S’associer entre nous, c’est notre assurance

Membres d’ATD Quart Monde international

p. 4-11

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Membres d’ATD Quart Monde international, « S’associer entre nous, c’est notre assurance », Revue Quart Monde, 256 | 2020/4, 4-11.

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Membres d’ATD Quart Monde international, « S’associer entre nous, c’est notre assurance », Revue Quart Monde [Online], 256 | 2020/4, Online since 01 June 2021, connection on 09 December 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/10069

Ces textes sont extraits des échos envoyés par des équipes locales du Mouvement ATD Quart monde international pendant et après le confinement lié à la pandémie du Covid-19. Ils ont été publiés sur le site https://www.atd-quartmonde.org/

Nous devons apprendre à rechercher et à avoir accès aux bonnes informations. Cela permettra de faire les bons choix, surtout dans les moments difficiles comme aujourd’hui.

S’associer entre nous, c’est notre assurance. Se réconforter mutuellement dans les moments difficiles et lors des funérailles, rendre visite à un voisin, un ami ou un parent malade, faire preuve de compassion envers les personnes dans le besoin est notre responsabilité. Toute action de ségrégation ou de stigmatisation est inacceptable.

Comme le disait une mère de famille :

« En ce moment, lorsque quelqu’un meurt, ses proches ne peuvent pas l’enterrer. C’est très triste parce qu’ils n’ont même pas la possibilité d’accompagner le corps du défunt jusqu’au cimetière pour lui dire au revoir » […] « Les danses traditionnelles ne sont pas autorisées ».

Une autre ajoute :

« Quand je tombe malade, mes proches ne me rendent pas visite parce qu’ils pensent que c’est le Covid-19. Ils ont peur d’être infectés alors que vous pouvez très bien souffrir d’une autre fièvre comme la malaria ».

« Il est triste que vous ne puissiez pas réunir les familles pour célébrer la Journée internationale de la famille1, dit une femme. Lorsque nous nous réunissons et partageons nos idées et nos expériences, cela nous aide dans notre lutte contre l’extrême pauvreté.

La situation actuelle a obligé les volontaires permanents à imaginer d’autres façons d’agir puisqu’il n’est pas possible de se rassembler. Cela signifie que la plupart des actions doivent être pensées et menées différemment, en gardant pour boussole les engagements communs aux équipes du Mouvement dans le monde.

En ce qui concerne l’éducation, le gouvernement devrait présenter un programme de retour des enfants à l’école digne de ce nom, où toutes les précautions devront être prises. Compte tenu de la saturation des écoles et des classes, il convient d’envisager la création de classes supplémentaires ou la fréquentation des écoles par les élèves à tour de rôle.

« Je me sens très mal à cause de mes enfants. Comme ils ne vont pas à l’école, ils manquent beaucoup de choses importantes », confie une mère de famille.

La plupart des plans visant à aider les élèves pendant leur séjour à la maison durant la pandémie n’incluaient pas les enfants des familles les plus pauvres. Tous les membres d’ATD Quart Monde doivent travailler ensemble afin de mettre au point une stratégie pertinente pour atteindre les laissés-pour-compte. Il est primordial d’attirer l’attention du public sur cette question.

Amérique latine

Ce que cette période de pandémie donne à vivre nous rappelle que tous les êtres humains sont pareils. Nous avons tous un corps, vulnérable, à la merci d’un petit virus. Pour faire face à cette situation, nous redécouvrons notre interdépendance. Des métiers et des gestes peu considérés hier apparaissent essentiels aujourd’hui, vitaux même, pour le bon fonctionnement d’un pays. Nous sentons combien nous avons besoin les uns des autres, que nous ne pouvons pas faire juste chacun pour soi, et en même temps, les moyens de nous protéger du virus sont si différents, avec de tels écarts, que les injustices sont rendues plus visibles encore qu’elles ne l’étaient hier. Leur côté intolérable saute aux yeux. Si cette crise évoque des possibles, les peurs s’exacerbent aussi, et les plus pauvres savent d’expérience que de la peur à la violence, le chemin est court.

« Les Droits de l’homme, ce n’est pas le caprice d’une classe sociale, ce n’est pas un gadget, c’est un combat ». 

Dans le monde entier, l’économie et les ressources des familles les plus vulnérables ont été durement touchées par la pandémie du coronavirus. La Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes des Nations unies estime une hausse de 30 % des personnes en situation de pauvreté dans certains pays de la région, soit un total de près de 220 millions de pauvres. Ce chiffre témoigne des millions de personnes qui souffrent de la faim, de l’insécurité et du manque d’accès aux droits fondamentaux : santé, logement et éducation, entre autres.

