« Etre et avoir »

Françoise Daud et Jean-Pierre Daud

Référence(s) :

Nicolas Philibert, Etre et avoir, Maïa Films, Les Films d'ici, 2002, 104'

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Référence électronique

Françoise Daud et Jean-Pierre Daud, « « Etre et avoir » », Revue Quart Monde [En ligne], 185 | 2003/1, mis en ligne le 01 octobre 2003, consulté le 16 avril 2024. URL : https://www.revue-quartmonde.org/9746

Présenté hors compétition au Festival de Cannes 2002, avec les treize élèves (de quatre à onze ans) de l’école de Saint-Etienne-sur-Usson (Puy-de-Dôme) et Georges Lopez, leur instituteur, ce film a reçu le prix Louis Deluc 2002.

Enfin un film d’où l’on ressort reposé et en paix ! Est-ce parce qu’on y voit une réussite du « vivre et grandir ensemble » ? C’est l’exemple d’une communauté où chacun trouve sa place (les petits avec les grands, les forts avec les faibles), où chacun est enrichi par la présence de l’autre. Avec un moyen à la portée de tous mais délicat d’emploi : la parole ! la parole écoutée ! la parole échangée ! la parole facilitée et découverte par un apprentissage. Apprendre à dire sa souffrance, apprendre à dire ses aspirations...

Les premières images de la classe nous montrent un « lieu de vie » pour les enfants : une tortue se promène posément, entourée de cartes de géographie, de dessins, de documents. Dans cette classe unique, il y a Jojo et quelques autres à l’âge de la maternelle, mais aussi des enfants plus âgés. Les deux plus grands sont du niveau de fin de primaire. Au milieu d’eux : « Monsieur l’instituteur. »

On est ébahi par le savoir de cet instituteur. Pas seulement par ce savoir commun à tout instituteur qui est d’apprendre à lire, à écrire, à compter. Mais par son « savoir se comporter », digne d’un psychologue. Il anime en fait une communauté autour de ces enfants de quatre à onze ans. Il entretient une relation personnelle avec chacun d’eux. Il se donne les moyens de connaître leurs parents pour mieux comprendre ce qu’ils vivent en dehors de l’école. Il sait qu’il n’est pas le seul éducateur ni même le premier. Il est aussi un opportuniste : toutes les occasions (un rayon de soleil, une dispute, une sortie...) sont bonnes pour comprendre ce qu’est la vie en société et pour se situer face aux réalités du monde.

On en vient à se demander dans quelle université il est donné aujourd’hui d’apprendre à être ainsi un « éveilleur » ? Où apprend-t-on à ne jamais donner la réponse mais à la susciter, à l’aider à émerger, à croire en l’autre et à lui faire confiance quel qu’il soit, à partir de sa personnalité ?

Dans quelques années, quand on demandera à Jojo, devenu adulte, ce qu’il a appris à l’école, peut-être répondra-t-il : « A la petite école de mon village, j’ai appris à rencontrer les autres... »

Françoise Daud

Jean-Pierre Daud

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