Paris, Gare de Lyon, 14 mai 1996, 21h45. A l'arrivée du train de Lausanne, je lève une pancarte portant l'inscription : « Séminaire : Atteindre les plus pauvres ». Les voyageurs, curieux, y jettent un œil. Sourires narquois. Regards ironiques. La personne venant à ce séminaire UNICEF/ATD Quart Monde repère ce signal qui, bien au-delà de la commodité matérielle, fait que nous nous sommes vraiment reconnues. A quelques pas de là, un homme joue de la trompette, l'étui ouvert à ses pieds invitant à l'obole. Adossé à la caisse automatique du parking, un jeune Africain converse tranquillement avec d'autres jeunes Blancs. Il dit vivre à la gare depuis un an, sans papiers, et espérer en obtenir grâce à une nouvelle assistante sociale. Un peu plus tard, sur un trottoir de la capitale, un homme chargé de cartons fouille une poubelle.

Et je pense à ces voyageurs... Pourquoi donc le trompettiste, le jeune Noir, le travailleur de l'ombre ne manquent-ils ni à leurs occupations, ni à leur pensée, ni à leurs rêves ?

Qu'oser pour que l'homme dans la misère manque à chacun ? Alors, l'invitation à atteindre les plus pauvres serait une fête, un peu comme lorsque par téléphone, fax, ou Internet, on est parvenu à atteindre l'être aimé, au loin.