Mais la pauvreté n’est pas nouvelle. « La différence — explique Luis Zepeda depuis son domicile dans un des quartiers les plus appauvris de la capitale guatémaltèque — c’est qu’elle est maintenant plus visible, elle est davantage exposée à la société ».

La solidarité dans les communautés et les quartiers pauvres de la région n’est pas nouvelle non plus. Elle n’est pas apparue dans ce contexte de pandémie, elle fait partie des pratiques quotidiennes au sein du voisinage en faveur du bien-être de tous.

Bolivie

En se référant à l’importance de la solidarité dans la culture andine et à Senkata (El Alto, Bolivie), où elle vit, Susana Huarachi explique :

« On vient d’une structure sociale au sein de laquelle on a toujours partagé, c’est ce qui nous a permis de surmonter les difficultés ensemble. Pour ceux qui viennent d’une culture aymara ou andine, le partage est fondamental, la solidarité est présente à chaque instant, que ce soit pour partager un bon moment ou si tu as besoin d’aide. Ici, quand tu vas rendre visite à quelqu’un, tu n’y vas jamais les mains vides. Ce n’est pas une règle stricte mais c’est ce qui se fait. Et si les voisins apprennent qu’une famille est malade ou a des problèmes, ils vont immédiatement les soutenir, en général avec de la nourriture, rarement avec de l’argent, mais tu amènes toujours un peu de pain ou quelque chose comme ça. Quelque chose qui se fait beaucoup ici, c’est de saluer les gens que tu croises dans la rue. Tous les enfants t’appellent “tata” ! Pour moi ce n’est pas seulement une habitude, ce sont des liens forts qui te permettent de sentir que tu fais partie de quelque chose de plus grand que seulement toi et ta famille, sentir que tu fais partie de la communauté. Ces petits collectifs de solidarité et ces démonstrations permanentes, quotidiennes, permettent à la population de résister à cette pandémie et aux conflits sociaux que nous n’avons pas encore résolus ».

Pour faire face à cette situation difficile en Bolivie, des membres du Mouvement ATD Quart Monde à El Alto et à La Paz s’organisent pour créer et maintenir des réseaux de solidarité.

« J’ai apporté ça pour partager, je n’ai pas grand-chose moi-même, et dans quelques semaines ce que j’ai ne suffira plus. Mais je crois qu’on doit garder un petit peu de côté au cas où quelqu’un souffre plus que nous », dit Roxana.

Forts de ces réflexions, les membres de l’équipe sur place organisent les vivres collectés avec l’aide des voisins de la Maison de l’Amitié, dans le district où ATD Quart Monde est présent. Ils disent : « Face au confinement total décidé par le gouvernement, il y a des familles qui n’arriveront pas à survivre si nous n’agissons pas dès aujourd’hui ».

Margarita incite à aller encore plus loin :

« Comment pouvons-nous faire pour que les autorités nous écoutent ? Il nous faut penser à ce qui permettra que personne ne soit laissé de côté au moment où le gouvernement sera prêt à nous aider. Beaucoup de gens sont partis à la campagne où ils ont un terrain ou de la famille, mais moi je n’ai pas de village où aller ; nous devons nous faire entendre ».

Pour donner suite à la réflexion de Margarita et de nombreuses familles, ATD Quart Monde s’est associé à d’autres organisations pour faire entendre leurs voix à travers une lettre ouverte adressée aux autorités et à la société civile. Ils y mettent en évidence que, malgré les efforts déployés pour créer et étendre l’aide solidaire sous forme de bons familiaux, le soutien du gouvernement ne parvient pas à toutes les familles, et en particulier à celles qui sont les plus exclues.

Pérou

Le droit à l’eau et à l’assainissement est un droit humain fondamental. Selon les Nations unies, cela signifie que l’approvisionnement doit être suffisant et continu pour l’usage personnel et domestique : l’eau pour boire, laver le linge, préparer les aliments, faire le ménage et pour se laver. L’eau doit être saine : sans risque pour la santé, avec une couleur, odeur et saveur acceptables ; elle doit être accessible à tous en termes de prix et de proximité.

À défaut d’un service public qui garantisse leur droit à l’eau, les habitants font appel aux services des vendeurs d’eau qui viennent dans le quartier avec des citernes et la vendent au litre. Les habitants de La Vizcachera, vivent pour la plupart en situation de pauvreté. Pourtant, le montant dépensé pour couvrir les besoins en eau d’une famille pendant une semaine est équivalent à celui d’une famille d’un quartier de classe moyenne pour un mois sur Lima. Par ailleurs, le système de distribution et de stockage représente un véritable problème de santé publique. Les habitants conservent l’eau de la meilleure manière que le permettent leurs conditions de vie. S’il y a un peu d’argent à investir, ils achètent des réservoirs ou creusent des puits sur leur terrain, sinon, ils utilisent des cylindres de plastique, des bidons, des seaux et des jarres.

