Les ateliers de promotion professionnelle

Rédaction de la Revue Quart Monde

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Rédaction de la Revue Quart Monde, « Les ateliers de promotion professionnelle », Revue Quart Monde [En ligne], 135 | 1990/2, mis en ligne le 05 août 1990, consulté le 18 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/3893

Dès sa fondation en 1957 à Noisy-le-Grand, le Mouvement ATD Quart Monde s’est engagé avec les familles en situation de grande pauvreté pour qu’elles soient reconnues comme des familles de travailleurs et non comme des assistés. Il a expérimenté avec elles différentes voies d’accès au droit de travailler et de se former : atelier pour la construction d’un foyer familial avec les hommes en 1958, atelier de manutention avec les femmes en 1960, atelier de mécanique avec les jeunes en 1962, ateliers de formation et de travail avec les jeunes conjointement avec l’Education Nationale en 1966. Quand le premier atelier de promotion professionnelle a été créé en 1979 à Noisy-le-Grand, il s’appuyait sur la connaissance et l’expérience ainsi accumulées. Des ateliers analogues ont ensuite été ouverts à Caen, Villeneuve-d’Ascq et Reims.

Priorité aux plus pauvres

L’atelier de promotion professionnelle s’adresse en priorité à des personnes marquées par la misère, la non-formation et l’absence d’acquis professionnels. Le recrutement se fait à partir de critères croisés reposant sur l’absence de savoirs de base, sur le peu d’expérience professionnelle ou sur la précarité des emplois occupés auparavant, sur l’appartenance à un milieu de grande pauvreté.

Cette priorité n’empêche pas l’embauche de certains travailleurs possédant des références ouvrières plus solides, en sorte de rendre possible une dynamique de partage de savoir entre les ouvriers.

Une expérience professionnelle formatrice

Un statut de salarié - Les travailleurs du Quart Monde sont avant tout en recherche d’un emploi qui leur permette de faire vivre leur famille et de redécouvrir leurs capacités et leur appartenance au monde des travailleurs. L’atelier de promotion professionnelle se base sur leurs aspirations et leur propose, non pas des stages, mais un véritable statut de salarié à travers des contrats de travail à durée déterminée et une rémunération au moins égale au salaire minimum garanti.

Une activité de production – Les Ateliers de Promotion professionnelle sont des entreprises. Quelle que soit leur production (menuiserie, ferronnerie, maraîchage…), l’accent est mis sur la qualité et le professionnalisme : il y va de l’image de marque de l’atelier et de l’honneur des ouvriers.

Un roulement des salariés – L’objectif n’est pas de créer une entreprise protégée où des personnes pourraient passer leur vie, mais d’être une étape stimulante pour un retour sur le marché de l’emploi classique. La durée des contrats de travail peut varier, mais reste toujours limitée (un an en moyenne.) Les travailleurs sont soutenus dans leur recherche d’un emploi à la sortie.

Un temps de formation – L’absence de formation initiale constitue un des critères de recrutement. S’engager sur le chemin de la formation fait donc partie intégrante du contrat passé entre l’atelier de promotion professionnelle et le salarié. Cette formation vise à apporter à celui-ci une meilleure employabilité, mais aussi à lui permettre de se développer en tant qu’être humain. Cela nécessite un effort important.

La formation se fait en situation sur le poste de travail, ainsi que parfois dans des organismes extérieurs. Cette dernière formule, expérimentée à Villeneuve-d’Ascq, a été vécue comme valorisante par les ouvriers qui rencontraient dans ces centres des travailleurs de divers niveaux eux aussi en formation. La formation porte sur les problèmes liés à la production (lecture de notices, calcul de surfaces…), sur les savoirs de base (lecture, écriture, calcul), sur la connaissance du monde du travail (code du travail, formalités…) Elle comporte des moments collectifs, mais s’adapte aussi aux demandes de chacun.

Une démarche globale - L’atelier de promotion professionnelle adopte une démarche de promotion globale de la personne et de la famille. Les événements de la vie quotidienne dans la grande pauvreté ont des conséquences sur la présence des ouvriers, sur la qualité de leur travail, sur leur démarche de formation. Il est impossible d’agir si l’on n’a pas une compréhension de l’ensemble.

Cette approche globale se traduit par des relations avec de multiples partenaires (entreprises, centres de formation, associations, services sociaux, écoles..). Elles sont nécessaires pour faire réussir les projets nés dans les familles du fait du retour au travail d’un de leurs membres : reprendre des enfants placés, partir pour la première fois de sa vie en vacances, obtenir un logement décent, faire effectuer des soins de santé qu’on n’a jamais pu réaliser jusque-là, etc.

Passer le relais des structures

A travers leur engagement dans les ateliers de promotion professionnelle, les volontaires-permanents du Mouvement ATD Quart Monde ont voulu montrer à quelles conditions les plus démunis peuvent retrouver une place active dans l’entreprise et se former. La création en France de formules de formation en alternance pour les chômeurs de longue durée, la mise en place progressive d’un crédit-formation qui doit permettre à toute personne sans qualification d’en acquérir une, constituent des évolutions. Elles permettent que le Mouvement passe le relais des ateliers de promotion professionnelle à d’autres partenaires. La tâche des volontaires-permanents n’est pas en effet de gérer indéfiniment des structures, mais d’expérimenter des voies possibles. Une fois celles-ci ouvertes, une fois des mesures prises pour que l’accès au métier devienne un droit pour tous, le Mouvement ATD Quart Monde se doit de retourner dans les quartiers, dans les lieux isolés où se cachent les familles les plus pauvres pour faire en sorte avec elles que ces mesures leur bénéficient effectivement.

Rédaction de la Revue Quart Monde

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