Le retour de la malaria, une maladie de pauvres

Bruno Tardieu

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Bruno Tardieu, « Le retour de la malaria, une maladie de pauvres », Revue Quart Monde [En ligne], 148 | 1993/3, mis en ligne le 05 mars 1994, consulté le 28 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/3301

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Santé

Face au retour de cette maladie, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rassemblé des experts de 107 pays, en octobre 1992 à Amsterdam. Ils estimaient qu’en 1993, trois cent millions de personnes seraient atteintes par la malaria et qu’un à deux millions de personnes en mourraient. Estimations qu’ils jugeaient basses, compte tenu qu’il s’agit essentiellement d’une maladie de pauvres dont beaucoup sont trop pauvres pour être en lien avec des services de santé.

En mai dernier, la revue Time a titré sur ce mal et relaté cette conférence de l’OMS. La malaria n’atteint plus seulement les campagnes mais aussi les zones urbaines et les bidonvilles dépourvus de systèmes d’évacuation des eaux usées. L’épidémie risque de devenir incontrôlable et pandémique dans les pays pauvres d'Asie, d’Amérique latine et d’Afrique. Face à l’échec ou aux effets pervers des programmes centralisés d’éradication de la maladie, les experts ont décidé une nouvelle stratégie de lutte, en s’appuyant sur l’expérience de la Chine qui a réussi à avoir un taux de malaria très bas. Ce pays a créé des réseaux de premiers soins et d’apprentissage de la prévention, réseaux très étendus et proches de la population.

Autrement dit : sans la participation de la population elle-même, les solutions restent sans lendemain. Pour les experts, il faut que les pays et les populations très pauvres puissent reconstruire une infrastructure de soins médicaux et aussi leurs infrastructures générales. En quelque sorte, il faut lutter contre la pauvreté elle-même. A lire cet article ici résumé, un fait m’a frappé : l’ambition occidentale et moderne de résoudre un problème seulement par des solutions techniques et centralisées apparaît dépassée. L’efficacité est ailleurs. Il ne s’agit plus de concentrer la compréhension d’une question entre quelques mains puissantes. Une technique ou une découverte n’est une avancée que si elle est comprise de tous, maîtrisée par tous. Et pour cela nous dépendons les uns des autres.

Bruno Tardieu

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