L’adoption, en septembre 2015, lors de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, par 180 chefs d’État et de gouvernements, des 17 Objectifs de développement durable (ODD), a mis en évidence le premier de ces objectifs : « éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde » et le dixième : « réduire les inégalités dans tous les pays et d’un pays à l’autre ». Avec l’accord de Paris sur le climat, cet accord sur les ODD a suscité une dynamique internationale très positive. Mais la crise provoquée par la pandémie du Covid-19 ainsi que l’actualité internationale récente – guerre en Ukraine, élection de Donald Trump aux USA, montée de courants d’extrême droite dans de nombreux pays – ont par la suite révélé les limites de ces accords, en agissant comme un puissant multiplicateur d’inégalités, dans les pays et entre les pays. Les plus pauvres des pays les plus pauvres ont durement subi le choc.
Dans un tel contexte, quelles sont les opportunités laissées à la lutte contre les inégalités et la pauvreté ? Quel doit être le rôle des États, de l’Europe1, des ONG dont l’approche est fondée sur les droits humains ? Après les efforts déployés pendant la pandémie du Covid pour protéger les citoyens « quoi qu’il en coûte », et aujourd’hui pour se réarmer en Europe « quoi qu’il en coûte », sommes-nous prêts à un même effort, « quoi qu’il en coûte », pour en finir avec la grande pauvreté ?
Dans les économies libérales, résoudre le problème de la pauvreté tout en s’attaquant aux inégalités fonctionne comme les deux côtés d’un même enjeu, dont la responsabilité première est celle des pouvoirs publics2. La solidarité internationale Nord-Sud, guidée par les intérêts des puissants, a elle aussi traversé une histoire chaotique en dépit des grands accords signés, mais le Sud global peut aujourd’hui lutter contre la pauvreté et doit le faire, même si le Nord lui tourne le dos, estime Roberto Bissio3.
La parole est donnée dans ce dossier aux délégués d’ATD Quart Monde à la conférence Lutter contre les dimensions cachées de la pauvreté dans les savoirs et les politiques, à la Banque mondiale à Washington, le 15 février 2024, qui a rassemblé des chercheurs et chercheuses de ce projet de recherche, et des expert·e·s et professionnel·le·s des institutions organisatrices4. Ces délégués mettent une nouvelle fois en lumière ceci : plutôt que de présenter les plus pauvres comme coupables de leur misère et refusant de s’intégrer à la société5 en leur imposant la facture de nos errements collectifs, rechercher leur expertise pour identifier des solutions est aussi une façon de contribuer à réduire les inégalités de pouvoir6.
Les chantiers en cours sont nombreux, et leur issue repose sur nos engagements indéfectibles…
Persistance de la pauvreté et augmentation des inégalités sont les deux côtés d’une même violation des droits humains sociaux et économiques. Réflexion sur l’expérience du Québec.