Les expulsions locatives jettent chaque année en France des milliers de familles pauvres à la rue, dans une indifférence quasi générale. Pourtant, ces procédures sont au cœur de l’accroissement de la pauvreté et des inégalités sociales. Et leur nombre a augmenté au cours des vingt dernières années.
L’auteur, sociologue, s’est immergé dans les différentes instances qui traitent des expulsions locatives : services de recouvrement qui tentent de faire rembourser les dettes, tribunaux qui ordonnent l’expulsion, services de préfecture et de police chargés d’utiliser la force pour exécuter l’expulsion.
Pourquoi ces familles cessent-elles de payer leur loyer alors que les conséquences d’une expulsion sont très lourdes ? Comment garder son emploi quand on a perdu son logement et que l’on doit trouver un abri d’urgence, souvent éloigné de l’ancien domicile ? Comment faire valoir ses droits sociaux si le courrier n’arrive plus ? Que devient la scolarité des enfants ?
Ces familles sont présumées incapables de gérer un budget mais, en réalité, cette forme de crédit est moins lourde car elle n’entraîne pas de frais et évite un contact direct avec le créancier. À la différence du loyer, les ressources de ces familles sont souvent non mensualisées et celles-ci sont prises entre deux temporalités : « l’attente devant les guichets de l’État social et le traitement expéditif de l’État régalien. »
En analysant de nombreux dossiers, l’auteur a pu également montrer le rôle des différents juges et l’importance de l’accompagnement social du locataire pendant la procédure.
L’augmentation du nombre d’expulsions est due au « décrochage croissant entre le niveau des loyers et celui des revenus de la population la plus pauvre. Réduire le nombre d’expulsions passe nécessairement par une action politique sur le cycle du capital immobilier, c’est-à-dire sur l’offre et les mécanismes de formation des prix des logements locatifs. De ce point de vue, la meilleure arme contre les expulsions reste un véritable encadrement des loyers. »