David Jousset, Bruno Tardieu, Jean Tonglet. Les pauvres sont nos maîtres

Éd. Hermann, Paris, 2019

Fred Poché

p. 60-61

Référence(s) :

David Jousset, Bruno Tardieu, Jean Tonglet. Les pauvres sont nos maîtres. Apprendre de ceux qui résistent à la misère : le paradoxe Wresinski. Éd. Hermann, Paris, 2019.

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Fred Poché, « David Jousset, Bruno Tardieu, Jean Tonglet. Les pauvres sont nos maîtres », Revue Quart Monde, 253 | 2020/1, 60-61.

Référence électronique

Fred Poché, « David Jousset, Bruno Tardieu, Jean Tonglet. Les pauvres sont nos maîtres », Revue Quart Monde [En ligne], 253 | 2020/1, mis en ligne le 01 mars 2020, consulté le 19 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/8471

Index de mots-clés

Joseph Wresinski

L’ouvrage proposé par les auteurs se déploie en trois mouvements : le premier prend au sérieux la vie et les intuitions de Joseph Wresinski. Le second aborde les différents « défis pour penser ». Et le troisième donne des repères pour l’action. La réflexion s’achève par la formalisation de sept pistes pour l’avenir.

En traversant l’histoire du fondateur d’ATD Quart Monde, on mesure la puissance de cette personnalité exceptionnelle pour qui la misère constitue une erreur de pensée, avant même d’émerger comme une erreur politique, économique et sociale. En effet, nous pensons mal le monde et son avenir parce que nous l’appréhendons sans la contribution des plus pauvres. Or, dans la démarche radicale proposée par Wresinski, ceux qui se trouvent privés de l’accès au savoir, à la culture et à l’instruction, deviennent au contraire nos enseignants. Le père Joseph subvertit la parole de Vincent-de-Paul - qui l’avait lui-même empruntée à Camille de Lellis - et déclare que « les pauvres sont nos maîtres », non seulement à servir mais aussi à penser en politique. La réflexion proposée dans le présent volume, nous invite à cesser de poser nos questions pour entendre celles que nous adressent les plus défavorisés ; en d’autres termes, celles qui interrogent tous les partages fondamentaux et mettent en question nos « catégories protectrices ». […]

En ces temps marqués par les logiques d’urgence et d’instantanéité, la démarche qui consiste à se mettre à l’école des pauvres nécessite de s’inscrire dans le temps long de la patience. En effet, durant les expériences de Croisement des savoirs1, on voit parfois s’écouler plusieurs années avant que tel ou tel participant se risque à prendre la parole publiquement. […] Être entendus et crus, voilà une des demandes essentielles des plus pauvres. […]

Clair et dense à la fois, l’ouvrage trace une ligne de force essentielle : il montre que chacun se trouve en capacité de chercher à apprendre des personnes qui vivent l’exclusion et de s’en donner les moyens. Ce livre se pose comme un acte de résistance face à ce que la philosophe anglaise Miranda Fricker appelle l’« injustice épistémique ». Car il s’agit, en effet, de lutter contre ce qui empêche les plus pauvres d’apporter leur contribution (p. 152). Les deux cents pages proposées au lecteur donnent des outils essentiels pour concevoir une véritable éthique de la solidarité. Après la « rumination » de cette stimulante réflexion, nous ne pouvons plus regarder les pauvres de la même manière. À faire connaître de toute urgence !

1 Voir note 1, p. 54.

1 Voir note 1, p. 54.

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