Il y a quelques mois, j’ai eu la chance de mener une délégation de membres du mouvement ATD Quart Monde en République démocratique du Congo, rencontrer le Docteur Denis Mukwege. Ce spécialiste de la chirurgie réparatrice des viols a reçu le prix Nobel de la Paix en 2018. Il y a eu plus de 100 000 viols au cours de la guerre qui a ravagé le pays entre 1996 et 2003. Malgré les menaces de mort, il a accueilli de très nombreuses victimes dans l’hôpital de Danzi qu’il dirige. Face à la détresse de ces femmes, il n’y avait pas seulement une question médicale. Ces femmes se retrouvaient seules et, pour la plupart d’entre elles, ne pouvaient pas retourner dans leur communauté. Denis Mukwege nous a dit : « La guerre a détruit le tissu social. Personne ne fait plus confiance à personne. Cela empêche le développement de toute coopération et de tout projet. »
Il fallait reconstruire la vie. Et c’est pour cela que Denis Mukwege a créé un programme avec hébergement et formation pendant une année dans l’enceinte même de l’hôpital, qui est entouré d’un grand domaine. Un objectif est de permettre à ces femmes de se former et d’être accompagnées dans la création d’une activité génératrice de revenus, un autre est de reconstruire une communauté.
Mener conjointement ces deux objectifs, cela rejoint l’expérience de la délégation ATD Quart Monde même si, dans leur groupe, il n’y a pas seulement des femmes. Dans les quartiers, il faut construire la confiance, la sécurité, la paix et, pour cela, leur choix éthique, leur questionnement permanent est de prendre d’abord en considération ceux qui vivent les situations les plus difficiles. Denis Mukwege a encouragé le groupe des délégué.e.s. de Bukavu, qui sont allé.e.s à Uvira rejoindre les familles qui vivaient la détresse des inondations, et ils ont ensuite inventé ensemble un programme d’action pour les enfants.
Il est très intéressé par le fait que leurs projets ont associé des familles de plusieurs quartiers et plusieurs villes. Cela lui donne de l’espoir pour l’avenir : « C’est l’étape vers laquelle il faut aller aujourd’hui, créer des liens entre tous ces groupes qui luttent contre la misère avec une approche de solidarité. »
À partir des femmes qui ont vécu l’inhumain pendant la guerre, à partir de familles qui vivent des situations extrêmes de pauvreté, à partir d’elles et avec elles, des femmes et des hommes s’engagent et, ensemble, ils prennent des initiatives qui sont en train de reconstruire la communauté humaine dans le Sud Kivu.