Mohammed AÏSSAOUI, Les funambules

Éd. Gallimard, 2020

Hélène Cassignol

p. 62

Référence(s) :

Mohammed AÏSSAOUI, Les funambules. Éd. Gallimard, 2020, 224 p.

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Hélène Cassignol, « Mohammed AÏSSAOUI, Les funambules », Revue Quart Monde, 257 | 2021/1, 62.

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Hélène Cassignol, « Mohammed AÏSSAOUI, Les funambules », Revue Quart Monde [En ligne], 257 | 2021/1, mis en ligne le 01 mars 2021, consulté le 19 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/10180

Le héros de ce roman, Kateb, a quitté son pays natal à neuf ans, avec sa mère désormais « analphabète bilingue ». D’une enfance pauvre dont les souvenirs reviennent par bribes, il a su sortir grâce à la littérature. Biographe pour anonymes, il écrit l’histoire des autres.

« Chez nous, il valait mieux avoir un père mort qu’un père absent. » Fêlure de l’enfance du narrateur. Le mot revient tout au long du roman comme un refrain, une quête. Le biographe cherche à l’identifier dans chacune des vies, précieuses, qu’il raconte : « Je ne peux m’empêcher de trouver toute existence extraordinaire. Pour peu qu’on veuille bien prendre la peine de se pencher dessus, chaque vie est exceptionnelle et mérite d’être contée, avec sa part de lumière, ses zones d’ombre et ses fêlures – il y en a toujours, je sais comment les détecter. D’ailleurs c’est mon obsession, ça, quand je rencontre quelqu’un je me demande quelle est sa fêlure : c’est ce qui le révèle. Et dans ce domaine, il n’existe pas d’injustice, pas d’inégalité : chacun porte sa fêlure, les misérables, les milliardaires, les petites gens et les puissants, les employés et les patrons, les parents et les enfants. »

La fêlure, encore elle, l’amène à rencontrer un grand médecin qui a pour nouveau projet de recueillir les récits de personnes vulnérables car il pense que « les mots peuvent, peut-être pas guérir ni réparer, mais contribuer à ce que les personnes vulnérables se sentent véritablement exister. C’est sans doute puéril, mais les mots – écrits – donnent un sens à nos vies, un ancrage. » Voilà donc notre narrateur partie prenante de cette aventure qui le mènera, entre autres, au Centre international Joseph Wresinski, à la recherche de la mémoire des plus pauvres, puis à participer à Caen à une Université populaire Quart Monde où il saura écouter de son oreille si sensible les témoignages pleins « de pudeur qui force l’admiration » mais aussi « les silences de résignation ». Puis sa quête le conduira à observer, à interroger d’autres personnes engagées, auprès des Restos du Cœur entre autres, pour un monde plus fraternel et plus digne. Il ira ainsi, de rencontre en rencontre, jusqu’au dénouement.

CC BY-NC-ND