Sur les océans, des navires tournent en rond. Chargés de déchets industriels, souvent toxiques, ils errent de port en port, jusqu’à ce qu’un État du Tiers Monde accepte de recevoir leur cargaison en échange de quelques poignées de dollars. Parfois, faute d’avoir trouvé preneur, ils reviennent au pays. C’est alors que l’affaire fait du bruit.
La gestion des déchets industriels est un tel casse-tête que les Nations Unies en ont débattu récemment, lors d’une conférence ad hoc.
À cette question nouvelle, les nations industrielles ont apporté une réponse vieille comme le monde : les pauvres, considérés comme dépotoirs. Des placards familiaux vidés dans les vestiaires des associations charitables aux poubelles déversées sur la périphérie des villes ou sur les pays les plus démunis, le réflexe est le même. Les Américains l’ont modernisé en le nommant syndrome Nimby : not in my backyard, pas de ça chez moi ! Ainsi, les plus faibles des hommes sont-ils condamnés à n’avoir pas d’autre chez eux que des montagnes d’ordures fumantes qui font de plus en plus honte à l’humanité ? Mais le promoteur citadin des petits matins sait bien que l’aube sort des poubelles. Du fond de ces décharges, ces hommes ont le courage de préserver leur dignité, les peuples du Tiers Monde sont de plus en plus nombreux à refuser le débarras des pays industrialisés. Ne serait-ce pas là un appel à tuer Nimby en chacun de nous ? Bien sûr, ceci ne saurait résoudre la gestion des déchets industriels et polluants. Mais qui sait ? Si Nimby n’avait pas existé, savants, techniciens et responsables politiques n’auraient-ils pas déjà trouvé les moyens de gérer les déchets industriels ?