Lee Changdong, Poetry.

Film coréen, 2010

Marie-Hélène Dacos-Burgues

p. 56

Référence(s) :

Lee Changdong, Poetry, Corée du Sud, 2010, avec Yan Jun-hee, Lee David, Kim Hira, Ahn Nae-sang.

Citer cet article

Référence papier

Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Lee Changdong, Poetry. », Revue Quart Monde, 217 | 2011/1, 56.

Référence électronique

Marie-Hélène Dacos-Burgues, « Lee Changdong, Poetry. », Revue Quart Monde [En ligne], 217 | 2011/1, mis en ligne le 01 août 2011, consulté le 28 mars 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/7375

Le film1 est du genre méditatif bien qu’il montre la dualité du monde, sa noirceur et sa beauté. Il commence avec les bouillonnements de l’eau d’un fleuve, des enfants qui jouent au bord de l’eau et la découverte d’un cadavre qui flotte.

Mija est une coréenne de soixante-six ans qui aime être bien habillée. Elle vit seule avec son petit-fils dont elle a la charge complète. On voit d’abord Mija consulter un médecin pour des pertes de mémoire puis chercher à s’inscrire à un cours de poésie. Mija est fascinée par la beauté de la nature et par les fleurs. Le film, malgré une lenteur à laquelle nous ne sommes plus habitués, fait entrer dans la vie de Mija, voit le monde à travers ses yeux, entre dans son âme en nous laissant la liberté d’imaginer beaucoup de choses. Le beau et le laid se mélangent dans cette vie de façon inextricable. Le professeur de poésie a une théorie qui sert de base à la formation qu’il dispense et qui peut se résumer à ceci : « Il faut d’abord apprendre à décrire une pomme ». Voir, Mija sait déjà, mais il faut pouvoir mettre en mots ce qu’on voit. Or Mija commence à être atteinte de la maladie d’Alzheimer. Pour arriver à écrire son premier poème elle prend des notes au sujet de ce qu’elle regarde. Le club de lecture de poèmes, avec les blagues salaces d’un policier, ne comble pas son attente. Et que dire de son petit-fils, branché sur son ordinateur et sa chaîne hi-fi, qui la considère comme une moins que rien ! Elle n’a comme relation que le vieux monsieur qu’elle appelle Président et dont elle est l’aide-ménagère. Elle lui donne le bain, fait le ménage. Elle apprend que la noyée est une collégienne de l’école de son petit-fils. Celui-ci, questionné ne sait rien, et puis il ne parle jamais avec sa grand-mère. Mija va savoir : le viol collectif et le suicide de la jeune fille. Presque tout bascule alors dans sa vie. Dans une solitude immense, elle va continuer à vivre et à chercher à répondre à ces pères d’adolescents qui, avec la complicité du chef d’établissement, veulent éviter à tout prix le scandale. Rien n’est linéaire dans la vie de Mija. Tout est complexe, paradoxal et léger. Il n’y a aucun calcul. Même la détermination ne pèse pas. L’attitude avec le vieux Président, celle avec sa fille qu’elle avertit très tardivement, celle avec son petit-fils qu’elle prépare à aller en prison sans le lui dire mais en lui demandant simplement de se laver pour la venue de sa mère, tout reste dans le non-dit. Seule la jeune fille morte semble lui tenir compagnie et l’aider dans ses choix. C’est enfin le seul poème qu’elle réussit à écrire, se mettant à la place de cette petite. Toutes sortes de correspondances dans les images soulignent le propos du film pour en faire une œuvre de poésie, vraiment. Ce film a eu le prix du scénario au festival de Cannes 2010.

1 Corée du Sud, 2010 ; avec Yun Jun-hee, Lee David, Kim Hira, Ahn Nae-sang.

1 Corée du Sud, 2010 ; avec Yun Jun-hee, Lee David, Kim Hira, Ahn Nae-sang.

Marie-Hélène Dacos-Burgues

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