Des dossiers pédagogiques pour les enfants

Rédaction de la Revue Quart Monde

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Rédaction de la Revue Quart Monde, « Des dossiers pédagogiques pour les enfants », Revue Quart Monde [En ligne], 202 | 2007/2, mis en ligne le 01 mars 2008, consulté le 25 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/908

Comment des enfants peuvent-ils comprendre qu’il est possible de faire quelque chose ensemble pour lutter contre l’exclusion et la misère ?

Grâce aux dossiers pédagogiques1 élaborés pour la Journée mondiale du refus de la misère, les enseignants et les éducateurs qui veulent aider les enfants à découvrir les valeurs de fraternité et de solidarité reçoivent un soutien approprié.

En les encourageant à exprimer leurs idées, en leur permettant de se sentir en lien avec d’autres, en les soutenant dans ce qu’ils font au quotidien pour créer la paix, les enfants participent au combat contre l’exclusion.

Pour les enfants, le refus de la misère commence par une mesure à leur portée : chercher ensemble une manière d’agir qui ne laisse personne de côté.

Cette démarche inspire les dossiers pédagogiques en tirant parti de récits de vie, de contes ou de romans. Par le truchement de ces histoires, il est proposé aux enfants de bâtir l’amitié comme alternative aux moqueries, à la honte, au rejet et à l’exclusion. Cela aide aussi les adultes à réfléchir autour de questions essentielles :

-comment, dans nos écoles, dans nos groupes, soutenons-nous les élèves qui osent refuser l’injustice et l’exclusion de leurs camarades ?

-comment ces enfants entraînent-ils d’autres enfants et adultes à refuser ces situations avec eux ?

-comment aidons-nous les enfants à bâtir l’amitié avec celui qui a une couleur de peau différente, qui est petit, gros, mal habillé, ou qui ne réussit pas bien en classe ?

-comment aidons-nous les enfants à mieux se connaître, se comprendre, à se respecter et à s’entraider ?

Permettre aux enfants de faire la place à celui qui est le plus exclu, le moins attendu dans le groupe, c’est permettre à chacun d’être entendu et d’expérimenter la fraternité.

En 2007, grâce à l’expérience tirée de ces dossiers pédagogiques, Tapori2, en collaboration avec les éditions Quart Monde éditera une mallette pédagogique intitulée Ensemble contre la misère, l’amitié contre l’exclusion.

Elle est conçue à partir de trois histoires : celle de Valéria, tirée du livre Mon cœur est dans ce caillou »3 écrit par Noldi Christen ; un roman de Detty Verreydt, Je serai cascadeur, qui raconte l’amitié entre deux enfants très différents ; un conte, Et l’on chercha tortue, illustré par un groupe d’enfants du Burkina Faso ayant une vie très difficile. Sur la base de leur lecture, des activités diverses sont ensuite proposées aux enfants (théâtre forum, chansons, jeux...)

Ce travail donne l’opportunité aux enfants de s’exprimer sur des sujets importants, de se faire entendre des adules, de mettre en valeur leurs paroles et leurs actions.

Et aux adultes, l’opportunité de ne pas prendre en compte uniquement la parole des enfants les plus accessibles, les plus à l’aise, mais aussi l’expérience des enfants les plus pauvres, et ainsi permettre la rencontre entre les enfants qui ont à apprendre les uns des autres.

L’avis d’enseignants

Des enseignants évaluent la démarche4

« Les dossiers ont réellement permis aux enfants de prendre conscience de la pauvreté. Ils sont souvent touchés, émus par les histoires. Pour certains en difficultés dans leur famille, souvent une identification se fait. Cela leur apporte une certaine reconnaissance : ils ne sont pas seuls dans cette situation et on en parle en classe : ce n’est plus honteux ! Parfois même, certains parviennent à en parler en classe, à se libérer ainsi d’un poids. Exemple : un enfant bagarreur a pu dire qu’il se bagarrait car, chez lui, la situation était très difficile (maman alcoolique). Les autres enfants ont alors changé leur regard sur lui et essayé de l’aider ! »

« Les dossiers ont été précieux pour les enseignants à qui nous avions proposé d’entrer dans cette démarche. Sans eux, ils n’auraient pas osé prendre une telle initiative... »

« Dans notre commune (20 000 habitants), toutes les écoles ont participé à cette journée du 17 octobre par des chants, des affiches, des contes, des ateliers d’écriture et d’art plastique, une exposition dans la grande salle de la mairie où beaucoup de parents sont venus. Il faut dire que l’inspecteur a soutenu ce projet qui relève de l’éducation civique... »

« Le fait que cette journée annuelle soit institutionnalisée, mondiale, montre aux enfants son importance... Ils aiment participer à une cérémonie marquant cette journée, surtout s’ils peuvent y jouer un rôle... »

