Parler de l’action de Joseph Wresinski dans certains milieux avec quelques chances de se faire bien comprendre reste délicat, difficile. Il y a ceux pour qui l’égalité ne peut se résoudre que par adhésion à une idéologie égalitariste. Il y a ceux qui pour définir leur classe sociale, lui reconnaissent des valeurs qui se démarquent volontiers des plus pauvres. Ce sont ceux qui prennent appui sur des différences de comportement pour justifier la mise à l'écart et stigmatiser une inadaptation évidente de certains à notre société. Il y a aussi ceux qui luttent depuis longtemps pour l’égalité de tous les citoyens entre eux et ne supportent pas la priorité à un groupe particulier qu’on isolerait de la classe ouvrière artificiellement.
Les obstacles à la compréhension mutuelle entre ces milieux (à priori non catholiques) et le Mouvement ATD Quart Monde ne peuvent pas être éludés. Ils doivent être pris au sérieux parce que les pauvres ont besoin de l’ensemble de la société. Joseph Wresinski lui-même a déploré à certains moments que la société se soit déchargée des pauvres sur l’Eglise. Mais en même temps, il écrivait un livre au titre provocant : Les pauvres sont l’Eglise. Que peuvent en penser ceux qui ne sont pas d’Eglise ?
C’est dans le même ordre d’idée qu’il faut être attentif à la notion de Quart Monde, qui par sa référence au Tiers état peut être facilement comprise comme une revendication du droit à la parole, même si elle est souvent utilisée comme une stigmatisation supplémentaire regrettable.
Enfin la notion de « peuple » charrie des images tout autres : peuple élu, peuple basque, peuple corse, peuple différent en somme ! Là est le danger. Il se peut que cela renforce la détermination et l'argumentaire de certains et justifie un enfermement, un refus encore plus grand.
J’ai voulu dire ce que j’ai compris du combat de Joseph Wresinski. Sans méconnaître sa foi, j’ai pris le parti de consulter de nombreux textes de lui et d’associer ces textes à d’autres textes d’auteurs contemporains qui marquaient au moins sur un point une convergence intéressante avec ses propos.
Je l’ai fait sous la forme d’une biographie en partant de la devise républicaine « Egalité, liberté, fraternité ». J’ai travaillé à partir d'une cinquantaine de questions qui m’avaient été posées lorsque je représentais le Mouvement ATD Quart Monde à Liège où j’avais créé une pré école et un club féminin dans le quartier le plus pauvre de la ville de Liège.