Invitée par Simone Veil à l’émission de Patrick Sabatier « Tous à la Une », Geneviève de Gaulle-Anthonioz, avait demandé aux téléspectateurs de lui écrire leur refus de la misère1. La présidente d’ATD Quart Monde France a reçu 380 lettres à ce jour, et ce nombre continue d’augmenter ! Selon les gens de télévision, pareil courrier sur un tel sujet est un succès sans précédent, d’autant plus que le dit sujet n’occupa qu’un moment de l’émission.
Les signataires ont un point commun : ils sont tous aussi démunis les uns que les autres ! Qu’ils racontent comment ils cherchent sans cesse en vain à obtenir un minimum de sécurité pour leur famille, ou qu’ils demandent comment aider des familles en grande pauvreté, ils sont tous réduits à la solitude face à l’immensité de la misère, solitude qu’ils refusent aussi fort que la misère elle-même. Et c’est pourquoi ils ont écrit.
Vaincre la grande pauvreté, c’est vaincre l’exclusion (Cf surtitre de la revue). Mais comment pourrait-on rassembler sans offrir à chacun la possibilité d’exprimer son désir de rejoindre les autres, de s’unir pour défendre les droits de tout homme et de toute famille ?
Il ne faut pas s’y tromper : pareille expression ne relève pas du domaine des bons sentiments et des vœux pieux, elle est affaire de démocratie.
Celle-ci est bloquée. Non, à cause de la misère. Mais à cause d’un aveuglement quasi national sur les citoyens en grande pauvreté : on ne veut pas voir qu’ils sont les premiers à refuser la misère qui assaille leur famille et leur entourage. Les premiers, pas les seuls.
Parvenir à imposer publiquement ce refus de la misère, n’est-ce pas le B.A.BA d’une société d’où nul citoyen ne serait exclu ?