Édouard Bergeon. Au nom de la terre

Un film de fiction, France, 2019

Marie-Hélène Dacos-Burgues

p. 42-43

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Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Édouard Bergeon. Au nom de la terre », Revue Quart Monde, 252 | 2019/4, 42-43.

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Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Édouard Bergeon. Au nom de la terre », Revue Quart Monde [En ligne], 252 | 2019/4, mis en ligne le 01 décembre 2019, consulté le 28 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/8348

Il s’agit d’une fiction dont le caractère autobiographique est quasiment évident, puis clairement annoncé à la fin du film. Il met en image la descente aux enfers vécue par le père d’Édouard Bergeon, paysan qui se suicida à 54 ans, faute de pouvoir remplir ses engagements financiers.

On ne sait pas pourquoi Pierre Jargeon – rôle joué par Guillaume Canet –, le fils d’un paysan dont le rôle est joué par Rufus, est allé aux USA ; sans doute pour y suivre une formation. Lorsqu’il revient il va prendre la succession de son père, avec des idées neuves. Le film1 commence par une scène dans laquelle on voit le notaire traiter, à la table familiale, des questions d’héritage et de transmission des propriétés. C’est le grand-père qui transmet son bien à son fils, Pierre Jargeon, avec des clauses particulièrement sévères, telles celles qu’on pourrait avoir entre étrangers. En effet, le grand-père exige une rente conséquente. On comprend déjà que la vie paysanne est dure et qu’il ne s’agit pas de s’apitoyer sur son sort. La consigne principale de l’Ancien reste traditionnelle : il faut beaucoup travailler et la terre doit rester dans la famille. C’est un peu ce qui justifie sa façon de regarder son fils agir, et sa constance à le critiquer. « Tu travailles beaucoup, oui, mais mal ». Si ce film peut être analysé comme un film sur les différences de conception de la vie et du travail entre les différentes générations, il est tout autant une critique de la société capitaliste dans sa version « milieu rural » qui est peu connue. C’est actuel. Le jeune fils de Pierre Jargeon assiste au désastre, impuissant.

L’élevage d’agneaux qui, au début, était la ressource principale sera rapidement remplacé par un élevage intensif de poulets avec construction d’un grand bâtiment, mécanisation à outrance, et surtout avec un endettement conséquent. C’est à la fois pour être moderne et comme les autres paysans que Pierre Jarjeon cède à la pression. Il a une femme Claire – rôle joué par Veerle Beatens –, comptable, qui assure une certaine stabilité. Elle-même est critique face à cette évolution de l’entreprise. Mais Pierre Jargeon n’écoute personne. « Je ne serais pas le dernier à me moderniser ». Les problèmes s’amoncellent. Notamment la belle technique qui lâche le week-end et que personne ne peut remettre en route. L’aide du père serait bienvenue. Mais on ne lui demande pas car il pourrait la refuser. Un drame paysan, hyperréaliste, silencieux, comme il y en a tant de nos jours et qui devrait donner à réfléchir.

1 Au nom de la terre, fiction, Édouard Bergeon, France, 2019, avec Guillaume Canet, Veerle Baetens, Anthony Bajon, Rufus.

1 Au nom de la terre, fiction, Édouard Bergeon, France, 2019, avec Guillaume Canet, Veerle Baetens, Anthony Bajon, Rufus.

Marie-Hélène Dacos-Burgues

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