La réalisatrice3 offre une scène inaugurale étonnante d’intimité complice entre une petite fille aux toilettes et sa mère. Sol, sept ans, se rend avec elle à l’anniversaire de son père, malade, vivant chez les grands-parents. Tout sera vu à travers ce regard juvénile, candide, qui ne juge pas, qui n’anticipe pas.
À son arrivée elle est accueillie, par Cruz la garde-malade de son père. C’est la personne la moins agitée, affairée de la maisonnée. Cette femme fera le lien entre la chambre du père plongée dans la pénombre, le silence, et le reste de la famille lumineuse, bruissant comme une ruche. Au passage et à peine évoqué, on comprend indirectement que le coût d’une garde-malade à domicile n’est pas tout à fait à la portée de la famille qui souhaite offrir ce confort au jeune homme ; on imagine qu’ils se cotiseront. Mais ce n’est pas le sujet du film.
Le présent est à la fête et, tout comme Sol, le spectateur tardera à découvrir ce père affaibli par un cancer avancé, mais immédiatement proche de son enfant et attentif, en connivence au moment où Sol entre dans sa chambre. À hauteur d’enfant, tout est couleurs, sons, sourires, énergies. On voit surtout des femmes de tous âges. Elles partagent avec entrain et solidarité des tâches ménagères : aspirateur, vaisselle, confection laborieuse d’un gâteau… La caméra à l’épaule, comme dans une vidéo familiale, nous invite à magnifier l’anodin. Le grand-père officie au jardin, il offrira un bonsaï à son fils, père de Sol (comme totem naturel ?). Ce dernier, d’abord retranché au repos, puis fêté chaleureusement.
Dans le récit, fait de scènes mosaïques et non chronologiques, tout n’est pas explicite mais reste fluide. Sol, intuitive, interroge un adulte sur un « après » la fête, après la vie, avec innocence et confiance, mais il n’y a ni morbidité ni pathos. La jeune actrice est très naturelle et convaincante.
On sent la réalisatrice et ses personnages baignés de traditions mexicaines dans lesquelles la mort est accueillie de façon naturelle. Les membres de cette famille nous embarquent dans un voyage de la vie vivante et de la vie après la vie. C’est peut-être dans cette célébration attachante et sensible entre ombre et lumière, entre agitation et silence, dans ce temps suspendu, cet entre-deux symbolique que se situe le « totem » ?