Dans ce livre, Lucien Sfez tente de faire le tour de la question : l'Egalité progresse-t-elle dans l'histoire ? Globalement, oui. Reste qu'à toutes les époques, des hommes demeurent exclus de l'espace égalitaire. Lucien Sfez nous conduit à travers l'histoire de la quête humaine de l'égalité : en premier la Grèce et l'avènement de la démocratie. L'égalité de quelques-uns y est payée par les femmes, les enfants, les étrangers, les esclaves.
Avec le christianisme, tous les hommes sont proclamés universellement égaux parce que tous créés à l'image de Dieu, sans exception cette fois-ci. Mais Sfez nous rappelle la distance que la culture chrétienne a prise avec le message évangélique de telle sorte que l'égalité prônée par cette dernière n'a pu advenir.
Avec les philosophes du 17ème (Descartes, Leibniz) et surtout du 18ème (Rousseau, Montesquieu, Diderot, la philosophie des Lumières), c'est la raison et non plus la foi qui fonde l'affirmation théorique de l'égalité de tous ; l'exigence d'égalité devient même fondement de l'Etat, mais reste un idéal difficilement accessible. Le 19ème voit le déclin de l'égalité. La notion est abordée d'un point de vue scientifique. Mais tous basculent dans l'idéologie en cherchant dans le contenu de la science des principes susceptibles de fonder l'éthique, le droit et la politique.
Pour Lucien Sfez, c'est la preuve que l'égalité a perdu peu à peu de sa valeur symbolique : elle n'est plus signe de ralliement. Aujourd'hui, d'autres idées la supplantent : idée de communication, et « le droit à la différence » qui risquent de masquer et d'escamoter purement et simplement les inégalités qui subsistent.
Pourtant, « remède à des situations de crise » pour « éviter la déchirure de la société », « voulue comme barrière pour juguler la destruction de la loi du plus fort », l'égalité ne demeure-t-elle pas vrillée au cœur de l'homme ? « Personne n'y croit, mais tout le monde la veut », car le « je suis comme tu es » l'impose toujours comme le fondement ultime de toute vie en société.