive. Géopolitique de la faim., Éd. Du Seuil, 2011, 344 p.

References

Electronic reference

Dominique Germay, « Jean Ziegler, Destruction massive. Géopolitique de la faim. », Revue Quart Monde [Online], 221 | 2012/1, Online since 01 September 2012, connection on 20 April 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/7743

C’est un cri de détresse que nous arrache la lecture de ce livre. Non seulement de détresse, mais aussi de révolte et d’indignation, même si ce terme est plutôt galvaudé à l’heure actuelle.

Jean Ziegler ne fait que conforter ce que nous soupçonnions déjà : le monde est suffisamment riche pour nourrir tous ses enfants mais ses richesses sont inégalement distribuées. Ainsi, le nombre de milliardaires en dollars s’élève aujourd’hui à 1210 et leur patrimoine cumulé représente 4500 milliards de dollars, soit plus que le PNB de l’Allemagne. À côté de cela, un enfant de moins de dix ans meurt de faim toutes les cinq secondes.

L’auteur a identifié les responsables de cet état de fait. Parmi eux, le FMI quand il impose aux pays pauvres d’accepter la libre concurrence sur les produits agricoles et détruit de la sorte leurs cultures vivrières, les traders aveugles qui spéculent sur les prix des aliments de base, la corruption endémique des autorités de certains pays en développement qui contribue à l’accaparement des terres par les multinationales agroalimentaires. Enfin, l’expansion des biocarburants pour lesquels on détruit des hectares de cultures vivrières.

L’ouvrage de Ziegler combine réflexions économiques, politiques et philosophiques, étayées de chiffres, mais aussi de cas vécus par l’auteur et donc livrés à la première personne, ce qui rend la situation plus proche et ne peut que faire naître notre empathie.

Ziegler réussit à nous impliquer dans son combat contre ce que d’aucuns considèrent comme une fatalité, et nous pose cette question à la fin du livre : « Et nous, que pouvons-nous faire ? »

Les moyens d’agir sont là : au sein de nos démocraties occidentales, nous pouvons utiliser notre vote pour soutenir ceux qui décident de faire bouger les choses en imposant le droit à l’alimentation pour tous, en empêchant la spéculation boursière sur les produits de base, en prohibant la production de biocarburants à base de plantes nourricières, en protégeant l’agriculture vivrière et ses paysans.

Les solutions ne manquent pas, mais c’est plutôt la volonté des États qui fait défaut, même si l’auteur réussit à ouvrir une brèche dans les murs des tout-puissants.

CC BY-NC-ND