José Cubero, agrégé d’histoire, retrace pour nous l’histoire du vagabondage depuis le Moyen Age grâce à de très nombreuses sources (ordonnances, édits, lois…).
Il souligne, pour commencer, la distinction historique entre « faux » et « vrais » pauvres. Le vagabond est celui qui a abandonné sa communauté, qui a refusé de s’intégrer alors que le pauvre s’assimile au Christ souffrant et peut bénéficier de l’aumône.
Le livre est construit sur les grands moments historiques :
* Le Moyen Age : on passe d’un système de charité intégrée à une certaine hostilité ; distinction entre pauvres utiles (la charité permet d’absoudre ses péchés) et « pauvres inutiles ».
En 1347, la grande peste augmente la méfiance vis-à-vis des vagabonds : on voit apparaître des ordonnances sur la répression de la mendicité et du vagabondage.
* Les Temps modernes : émergence de l’idée du travail forcé : contraindre les pauvres au travail dans un lieu clos.
En 1764, apparition des dépôts de mendicité : on enferme les vagabonds.
* Les Lumières : les philosophes posent la question de la responsabilité de l’État : Turgot tente des réformes sociales.
En 1789, les révolutionnaires reconnaissent « les droits de l’homme pauvre sur la société ».
* Le dix-neuvième siècle : l’État policier désire contrôler la population.
En 1890, le livret de l’ouvrier, dont le défaut définissait le vagabond, est supprimé.
* Le vingtième siècle : une illusoire fin des vagabonds ; promulgation de lois d’assistance.
En 1994, le délit de la mendicité disparaît de la législation.
L’étude permet de constater que, si les errants ont toujours existé, ils n’ont jamais eu la parole et l’histoire du vagabondage est surtout l’histoire des réactions et du regard des autorités sur les errants.
La thèse de José Cubero est de montrer que l’éradication de la pauvreté a toujours été l’objectif des gouvernements et que les solutions répressives que l’on voit réapparaître aujourd’hui, tels que les arrêtés municipaux anti-mendicité, ne servent à rien. Il conclut par l’analogie entre l’errant d’hier et le clochard aujourd’hui, l’importance de ce groupe étant une constante culturelle dans l’histoire.
Toutefois, ce livre est difficile d’accès car les sources tiennent lieu de fil directeur et le lecteur se perd assez souvent dans les récits, les dates ou les noms.