Du 15 au 21 février, le Centre international d’ATD Quart Monde a accueilli un groupe de 23 personnes appartenant à 15 associations agissant contre la pauvreté et l’exclusion sur l’île de Taïwan.
Seize heures d’avion, le voyage est long pour venir jusqu’en France. Et surtout, le voyage est long entre la civilisation chinoise de Taïwan et la civilisation européenne dans laquelle est née le Mouvement ATD Quart Monde. Le voyage est long au sein de toute société pour permettre aux populations en situation de pauvreté de gagner du pouvoir d’agir et pour constituer les plus pauvres en partenaires de la construction de la société.
« Vous attachez beaucoup d’importance à la démocratie », nous a dit un membre du groupe après la visite du projet pilote Travailler et Apprendre Ensemble1. Ce n’était pas d’élections dont il était question mais des règles de fonctionnement de l’entreprise élaborée avec la participation active des personnes exclues et très éloignées de l’emploi, impliquées dans le projet. Les membres de ce collectif taïwanais ont été marqués par le fait que des personnes « bénéficiaires » d’un projet ont acquis une capacité d’expression de leurs idées sur celui-ci, y compris des idées contraires à celles « des dirigeants. »
« Les services sociaux à Taïwan ne permettent pas la même expression libre. Une réunion avec des bénéficiaires de projet serait silencieuse. » J’aimerais redire à nos amis de Taïwan que nous n’atteignons pas ce résultat partout dans les actions du Mouvement ATD Quart Monde. La construction de relations de confiance, de relations de liberté est un long et difficile chemin. Un chemin riche d’humanité. « Nous sommes pressés de trouver des solutions, nous ne prenons pas le temps de noter ce que les personnes disent et font. À l’Université populaire Quart Monde, vous prenez le temps de faire et vous prenez le temps des pauses. La patience permet des changements auxquels on ne s’attend pas », nous a dit un autre membre de ce collectif taïwanais.
Prendre le temps de faire des pauses. Aller au rythme des personnes dont les pensées sont prises par le chaos de la misère.
Accepter qu’un chemin d’engagement soit un parcours de vie et que des personnes en situation de pauvreté prennent une année et parfois plus avant de réussir à prendre la parole devant d’autres. Accepter de prendre le temps pour apprendre de l’action.
J’aimerais redire à nos amis de Taïwan que personne n’a trouvé la solution. L’engagement de donner du temps et de prendre du temps est une composante essentielle ainsi qu’un défi pour toutes et tous.