Le comité des ministres, en vertu de l’article 15.b du statut du Conseil de l’Europe,
- considérant que le but du Conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres afin de sauvegarder et de promouvoir les idéaux et les principes qui sont leur patrimoine commun ;
- ayant à l’esprit la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
- préoccupé par les situations individuelles d’extrême précarité qui existent, parfois à grande échelle, dans tous les États membres ;
- conscient que la satisfaction des besoins humains matériels élémentaires (à tout le moins la nourriture, l’habillement, l’hébergement et les soins médicaux de base) découle de la dignité inhérente à tout être humain et constitue la condition d'existence de l'homme, ainsi que de son épanouissement ;
- conscient également que la satisfaction de ces besoins répond à un devoir d’humanité de la société ;
- estimant de surcroît que la reconnaissance d’un droit individuel, universel et justiciable des personnes en situation d’extrême précarité à la satisfaction de ces besoins est une condition à l'exercice d'autres droits fondamentaux et un élément indispensable dans un Etat démocratique fondé sur le droit ;
- se référant aux conclusions de la Conférence sur la dignité humaine et l'exclusion sociale (Helsinki, mai 1998) ; à la résolution 1999/26 de la Commission des droits de l'homme des Nations unies sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté ; à la recommandation 1196 (1992) de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe relative à l'extrême pauvreté et à l'exclusion sociale : vers des ressources minimales garanties, ainsi qu’à la recommandation NR (93) 1 du comité des ministres aux États membres relative à l'accès effectif au droit et à la justice des personnes en situation de grande pauvreté ;
- constatant que certains États membres du Conseil de l'Europe reconnaissent déjà, dans leur ordre juridique et leurs pratiques internes, l’existence d’un droit individuel, universel et justiciable à la satisfaction des besoins humains matériels élémentaires ;
- estimant que l’ordre juridique et la pratique de tous les États membres devraient reconnaître un tel droit,
- RECOMMANDE aux gouvernements des États membres de mettre en œuvre les principes figurant en annexe à la présente recommandation afin de reconnaître, au niveau national, un droit individuel, universel et justiciable à la satisfaction des besoins matériels élémentaires (à tout le moins la nourriture, l’habillement, l’hébergement et les soins médicaux de base) des personnes en situation d’extrême précarité.
Annexe à la recommandation n° R (2000) 3
Principe 1
Les États membres devraient reconnaître, dans leur législation et leur pratique, un droit à la satisfaction des besoins matériels élémentaires à toute personne en situation d’extrême précarité.
Principe 2
Le droit à la satisfaction des besoins matériels élémentaires devrait à tout le moins couvrir la nourriture, l’habillement, l’hébergement et les soins médicaux de base.
Principe 3
Le droit à la satisfaction des besoins matériels élémentaires devrait être justiciable, toute personne en situation d’extrême précarité devant pouvoir l’invoquer directement devant les autorités et le cas échéant devant les tribunaux.
Principe 4
L’exercice de ce droit devrait appartenir aux nationaux et aux étrangers, quel que soit le statut de ces derniers au regard du droit des étrangers, selon les modalités à définir par les autorités nationales.
Principe 5
Les Etats membres devraient veiller à ce que l’information sur l’existence de ce droit soit suffisante.