La réintégration des chômeurs. Qu’attendons-nous ?

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« La réintégration des chômeurs. Qu’attendons-nous ? », Revue Quart Monde [Online], 157 | 1996/1, Online since 05 September 1996, connection on 14 December 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/1388

Tout plutôt que le chômage !

Les sommes que nous consacrons à l’indemnisation et à la gestion du chômage1 dépassent désormais la rémunération moyenne qui serait celle des chômeurs s’ils étaient réintégrés dans l’emploi.

C’est pourquoi, comme le disait le candidat Jacques Chirac lors de la dernière campagne présidentielle, « tout vaut mieux que le chômage ». Mais les pesanteurs bureaucratiques semblent plus puissantes que cette simple remarque de bon sens. Pourtant, en plus de l’exigence qu’elle représente pour la justice et l’honneur de tous les citoyens, la réintégration des chômeurs est possible dans des conditions supportables pour toutes les parties ; Etat, entreprises, salariés.

Bien sûr, on aurait pu espérer qu’un grand débat national sur l’emploi définisse un « nouveau contrat social » par un partage équitable du travail et des ressources rares. Mais la réduction du temps de travail n’est pas envisagée à brève échéance et aucune pression sociale suffisante n’est malheureusement en vue.

C’est pourquoi, au lieu de chercher à « travailler moins pour travailler tous », (comme le proposent avec raison et depuis longtemps notamment André Gorz et Guy Aznar) cherchons d’abord à « travailler tous ». Dépensons les mêmes sommes après réintégration de tous les chômeurs dans de vrais emplois – rémunérés au moins au SMIC dans des entreprises et les associations. Il sera temps alors par la négociation, de consacrer l’excédent de temps disponible soit à l’entretien et au développement des compétences des salariés, soit à la réduction du temps de travail, soit à la création de nouvelles activités, internes ou externes, soit à l’aménagement des conditions de travail.

Pour un accord immédiat

Un « accord historique »2entre l’Etat et les partenaires sociaux pourrait aboutir, par exemple, au processus suivant :

- Première phase : réintégration de tous les chômeurs de longue durée (y compris les jeunes n’ayant pas encore accédé à l’emploi) dans des emplois rémunérés, en entreprise ou en association d’utilité sociale reconnue de gré à gré avec financement par l’ensemble Etat Unedic au niveau du SMIC pendant un an3

Naturellement, les entreprises seraient libres de compléter ce salaire4. Elle renonceraient parallèlement à tout licenciement, sans reclassement (aux conditions de la troisième phase, ci-dessous)

- Deuxième phase réintégration de tous les autres chômeurs sur les mêmes bases.

- Troisième phase : suppression progressive (sur deux ou trois ans) des cotisations de chômage en contrepartie du maintien dans l’entreprise, des chômeurs réintégrés et remplacement de l’assurance chômage par une garantie de reclassement de tout salarié licencié (indemnité suffisante pour permettre le reclassement dans une autre entreprise correspondant par exemple au SMIC pendant un an) versée à l’entreprise d’accueil .Apparition des instruments du marché du reclassement : disparition de ceux de la gestion du chômage.

- Quatrième phase : rattachement définitif de chaque ancien chômeur au statut des autres salariés.

- Cinquième phase : reprise des négations régulières entre partenaires sociaux (emplois, salaires, horaires, formation, activités …) mais alors sans élimination des chômeurs.

Conséquences attendues

- Détente dans le cercle vicieux autodégradant du chômage.

- Suppression des inquiétudes des entreprises quant au coût du partage du travail et à l’imposition de nouvelles contraintes.

- Apaisement des craintes des salariés quant au partage non maîtrisé de leur rémunération.

- Arbitrages supprimant la rivalité objective ente salariés et chômeurs.

- Insertions devenant enfin efficace du fait d’un avenir devenu possible dans l’emploi réel durable et grâce au temps désormais disponible pour la formation de tous.

- Facilitation des choix et des financements en matière de création de nouvelles activités utiles.

- Liberté de manœuvre maintenue quant aux orientations économiques futures.

1 Environ 120 000 francs par an e »t par chômeur
2 Selon l’expression de Jacques Nikonoff dont l’approche est voisine.
3 Le coût de 5 millions d’emplois (financés sur la base du SMIC net) serait d’environ 300 milliards de francs. En contrepartie actuellement 160
4 Cette opération pourrait démarrer très rapidement dans une région pilote.
1 Environ 120 000 francs par an e »t par chômeur
2 Selon l’expression de Jacques Nikonoff dont l’approche est voisine.
3 Le coût de 5 millions d’emplois (financés sur la base du SMIC net) serait d’environ 300 milliards de francs. En contrepartie actuellement 160 milliards sont consacrés à l’indemnisation des chômeurs, 90 milliards à la formation professionnelle et 90 milliards aux « mesures » de soutien à l’emploi. Les salariés correspondants seraient exonérés de charges sociales comme le sont actuellement  les indemnités de chômage.
4 Cette opération pourrait démarrer très rapidement dans une région pilote.

CC BY-NC-ND