Éric Fiat, Grandeurs et misères des hommes, Petit traité de dignité

Éd. Larousse, Coll. Philosopher, 2010, 237 pages

Daniel Fayard

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Éric Fiat, Grandeurs et misères des hommes, Petit traité de dignité, Éd. Larousse, Coll. Philosopher, 2010, 237 pages

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Daniel Fayard, « Éric Fiat, Grandeurs et misères des hommes, Petit traité de dignité », Revue Quart Monde [En ligne], 219 | 2011/3, mis en ligne le 22 mai 2020, consulté le 18 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/9090

Merveilleux petit traité de dignité ! L’auteur, agrégé de philosophie, a exploré les différentes facettes de cette notion qui sert de référence majeure pour l’éthique contemporaine, aussi bien dans les débats intellectuels que dans les appréhensions sociales et citoyennes de la vie quotidienne.

Ouvrage de réflexion, certes, mais élaboré sur la base d’une série de doubles portraits mettant en scène des personnages, des situations, des conduites jugés a priori dignes ou indignes et où il s’avère que les plus dignes ne sont pas ceux que l’on croit tels de prime abord.

Les usages du terme « dignité » sont souvent contradictoires. On peut s’affronter au nom des mêmes valeurs selon la représentation qu’on en a. C’est vrai de la dignité comme des droits de l’homme ou du respect de la personne humaine. Et notre auteur expose avec beaucoup de clarté les différentes conceptions de la dignité qui se sont succédé dans l’histoire et qui perdurent aujourd’hui : bourgeoise, monothéiste, kantienne, relationnelle, moderne, en précisant pour chacune son fondement.

Ainsi, pour la bourgeoisie, la valeur d’un homme dépend moins de son état ou de son statut que de sa conduite. Certains sont dignes, d’autres pas, et il y a des degrés dans la dignité selon le mérite personnel plus ou moins reconnu. Une conduite digne, c’est une contenance, un savoir-vivre, une distinction.

Pour les monothéistes, ce qui fait la dignité de l’homme est le fait d’avoir été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu.

Pour Emmanuel Kant, tous les hommes sans exception sont dignes d’une dignité absolue et doivent être également respectés de façon inconditionnée et inconditionnelle, même les criminels, les fous et les polyhandicapés, quand bien même Dieu n’existerait pas.

Pour les tenants de la conception relationnelle, l’homme a besoin de la reconnaissance d’autrui pour accéder au sentiment de sa dignité. Ce n’est pas cette reconnaissance qui fait la dignité, mais elle l’accomplit, elle peut même l’éveiller car il y a le risque qu’on puisse perdre le sentiment de sa dignité.

Quant aux modernes, férus de démocratie et de maîtrise technique, la valeur est du côté de l’affranchissement des codes et des normes, de la revendication des mêmes libertés pour tous de pouvoir maîtriser sa vie à sa guise, voire sa propre mort. Selon eux, il y a des manières plus dignes que d’autres de vivre et de mourir

Éric Fiat prône quant à lui une conception « kanto-relationnelle ». Car il est vrai que certaines situations vécues, voire imposées, sont si indignes de la dignité humaine, si attentatoires au respect mutuel et à la fraternité que celle-ci induit, qu’elles peuvent faire perdre aux hommes le sentiment de leur dignité.

D’une écriture très accessible et d’une réflexion stimulante, ce petit traité ne peut qu’être recommandé à tous ceux qui croient à la grandeur de l’homme.

Daniel Fayard

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