Dans la zone la plus haute de la montagne, la situation est encore pire. Pomper l’eau jusqu’en haut est coûteux. Plus on vit en altitude, plus le litre d’eau coûte cher. Il arrive que la famille ne puisse pas payer le pompage ou que la maison soit trop haute pour raccorder l’eau. Alors les familles transportent l’eau seau par seau, jusqu’au sommet. Ensuite, ils y font attention comme on fait attention aux choses les plus précieuses. L’eau est un luxe, les enfants le savent.

Pour les familles les plus pauvres du Pérou, qui dépendent souvent de l’économie de subsistance, le confinement a entraîné une énorme perte de revenus. En quelques jours, la pénurie d’eau à La Vizcachera était déjà devenue vraiment insupportable. Ni eau, ni argent pour en acheter. L’eau a toujours été une denrée indispensable, mais elle l’est encore plus lorsque la santé dépend d’un lavage de mains fréquent. Le service d’eau potable et d’assainissement de Lima a bien envoyé quelques citernes pour aider, mais cela n’a suffi qu’à quelques familles de la zone plane du quartier.

Dans ces circonstances, « Le vendeur d’eau — dit Julia — ne fait payer que la moitié du prix du pompage, ou même moins à ceux qui en ont le plus besoin. Les personnes les plus vulnérables vivent dans les hauteurs. Au sommet de la montagne, une grand-mère vit seule. Elle était vendeuse ambulante et payait ses 80 soles péruviens (environ 20 euros) pour le pompage, mais maintenant elle n’en a plus les moyens, alors le vendeur d’eau ne lui fait payer que l’eau et un prix symbolique pour le pompage, seulement ce qu’elle peut payer ».

Madagascar

Les familles nous disent :

« Bien sûr, nous avons peur d’être malades, les soins de santé ne sont pas à notre portée… Mais ce que nous craignons le plus, c’est de mourir de faim ».

C’est pourquoi, à Madagascar, Mme Louise, dont la vie est très difficile, a partagé l’aide financière reçue d’un organisme international avec sa voisine qui n’a pas pu être enregistrée parce qu’elle n’avait pas de documents officiels. C’est ainsi que les gens résistent à la crise. Ils partagent la nourriture, mais chaque fois que nous leur en offrons la possibilité, ils sont aussi désireux de partager leurs idées et de réfléchir à ce qui devrait changer.

Pologne

L’équipe d’ATD Quart Monde connaît des personnes qui, se trouvant sans logement, passent les nuits dans des centres d’hébergement. Elles ont des difficultés financières et travaillent pour la plupart dans des conditions extrêmement précaires. Chaque jour, ces personnes doivent parcourir de longues distances en transports publics pour pouvoir se nourrir, se laver, dormir, gagner de l’argent… Elles doivent faire la queue pour recevoir de la nour-riture, et ainsi, quotidiennement, côtoyer des centaines de personnes dans des espaces bondés.

Un homme sans logement explique :

« Pour lutter contre les infections, le corps a besoin d’énergie et d’aliments sains. Actuellement, seuls les aliments en conserve sont distribués au lieu de la soupe. C’est faible en vitamines pour des gens qui ont le corps déjà affaibli par le tabac et les privations. Pas facile dans ces conditions de contrer les infections.
Les pauvres qui n’ont pas les moyens d’acheter des cigarettes fument celles qu’ils trouvent. Ils sont en contact avec des filtres que d’autres ont utilisés. C’est dangereux avec l’épidémie.
Si quelqu’un a de la fièvre, il faut appeler une ambulance. Les gens mourront parce que personne ne les aidera. Les médecins qui viennent à notre rencontre dans la rue aident uniquement avec les médicaments dont ils disposent, pas ceux dont ils auraient besoin en réalité. Souvent, ces médicaments sont périmés. Si quelqu’un tombe malade au centre d’hébergement, tout le monde sera mis en quarantaine. Ce sont 100 personnes qui dorment là, 50 par pièce. Comment faire ? Beaucoup de gens mourront probablement. Ceux qui ont la plus grande immunité survivront.
Dans l’un des abris de nuit de Varsovie, le mois dernier, la literie n’a pas été changée durant dix jours. Plus de 100 personnes ont dormi dans des draps déjà utilisés. Maintenant, ils donnent de la literie propre aux nouvelles personnes pour 14 jours. C’est le temps maximum pendant lequel vous pouvez dormir dans un établissement, puis vous devez trouver un autre endroit. Ensuite, vous pouvez revenir, mais il faut une pause entre temps.
J’avais l’habitude de passer du temps dans les bibliothèques, maintenant elles sont toutes fermées. Je pouvais y déposer mes sacs pendant que je lisais, maintenant je dois tout porter constamment avec moi ».

