Au hasard d’une soirée, un jeune journaliste me disait travailler pour la rubrique « Enseignement, Formation. » Et voilà, pensai-je, une chance de l’intéresser à l’expérience lyonnaise menée à l’initiative du Mouvement, « Contre l’exclusion, une qualification » : conduire en trois ans des travailleurs très pauvres au niveau du CAP1
A peine avais-je commencé à parler de cette expérience, qu’il m’interrompit net : « Cela n’est pas du tout de notre domaine ! Nous visons le top niveau, le fin du fin des formations universitaires. »
Pareille anecdote peut, certes, donner à penser sur le système des médias. Mais pourquoi s’arrêter là ? N’est-ce pas chacune des institutions de la société qui visant le top niveau, fabrique des exclus, et donc des chômeurs de longue durée ? Question toujours essentielle. Surtout en ces temps de rentrée scolaire.
Comme tout salarié, ou presque, ce journaliste s’efforçait de faire ce qu’on attendait de lui, seule façon d’espérer garder son emploi et d’obtenir une promotion.
Sans le savoir, il m’a rappelé qu’il y avait toujours un risque à se compromettre avec les derniers de la classe ou de l’entreprise.
Ce risque, pourtant, certains osent le prendre. A l’école, à l’usine, à la mairie, au service social, à l’hôpital… Mais combien se décourageront faute de soutien et de compréhension ? Cette question-là aussi est essentielle. Si nous n’osons pas nous compromettre nous-mêmes, ne pourrions-nous pas du moins soutenir ceux qui ont ce courage ? Sans oublier nos enfants dont le sens de la justice est souvent plus aigu que le nôtre. Les exclus de la réussite scolaire composeront pour une grande part les chômeurs de longue durée de demain.