Ce projet de la Ferme Berthe Rousseau a été initié par Michel Corbeil et Martin Couture.
Geneviève précise : « Quand on parle de développement, de croissance et de l’appât du gain, la Ferme est à contre-courant : on va vers le petit, on vit en autosuffisance. Ce n’est pas un modèle rentable. La Ferme, c’est fragile, mais on a le soutien des voisins et on est liés à un réseau d’amis, cela donne une grande force. On ne dépend pas de subventions du gouvernement mais de dons. »
Un participant, Frédéric, témoigne : « J’ai vécu deux ans à la Ferme. La vie communautaire dans la nature, proche des animaux, m’a permis de ressusciter à la vie. Il y avait une telle symbiose entre les personnes que les visiteurs pouvaient difficilement dire si c’est une intervenante, ou si c’est un résident ou une résidente. Chacun assumait des responsabilités, chacun était à l’aise, on n’était pas dans le faire, dans le ‘montrer’ et alors ça donnait une présence à l’autre très spéciale, une grande attention à l’autre ; chacun prenait des responsabilités. »
Éric ajoute : « J’ai passé beaucoup de difficultés dans ma vie, j’ai été considéré inapte au travail. En travaillant dans un restaurant, j’étais découragé par le gaspillage. À la Ferme, j’ai appris à composter et, depuis, je fais attention à ce que je mange. Il faut faire attention à l’eau, car on en manque souvent. L’eau, c’est la vie ! La Ferme m’apporte une structure et me permet d’apporter la joie aux autres. »
Ce projet, « Ça prend des gens qui vous aiment et croient en vous », dit encore Yvette.
Un exemple : à la Ferme, on chante avant de commencer à manger.
Mathieu explique pourquoi : « C’est pas naturel pour les gens de chanter avant le repas ni de s’attendre... Des fois, on a faim, puis on veut manger rapidement, mais dans une vie communautaire, on essaye de faire les choses en même temps, d’être au même diapason, d’avoir une harmonie. Puis, chanter avant le repas, ça envoie un signal qu’on est tous ensemble, de même cœur, puis on va manger le même repas, on va s’attendre… »
La Ferme Berthe-Rousseau existe depuis vingt-neuf ans, et avec des personnes de milieux si différents… Comment est-ce possible ?
Éric : « Avec notre CA, on réfléchit régulièrement à ce qu’on attend du futur de la maison, pour nous et pour les générations à venir. »
Geneviève : « La vie communautaire est très exigeante, mais il y a un roulement ; pour que ça dure, il faut des gens nouveaux, avec une nouvelle énergie, qui croient en l’humain. »
Mathieu : « On est plus dans ‘l’être’, avec une solidarité les uns aux autres, et c’est la force qui va traverser le temps. Être proche de la nature permet d’avoir cette reconnaissance qu’on est tous interdépendants. Cette interdépendance est fondamentale pour vivre en santé et perdurer. »
Geneviève : « Le défi, c’est de pouvoir mettre l’accent sur les forces des personnes. Elles se présentent à nous avec un besoin de support puis, rapidement, elles supportent la Ferme ! »
Marie-Anne : « Le ‘vivre ensemble’ fait peur à beaucoup de gens. Pour moi, c’est plus dur de vivre seule chez moi, à regarder mon frigo. »
Mathieu : « Ce qui fait la richesse, ce n’est pas l’argent, ce sont les liens sociaux. Parfois, ce qui nous rend forts, ce sont nos fragilités. »
Frédéric : « Le développement durable, c’est aussi le développement des personnes et du cœur, c’est le développement de la vie au sens large. »