Le père Joseph est toujours au travail. Il l’est avec ses livres, il l’est par son œuvre, il l’est dans ses disciples. En eux, il annonce l’Évangile, il le vit, « tout bonnement ». Tant que durera le combat d’ATD Quart Monde pour détruire la misère, il l’animera. C’est lui qui nous a enseigné à mener à la parole tout ce qui se vit dans la nuit des exclusions pour en sauver le message d’effroi et de sagesse. Écrire pour faire mémoire des existences et amener à l’être ce qui est au bord du néant. Susciter et recueillir la parole dans la confiance d’une amitié lentement méritée pour ressusciter et transmettre la vie fragile qui parle du doute et de la foi, de l’angoisse et de la prière, de l’ignorance et de la culture.
Ces pages de Monique Tonglet-Vélu rapportent neuf conversations qu’elle eut comme visiteuse de malades ou de personnes âgées, souvent isolées, parfois pendant de longues années. Entre ces « chapitres », quelques lignes, de brèves observations notées au passage comme autant d’éclats ou d’étincelles, disent l’admiration remplie d’amour de l’auteure pour celles et ceux qui lui ont donné un nouvel accès à l’Évangile, au prix de grandes peines parfois. Dignité humaine, grâce divine, respect, enfouissement, silence. Ce sont des perles acquises au grand prix de la vie, de la mort, de la solitude, du courage.
Lire ce livre, c’est s’éduquer soi-même à capter les petites choses de la rencontre : regards, mains, objets, images… C’est apprendre à goûter toutes les paraboles de nos existences et des Écritures chrétiennes, et de toutes les religions que chacun reçoit et se donne. C’est travailler son cœur, car ce livre, recueil de paroles et de gestes sentis aux limites de l’indicible, engage son lecteur, pourvu qu’il soit lent et attentif, non pas à lire seulement, mais à vivre. Un livre qui conduit aux limites de l’action comme seuls les témoins savent en écrire quand ils font retour sur l’émerveillement de la source et son cheminement. « Il faudrait écrire sur tous, ou plutôt sur chacun, précautionneusement, lentement » (Christian Bobin).