Gareth Stedman Jones, La fin de la pauvreté ? Un débat historique

Editions Ere, Alfortville, Coll. Chercheurs d’ère, 2007, 213 pages, Préface de Julien Vincent, traduit de l’anglais, (1ère édition en anglais, 2004)

Daniel Fayard

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Gareth Stedman Jones, La fin de la pauvreté ? Un débat historique, Editions Ere, Alfortville, Coll. Chercheurs d’ère, 2007, 213 pages, préface de Julien Vincent, traduit de l’anglais, (1ère édition en anglais, 2004

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Daniel Fayard, « Gareth Stedman Jones, La fin de la pauvreté ? Un débat historique », Revue Quart Monde [En ligne], 204 | 2007/4, mis en ligne le 01 avril 2008, consulté le 28 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/9164

L’auteur, professeur de théorie politique et sociale à l’université de Cambridge (GB), retrace dans cet ouvrage les origines du projet d’une société sans pauvreté. Il les situe dans les années 1790, lorsque certains penseurs politiques comme Thomas Paine et Condorcet assurent que tous les citoyens pourraient être protégés contre les hasards et les incertitudes de l’existence. L’enjeu était alors de savoir si le progrès scientifique et économique peut abolir la misère, cet état habituel d’une portion de la société.

Ils prônent une visée politique issue des révolutions américaine (1776) et française (1789) : l’égalité entre les nations et dans un même peuple.

Or le contexte de la révolution industrielle et commerciale qui bouleverse l’ordre social antérieur par le développement de la division du travail et l’accroissement considérable des activités productrices destinées au marché, génère des inégalités nouvelles. Celles-ci sont jugées par eux utiles à l’intérêt de tous seulement si elles favorisent les progrès de la civilisation, de l’éducation, de l’industrie sans entraîner ni dépendance, ni humiliation ni appauvrissement. Pour cela il faut parvenir à garantir des moyens sûrs d’existence aux personnes âgées, aux veuves et aux orphelins et à « doter tous les enfants du capital nécessaire à la pleine jouissance de leur force de travail au moment d’entrer dans la vie active et de fonder une famille. » Selon eux, les pauvres ont droit non seulement aux secours mais aussi à l’éducation, à de justes salaires, à une vie décente, et même à une participation sociale, culturelle et politique à l’instar de leurs concitoyens. Autrement dit, désormais il faut prévenir la pauvreté et non plus seulement soulager ceux qui tombent dans la misère.

L’auteur s’attache à reconstituer l’avancée de ces idées nouvelles jusqu’au 20ème siècle, à partir des réactions qu’elles ont suscitées en Grande-Bretagne et en France, parmi les penseurs politiques et les acteurs socio-politiques. Le lecteur prend alors la mesure de la longue bataille qu’il a fallu livrer et qu’il faut encore livrer pour en finir avec l’extrême pauvreté. On aura compris que ce débat historique a des prolongements dans l’actualité contemporaine : socialisme / libéralisme, volontarisme politique / réalisme économique.

Cet ouvrage se réfère à de très nombreux penseurs et documents que l’auteur entreprend de rapprocher ou de mettre en opposition, signe d’une investigation très fouillée mais facteur de complexité pour le lecteur peu familier de l’histoire des idées au XIXème siècle, en Grande-Bretagne notamment.

Daniel Fayard

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