« La bioéthique est avant tout une responsabilité ressentie et raisonnée vis-à-vis du plus faible, du plus démuni, du plus malade, du plus désespéré, du plus nu, du plus enfermé, du plus petit, du plus pauvre, du plus inconscient, du plus différent, du plus silencieux, du plus invisible... Le malade, l’embryon, le fœtus, l’enfant, le dément, le prisonnier, l’anormal (lié à un déterminisme chromosomique, génétique, métabolique ou infectieux), la personne la plus âgée, nous mettent en situation éthique d’avoir à répondre de leur destin, de notre engagement à leur égard, de notre vraie responsabilité. »
L’éthique ? Non pas une « certitude », mais une « inquiétude existentielle », pour reprendre la phrase conclusive de l’auteur qui est président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) après avoir été chef du service de médecine interne à l’hôpital Cochin.
Ce sont précisément ses inquiétudes qu’il essaie de partager dans cet ouvrage, en passant en revue les questions posées par certaines évolutions techniques et médiatiques qui font bouger les repères éthiques au gré des innovations scientifiques, modifient la pratique des médecins, aiguisent les attentes, voire les récriminations, des publics à leur encontre, alors que peuvent légitimement se poser de véritables cas de conscience à l’échelle de la société dans son ensemble. N’y a-t-il pas des limites à ne pas franchir ? Qu’est-ce qui est en jeu dans ces évolutions, du point de vue de la dignité humaine et des droits de l’homme ?
Comment appréhender sereinement les questions relatives, par exemple, au clonage et aux cellules souches, à l’application du principe de précaution, aux pratiques d’une médecine traditionnelle, aux nanotechnologies, au statut de l’embryon, à la gestion des fins de vie ?
Les exigences éthiques dans ces domaines ont-elles une portée universelle ou relèvent-elles de chaque culture environnementale ? Comment endiguer les effets discriminatoires d’une commercialisation des médicaments qui prive de l’accès aux soins les plus élémentaires les populations qui en auraient le plus besoin, notamment dans les pays du Sud ?
Telles sont quelques-unes des questions abordées dans ce livre de réflexion, porteur malgré les inquiétudes d’une espérance fondée sur « la redécouverte de l’autre en tant que prochain par le sentiment d’une appartenance commune à la même planète » et sur « le souci du bien commun. »
Daniel Fayard.