New York, hiver 1973. Des personnes en situation précaire attendent dans un centre d’aide sociale. Chacun vient avec ses demandes. Il s’agit de : chômage, logement, divorce, problèmes médicaux voire psychiatriques, femmes ou enfants abandonnés ou maltraités, documents perdus, relevant parfois d’autres juridictions.
Les travailleurs sociaux doivent d’abord comprendre les situations dans leur complexité. Ils le font avec une conscience et une patience qui nous apparaissent aujourd’hui extraordinaires1. Les entretiens sont longs. Parfois l’employé en réfère à son chef de service pour valider sa réponse, sérier les problèmes. Chaque cas est une saynète dense, en temps réel, dans une réalité concrète. La caméra s’immisce dans l’échange, zoome sur les visages ; elle montre une administration avec règlementations difficiles à interpréter, à mettre en œuvre.
Dans l’envers du décor ronflent de gros ordinateurs dévidant leurs listages, des téléscripteurs crachouillent des rubans à trous, de longs fichiers à tiroirs se déploient. L’employé n’hésite pas à donner un nom, un téléphone, offrant ainsi un service personnalisé, humanisé. Cela n’empêche pas des protestations.
Dans une unité de lieu et de temps comme sur une scène de théâtre2, des gens fument, se parlent, déambulent, dorment. Quelques enfants tournoient tout autour.
Et voici que surgissent les mots d’un homme en colère : « Depuis des jours j’attends quelque chose… comme Godot, vous savez. J’attends quelque chose qui ne viendra jamais. »