« Les élèves découvrent ce jour-là la réalité de vie des enfants les plus pauvres ou les plus marginalisés, une réalité que souvent ils ne connaissaient pas vraiment... Et une fois qu’on sait, on ne peut plus dire : on ne savait pas ! »

« Certains se sont sentis concernés et ont dit qu’ils voudraient eux aussi aller à la rencontre d’autres enfants, agir, faire quelque chose... tandis que d’autres pouvaient déjà donner des exemples d’actions positives ou de gestes de solidarité qu’ils avaient eux-mêmes réalisés ou dont ils avaient été les témoins... »

« Dans un groupe Tapori, ils peuvent plus facilement qu’en classe s’exprimer sur des situations qui leur paraissent injustes : quand un enfant est marginalisé et humilié à l’école à cause de son apparence physique, par exemple. Ils peuvent témoigner du courage de certains enfants qui ont moins de chance qu’eux-mêmes et leurs témoignages pourront être lus publiquement lors d’une manifestation du 17 octobre... »

« Les élèves découvrent aussi que tous les enfants ont les mêmes droits, par exemple le droit d’aller à l’école, le droit de vivre en famille, le droit d’habiter quelque part dans un environnement sain et sécurisé... Quand la catastrophe du tsunami s’est produite, ils en ont parlé spontanément et ont voulu envoyer un signe d’amitié aux enfants sinistrés (des banderoles de dessins leur ont été transmises par l’intermédiaire de l’équipe ATD Quart Monde de Bangkok) ... Quand nous avons étudié le livre de Jean-Michel Defromont L’Epine sur les roses5, qui raconte la délocalisation forcée de familles originaires du monde du voyage, ils ont tout de suite fait le rapprochement avec les campements existant sur la commune. Ils ont été choqués par la destruction des habitations, ont posé beaucoup de questions sur les différences dans les modes de vie, ont mesuré le poids des préjugés négatifs et injustes qui étaient portés sur ces populations... »

« Il arrive que des enfants, seuls ou en groupe, écrivent à Tapori. Et ils sont très touchés de recevoir une réponse qui leur est adressée personnellement. Cela les impressionne d’avoir été pris au sérieux dans ce qu’ils ont dit ou fait. C’est un signe fort d’encouragement à persévérer dans leur refus de la misère... »

Simon avait 7 ans...

Simon, participe depuis plusieurs années aux activités du mouvement ATD Quart-Monde et travaille pour des organisations caritatives actives auprès des enfants. Lui-même a grandi dans une très grande pauvreté, mais lorsqu’il était écouté et pris au sérieux en tant qu’enfant, il a appris à exprimer ses opinions sur un grand nombre de sujets différents, en particulier ceux se rapportant aux enfants et aux jeunes. Il a pris la parole en public pour la première fois à l’âge de sept ans lors d’une commémoration du 17 octobre et s’en souvient encore comme un moment clé de sa vie. Il est aujourd’hui un membre actif de la société à laquelle il apporte une contribution positive.

1 Ces dossiers, disponibles aux Editions Quart Monde, sont des outils pour travailler tout au long de l'année avec les enfants et les jeunes autour de

2 Tapori est un courant d'amitié reliant des enfants de tous pays et de tous milieux. "La Lettre de Tapori" apporte chaque mois aux enfants des

3 Sept histoires nous emmènent à la rencontre d'enfants nous invitant à réaliser avec eux un monde plus juste.

4 Tapori international (ATD Quart Monde, chemin Galiffe 5, CH 1201 Genève) a recueilli en 2006 auprès d'enseignants et d'animateurs de groupes d'

5 Editions Quart Monde, coll. En un mot, 2006, 77 pages.

1 Ces dossiers, disponibles aux Editions Quart Monde, sont des outils pour travailler tout au long de l'année avec les enfants et les jeunes autour de l'apprentissage de la solidarité : Dossier pour l'école et les groupes d'enfants jusqu'à 12 ans; Dossier pour les collèges, les lycées et les associations.

2 Tapori est un courant d'amitié reliant des enfants de tous pays et de tous milieux. "La Lettre de Tapori" apporte chaque mois aux enfants des nouvelles d'autres garçons et filles du monde dont la famille endure la pauvreté, propose des moyens pour agir, raconte ce que font des enfants pour "casser la misère" en créant l'amitié. Certaines de ces histoires de vie font l'objet d'un mini-livre dans la collection "Les enfants du courage".

3 Sept histoires nous emmènent à la rencontre d'enfants nous invitant à réaliser avec eux un monde plus juste.

4 Tapori international (ATD Quart Monde, chemin Galiffe 5, CH 1201 Genève) a recueilli en 2006 auprès d'enseignants et d'animateurs de groupes d'enfants des éléments d'appréciation sur leurs pratiques des dossiers pédagogiques, au sein de leur école ou de leur groupe Tapori.

5 Editions Quart Monde, coll. En un mot, 2006, 77 pages.

Rédaction de la Revue Quart Monde

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