Les personnes qui travaillent sans contrat, ou avec des contrats très précaires, se trouvent dans une situation terriblement difficile. Beaucoup disent que l’apparition du coronavirus les a privés d’emploi, et, par conséquent, de moyens de subsistance. La perspective d’être sans revenus pendant plusieurs semaines est extrêmement inquiétante.

« Je distribue des tracts. Il est possible que l’entreprise soit fermée et que je n’aie plus d’argent. En plus, être confiné entre quatre murs, sans pouvoir travailler, sans contact avec les gens, ça me rend dépressive. Dans le foyer social où je suis, il a été annoncé hier que personne n’était autorisé à sortir ou à recevoir des invités jusqu’à nouvel ordre. Cela peut prendre un mois, je ne sais pas, ils n’ont fourni aucune date. Je ne peux même pas faire des courses.
Je ne me plains pas, je comprends que c’est pour notre sécurité et celle des autres. Je suis consciente de la gravité du moment, mais je me sens très mal moralement, les autres du foyer aussi. C’est une difficulté pour moi de ne pas pouvoir me déplacer. On ne sait pas combien de temps cela peut durer ».

Luxembourg

« Le virus n’a pas de frontière. Ce n’est pas parce qu’on a beaucoup d’argent qu’on a un respirateur en or. J’espère que les plus aisés comprendront ce que c’est d’être pauvre, de ne pas avoir les moyens. Lorsqu’on est pauvre on est confiné et isolé toute l’année. On sort très peu ; on ne va pas au spectacle, on ne peut pas aller en vacances. Les gens râlent aussi pour rien alors que nous, on ne peut même pas payer internet. C’est un privilège d’avoir internet. Que les gens réfléchissent et analysent leur bien-être, qu’ils arrêtent de se plaindre et de ne penser qu’à eux.
Comment rester solidaire pendant le confinement ?... J’aide mes deux voisines plus âgées, en allant faire des courses pour elles. J’aide aussi un Monsieur qui a des difficultés à tout faire seul. Comme je fais de la couture, les gens m’ont demandé de leur faire des masques. J’en ai déjà fait une centaine et je m’occupe ainsi. C’est ma participation sociale pendant le confinement »,
dit Linda, militante.

Bulgarie

L’école mobile Stolipinovo offre des opportunités de créativité et d’éducation informelle, dans la rue, aux enfants d’une zone d’habitats informels du quartier de Stolipinovo-Plovdiv-Bulgarie. Depuis octobre 2019, quatre enseignants de l’école Pencho Slaveykov, ont rejoint cette initiative.

Ils vont au milieu des baraques, animant des ateliers avec l’équipe de l’école mobile Stolipinovo.

Pendant cette période de confinement due à la pandémie, l’accès à l’éducation est un défi extrêmement difficile pour les enfants et les enseignants. En Bulgarie, un système de scolarisation à distance a été mis en place. Mais la plupart des enfants de cette école n’y ont pas accès : ils n’ont pas de tablette, pas d’ordinateur, ni de connexion internet. Ce manque de matériel est la frontière entre des milliers d’enfants et l’accès à l’éducation.

Un appel a été lancé par l’équipe de l’École mobile Stolipinovo afin de récupérer des tablettes d’occasion. En quelques heures, plus de cinquante personnes ont répondu positivement. Les jours suivants, dix d’entre elles ont apporté leurs tablettes.

Puis est venu le temps de redémarrer chaque tablette, d’installer le logiciel d’apprentissage, de préparer l’enseignement en ligne et de remettre les tablettes individuellement à chaque élève. Rosi (enseignante) est en contact téléphonique avec des mères d’élèves de sa classe. Cela lui a permis de prendre des rendez-vous, et avec toutes les précautions nécessaires d’accueillir les élèves un par un dans sa voiture. Une séance de deux heures est nécessaire afin que chaque enfant puisse se familiariser avec le matériel. Pour la première fois, les enfants peuvent utiliser des tablettes dans le processus d’apprentissage ainsi que des programmes éducatifs tels que Khan Academy, Google Classroom, etc. Jusqu’à présent, ils ne connaissaient que Viber et Facebook.

