Lire a toujours été important pour moi ! J’ai toujours aimé lire, et mes parents nous ont toujours encouragés. Mon père, à qui nous n’avons jamais vraiment réussi à apprendre à lire et écrire, malgré ses efforts, voulait toujours que nous ayons un livre entre les mains. J’ai lu très tôt : je voyais mon frère et ma sœur qui allaient à l’école et dès que l’occasion s’en présentait, je m’emparais de leurs livres et j’essayais de déchiffrer. Comme on était dans un petit village, à l’école, il n’y avait qu’une seule classe et j’aimais lire dans les livres d’école de mon frère et de ma sœur.
J’ai très vite aimé les livres comme La Petite Fadette de Georges Sand, que j’ai lu quand j’avais douze ans. Plus tard, j’ai été marquée par Cosette, dans Les Misérables de Victor Hugo. Ce sont des romans, mais c’est basé sur du réel, sur la réalité de la vie des gens de leur époque. J’ai lu aussi la comtesse de Ségur, Sans famille, d’Hector Malot, avec le petit Rémi. Souvent, ce sont des histoires un peu tristes, mais elles me plaisent car ce sont des livres qui disent la vérité de la vie. Lire de telles histoires me donne du courage car je vois des gens aux prises avec des difficultés encore plus grandes que ce que j’ai pu connaître moi-même. Cela donne aussi des clés pour comprendre sa propre histoire.
Parfois, c’est un titre qui m’attire. C’est comme cela que je suis tombée sur un livre qui s’appelle La soupe aux cailloux de Martine Provis. Le titre m’a intriguée. Je l’ai acheté et j’ai découvert l’histoire d’une petite fille qui était heureuse ; arrachée à sa mère pour être placée dans une ferme, elle était maltraitée et faisait la bonne. A quatorze ans, après s’être enfuie, elle se retrouve chez des Sœurs, où elle est mieux. Son histoire se termine bien, heureusement, elle se marie avec un médecin et bâtit une famille. J’ai admiré le courage de cette petite. Comment elle s’est révoltée contre la violence qu’elle subissait et a osé partir. Des histoires comme cela, on en rencontre encore aujourd’hui, on voit encore des enfants arrachés à leurs parents, qui sont placés et qui se retrouvent encore plus malheureux qu’ils ne l’étaient avant.
J’aime ce genre de récits : des récits de vie. Je pense qu’il faut beaucoup de courage à leurs auteurs pour les écrire ! C’est pour cela aussi que j’aime les livres dans lesquels des médecins ou des infirmières racontent leurs séjours dans des pays en guerre. C’est la réalité, cela nous permet d’apprendre ce qui se passe dans les autres continents. On voit bien des choses à la télévision, mais à la télé, ils n’ont pas le temps de tout nous dire. Le livre, c’est plus lent.
Quand j’ai aimé un livre...
Attention, c’est bien de lire des livres sur la vie dure mais des fois, on a quand même envie de lire autre chose, pour le plaisir, pour se détendre. Mais toujours je reviens vers ces livres : c’est comme si on était poursuivi par cela.
Quand j’ai aimé un livre, j’aime le passer à d’autres pour qu’ils le lisent à leur tour, et des fois on me le rend, des fois on ne me le rend pas. C’est comme cela, tant pis...
Lire cela demande un effort, c’est sûr. Il faut comprendre le sens de ce qu’on lit, et parfois c’est dur. On peut interpréter un livre d’une manière ou d’une autre, et il faut réfléchir à chaque passage. Souvent, je souligne les passages qui me marquent le plus. Récemment, j’ai lu un livre écrit par l’évêque de Créteil. J’ai noté un passage de ce livre dans lequel il dit que « les subventions, les aides de toutes sortes ne suffisent pas pour donner à un homme l’estime de lui-même. Il faut qu’il ne soit pas jugé, qu’il soit accueilli en vérité. Il n’y aura plus d’exclus parmi nous le jour où nous saurons tous ensemble rendre dignité à ceux qui l’ont perdue ». En lisant cela, on voit qu’il a des idées proches de celles du Mouvement ATD Quart Monde. Cela encourage !
J’aime aussi lire les livres du Mouvement, les livres du père Joseph, il s’est tellement battu pour nous, avec quel courage ! Je ne sais pas si tout cela changera un jour, si cette misère s’arrêtera ou pas. J’en doute parfois quand je vois ce qui se passe. On voit encore aujourd’hui des gens qui vivent en caravane et qui tout d’un coup deviennent indésirables, comme dans une ville de mon département, dont ils ont été chassés le mois dernier. Mais il faut tenir et continuer à se battre.