Espagne

Les membres d’ATD Quart Monde ont lancé un appel pour passer de l’état d’alerte sanitaire lié au coronavirus à un état de solidarité dans lequel chaque personne et collectif serait pleinement attentif à celles et ceux qui vivent l’exclusion.

Après sa visite en Espagne il y a quelques semaines, le Rapporteur spécial sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme des Nations unies écrivait dans son rapport : « Le mot que j’ai le plus souvent entendu est le mot “abandonnés” ».

Que vont devenir les personnes et collectifs qui n’avaient déjà pas accès au système de santé, à un revenu de base, ou à un travail dignement rémunéré ? Quelles alternatives pour les personnes qui ne disposent pas de ressources suffisantes ou qui n’ont pas la possibilité de rester chez elles dans des conditions alimentaires et sanitaires adéquates ? Et toutes les personnes qui se rendent régulièrement aux banques alimentaires et dans les restaurants sociaux ?

Un thème nous préoccupe particulièrement : comment garantir que la brèche scolaire ne va pas s’agrandir davantage pour les enfants et les jeunes qui avaient déjà des difficultés à l’école ? Va-t-on à nouveau rendre coupable leur milieu social en cas d’échec ?

Pour les membres d’ATD Quart Monde, un état de solidarité devrait au minimum inclure les trois principes suivants : une présence directe et un soutien mutuel ; un accès facile aux informations concernant les droits de base ; la construction de politiques élaborées avec les familles et collectifs affectés.

États-Unis

Une membre de l’équipe ATD Quart Monde à Gallup au Nouveau-Mexique racontait qu’elle prenait soin d’envoyer des textos plutôt que d’appeler les gens qui n’ont pas d’électricité puisque les textos consomment moins de batterie. À New-York, un autre membre de l’équipe a fait part de ses difficultés à rester en contact avec les gens et à les aider à gérer leurs frustrations et leur isolement. Certaines personnes en situation de pauvreté ont l’impression que leurs efforts permanents sont vains. Certains essayaient de poursuivre leurs études, d’autres avaient enfin trouvé un logement, mais avec toutes les écoles fermées et les millions d’emplois perdus, les objectifs sont à nouveau en suspens et les progrès réalisés pourraient être perdus. Certains sont anéantis par le confinement : il accentue l’isolement dont ils souffrent déjà et les fait douter des mesures prises pour endiguer la pandémie.

En même temps, comme le signale une personne en Oregon :

« Je pense qu’un grand nombre d’entre nous, les personnes marginalisées — qui ont aujourd’hui des craintes légitimes et sérieuses à propos de la pandémie puisqu’elles sont handicapées, ont des antécédents médicaux, sont sans foyer, ou dans des conditions de logement précaire — sont également plus habituées à une vie constamment soumise à la menace et à l’incertitude ».

Alors que des millions de personnes perdent leur emploi et se tournent vers les banques alimentaires, les ressources limitées auxquelles se raccrochent les familles les plus pauvres s’épuisent. Dans les zones rurales, les étalages vides des magasins impliquent que les gens doivent aller plus loin, sans être sûrs de trouver ce dont ils ont besoin.

Par exemple, à New York un homme apprend qu’une famille n’a ni nourriture ni argent. Bien qu’il n’ait lui-même aucune réserve, il partage avec elle dès qu’il le peut. Alors qu’il doit acheter une carte de transport hebdomadaire à 33 dollars pour aller faire ses courses dans un magasin qui n’a pas encore été totalement dévalisé, il reste chez lui puisqu’il sait que les transports sont censés devenir gratuits le lendemain. Il économise ainsi le prix du transport pour acheter de la nourriture.

Un homme, qui venait juste de trouver une chambre individuelle dans un centre d’hébergement après avoir eu des problèmes de colocation, a à nouveau accepté de partager sa chambre pour que le centre puisse accueillir davantage de monde, même s’il savait que cela augmenterait ses risques de contamination.

Savoir tendre la main et s’entraider est vital pour nous tous, y compris pour ceux qui, en dehors du contexte de la pandémie, savent comment surmonter les difficultés de la vie. Les personnes qui ont vécu la misère peuvent nous montrer non seulement comment survivre aux conditions de crises, mais aussi comment le faire avec dignité et compassion.

1 En 1993, l’Assemblée générale de l’ONU a proclamé le 15 mai de chaque année Journée internationale des familles, afin de mieux faire connaître les

1 En 1993, l’Assemblée générale de l’ONU a proclamé le 15 mai de chaque année Journée internationale des familles, afin de mieux faire connaître les questions liées à la famille et d’accroître la connaissance des enjeux sociaux, économiques et démographiques qui les affectent.

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